Soutenir les droits des femmes au Nigeria c’est lutter contre l’obscurantisme de Boko Haram

20/05/2014
Communiqué
ar en es fr

L’enlèvement de 223 lycéennes à Chibok, dans l’État de Borno dans le Nord du Nigeria, le 15 avril 2014 et l’effervescence des réseaux sociaux qu’il a suscité a enfin attiré l’attention de la communauté internationale sur les crimes commis par le groupe fondamentaliste Boko Haram. Il a tragiquement souligné l’absence de réaction adéquate des autorités nigérianes pour prévenir ces crimes et protéger les victimes.

La FIDH condamne les attaques systématiques commises par Boko Haram contre les civils, en particulier des femmes et des jeunes filles. Elle appelle les autorités nigérianes, avec le soutien de la communauté internationale, à prendre toutes les mesures nécessaires pour retrouver les jeunes lycéennes, prévenir ces crimes et traduire en justice les responsables.

Interview avec Drissa Traoré, vice-président de la FIDH sur le rôle que peut jouer l’Union Africaine dans la lutte contre Boko Haram

Cela fait 12 ans que Boko Haram multiplie les attaques, de plus en plus violentes, qui visent tant les civils nigérians que les autorités locales. Les meurtres, tortures, viols et autres formes de violences sexuelles, et enlèvements commis par ce groupe criminel à l’encontre de civils ont conduit à la fuite de plusieurs milliers de nigérians vers les Etats frontaliers.

Comme les talibans en Afghanistan ou au Pakistan, comme le groupe al-Shabaab en Somalie, Boko Haram, prêchant un Islam radical, cible en premier lieu les filles. Ses membres saccagent et brûlent les écoles et enlèvent les filles, prétextant les sauver du pêché, pour les vendre, les marier de force, ou les garder comme butin de guerre. Ces attaques relèvent incontestablement d’une politique criminelle et misogyne visant à priver les femmes de leurs droits fondamentaux, à la vie, à la sécurité et à l’éducation.

Ces exactions s’inscrivent dans un contexte généralisé de violations des droits humains perpétrées par le groupe terroriste, et en riposte, par l’armée nigériane dans le nord du pays qui échoue lors de ses actions à protéger la population civile et en particulier les femmes et les jeunes filles. Les assauts menés par l’armée se caractérisent le plus souvent par des violations des droits humains perpétrées au nom de la lutte légitime contre le terrorisme.

Ce n’est que sous la pression de l’émoi planétaire que, 3 semaines après les enlèvements, le 5 mai 2014, le Président du Nigeria a demandé l’aide de la communauté internationale en affirmant ne pas avoir les moyens de trouver et d’assurer la libération des lycéennes enlevées, et tentant de justifier ainsi l’inertie absolue du gouvernement nigérian dans cette affaire. Jusque là, tous les efforts sécuritaires étaient focalisés sur la tenue du Forum économique mondial à Abuja, censé mettre en valeur l’image du Nigeria en tant que première puissance économique d’Afrique.

Renforcé par l’impunité dont il bénéficie, le groupe terroriste Boko Haram continue ses attaques. Dans la nuit du 5 au 6 mai 2014, le groupe a enlevé 11 jeunes filles dans les villages de Warabe et Wala et ses membres ont tué 300 villageois à Gamboru Ngala.

La FIDH demande au gouvernement nigérian d’assumer ses responsabilités sur l’ensemble du territoire nigérian, en prenant toutes les mesures nécessaires pour prévenir et punir ces crimes en protégeant la population civile et en venant en aide aux victimes. La FIDH rappelle au gouvernement nigérian ses obligations d’assurer la sécurité et les droits de tous ses citoyens sans discrimination et de garantir le droit à l’éducation de toutes les filles et tous les garçons nigérians.

La FIDH rappelle que les violences contre les femmes sont favorisées par les lois et pratiques discriminatoires. Le code pénal en vigueur dans le nord du pays autorise par exemple, les hommes à infliger des châtiments corporels à leurs épouses pour les « corriger ». Le Nigeria doit garantir la pleine conformité de l’ensemble de son droit interne avec les instruments de protection des droits humains auxquels il est partie et notamment la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDAW) qu’il a ratifiée depuis 1985.

La FIDH et ses ligues rappellent que la situation au Nigéria fait l’objet d’un examen préliminaire ouvert par le Bureau de la Procureure de la CPI depuis 2010, qui a conclu qu’il existait une base raisonnable de croire que le groupe Boko Haram commettait des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre. La FIDH demande au Bureau de la Procureure d’ouvrir une enquête sur ces crimes graves et impunis au Nigéria.

Liste des signataires :

Asociación Pro Derechos Humanos (APRODEH, Peru)
Association Marocaine des Droits Humains (AMDH, Maroc)
Centro de Derechos y Desarrollo (CEDAL, Peru)
FIDH
"Equality without reservation !" campaign
Human Rights Commission of Pakistan (HRCP, Pakistan)
Collective for Research and Training on Development-Action (Lebanon)
Syrian Women league
L’Association Démocratique des Femmes du Maroc -ADFM

Lire la suite