Samira Sabou, emprisonnée depuis son arrestation le 11 juin 2020, reste incarcérée en détention préventive à la prison civile de Niamey dans l’attente du verdict de son procès. Mme Sabou est poursuivie pour diffamation au titre de l’article 29 de la loi sur la cybercriminalité du 25 juin 2019 et risque jusqu’à trois ans de prison et une amende de cinq millions de francs CFA (environ 7 620 euros) suite à une plainte déposée contre elle par Sani « Abba » Mahamadou Issoufou, le fils et directeur adjoint du cabinet du président de la République du Niger.
M. Issoufou a décidé de porter plainte contre la journaliste pour un commentaire posté par une personne tierce sous une publication Facebook de Samira Sabou en date du 26 mai 2020, dans laquelle elle faisait référence à un audit du Ministère de la Défense faisant état d’une surfacturation et de détournements de fonds lors de l’achat de matériel militaire. Le résultat du procès contre Mme Sabou pourrait engendrer des conséquences sans précédent pour les journalistes et les défenseurs des droits humains au Niger qui pourraient alors être tenus pour responsables des propos de tierces personnes. Par ailleurs, son confrère M. Ali Soumana, directeur de publication du journal Le Courrier, a, quant à lui, passé deux jours en garde à vue mi-juillet pour avoir écrit et diffusé un article relatif à la même affaire de détournement.
« Les poursuites à l’encontre de Mme Samira Sabou pour des propos tenus par une autre personne n’ont aucun fondement juridique et doivent donc être immédiatement abandonnées » , a dénoncé Alice Mogwe, présidente de la FIDH. « Le fait qu’elle et d’autres de ses confrères soient ciblés pour leur travail journalistique est très inquiétant et en dit long sur l’état de la liberté de la presse et de la liberté d’expression au Niger » .
Lors de la première audience de son procès qui s’est tenue le 14 juillet 2020, le Procureur de la République a requis un mois et une semaine de prison ferme, et un million de francs CFA (environ 1 524 euros) d’amende, à l’encontre de Mme Sabou. La partie civile a par ailleurs demandé un dédommagement de cinq millions de francs CFA (environ 7 620 euros). Le délibéré a été renvoyé au 28 juillet 2020.
« Au-delà des journalistes, ce sont plus généralement tous les défenseurs des droits humains qui voient leurs libertés se restreindre au Niger. Pour ne citer qu’un exemple, Maikoul Zodi, Halidou Mounkaila et Moussa Moudy sont toujours détenus pour avoir participé à une manifestation anti-corruption. Nous appelons à leur libération, ainsi qu’à celle de Samira Sabou et de tous les défenseurs des droits humains arbitrairement détenus au Niger » , a conclu Gerald Staberock, secrétaire général de l’OMCT.
L’Observatoire, partenariat de la FIDH et de l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT), a vocation à protéger les défenseurs des droits de l’Homme victimes de violations et à leur apporter une aide aussi concrète que possible. L’OMCT et la FIDH sont membres de ProtectDefenders.eu, le mécanisme de l’Union européenne pour les défenseurs des droits de l’Homme mis en œuvre par la société civile internationale.
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