Lettre ouverte à Monsieur Maaouya Ould’ Sid Ahmed Taya

30/05/2001
Rapport

Président de la République Islamique de Mauritanie
Nouakchott
Mauritanie

La Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) tient à vous exprimer son indignation concernant le refoulement de Me Moussa Maïga, avocat au barreau du Mali et membre de l’Association Malienne des Droits de l’Homme (AMDH), mandaté par la FIDH, pour observer le procès de Monsieur Chbih Cheikh Ould Malaïnine, leader du Front Populaire Mauritanien (FPM).

En effet, dimanche 27 mai 2001, Me Moussa Maïga s’est vu interdire l’accès au territoire mauritanien dès son arrivée à l’aéroport de Nouakchott. Il n’a reçu aucune notification écrite de cette interdiction, il lui a simplement été signifié que des instructions précises avaient été données afin de l’empêcher de passer le poste de contrôle de la police.

La traitement réservé à Me Moussa Maïga, est en contradiction flagrante avec la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’Homme adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies le 9 décembre 1998, et notamment de son article 9.3b qui stipule que " chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres, d’assister aux audiences, procédures et procès publics, afin de se faire une opinion sur leur conformité avec la législation nationale et les obligations et engagements internationaux applicables ".

Cette mesure exceptionnelle s’inscrit en porte à faux avec la volonté de coopération alléguée par la Mauritanie à l’égard de la FIDH. Elle confirme le caractère contestable des conditions dans lesquelles se déroule le procès.
Le procès de Monsieur Chbih Cheikh Ould Malaïnine, poursuivi pour "appartenance à une association de malfaiteurs", s’est ouvert lundi 28 mai 2001 devant la Cour criminelle de Aioun, ville située à 800 km de la capitale. Le leader du FPM y a été transféré après le dessaisissement de la Cour criminelle de Nouakchott sur décision de la Cour suprême saisie par le parquet général. Les avocats de la défense avaient décidé le boycott du procès, en signe de protestation contre les violations des articles 102, 236, 573 et 61 du Code de procédure pénale mauritanien qui prévoient la communication de la requête aux fins de renvoi à l’accusé et à sa défense.

Selon nos informations le Président de la Cour suprême séjourne depuis le début de la semaine dernière à Aioun, ce qui laisse croire à une volonté d’infléchir l’issue de ce procès.

La FIDH invite les autorités mauritaniennes à respecter les engagements internationaux auxquels elles ont souscrit en matière de droits de l’Homme et en particulier à :

 garantir pleinement les conditions d’un procès juste et équitable ;
 respecter la liberté d’action des ONG de défense des droits de l’Homme.
Je vous prie d’agréer, Monsieur le Président, l’expression de ma très haute considération.

SIDIKI KABA
Président

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