Le Président Ould Taya à Paris : La FIDH et LDH dénoncent un régime autoritaire

12/08/2002
Rapport

A l’occasion de l’arrivée du Président Ould Taya, en visite privée sur le territoire français, la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) et la Ligue française des droits de l’Homme et du citoyen (LDH) tiennent à dénoncer les méthodes autoritaires des autorités mauritaniennes, contraires aux instruments internationaux de protection des droits de l’Homme.

Un fort climat de tension politique est actuellement perceptible en Mauritanie. Cette situation s’illustre tout d’abord par une tentative de museler toute contestation politique. Le 2 janvier 2002, le ministre porte-parole du gouvernement rendait publique la décision de dissoudre le parti Action pour le changement (AC), principal parti d’opposition, en violation manifeste des libertés d ’expression et d’association reconnues par les normes internationales relatives aux droits fondamentaux de la personne humaine souscrites par la Mauritanie. En juillet dernier, les autorités tentaient de falsifier les élections pour le renouvellement du bâtonnier de l’ordre national des avocats de Mauritanie en vue d’inféoder l’ordre des avocats au pouvoir en place.

En outre, la FIDH et la LDH qui constatent depuis peu un retour caractérisé de la torture et des actes de barbarie, craignent une systématisation du recours à de telles pratiques. En juin dernier, M. Mohamed Baba, la FIDH et la LDH ont déposé une plainte auprès du procureur du tribunal de grande instance de Clermont Ferrand - à l’encontre de plusieurs membres et hauts responsables de la direction de la sûreté de l’Etat mauritanien ainsi que contre le ministre de l’Intérieur pour les actes de torture perpétrés contre M. Baba. On l’accusait à tort d’appartenir à un mouvement d’opposition non reconnu par le pouvoir en place.

Néanmoins, la FIDH et la LDH se sont récemment félicitées de la décision prise par la Chambre de l’instruction de Nîmes qui a ordonné la mise en accusation pour crimes de torture de Ely Ould Dah, capitaine mauritanien, devant la Cour d’Assises du Gard. Cet arrêt marque une étape importante dans la lutte contre l’impunité des crimes les plus graves donnant enfin l’espoir aux victimes mauritaniennes de se faire entendre alors qu’aucune poursuite judiciaire n’avait été menée à l’encontre des tortionnaires en Mauritanie et qu’une loi d’amnistie en juin 1993 était venue clore toute éventuelle démarche en ce sens.

Les actes de torture et les mesures de pression et rétorsion contre l’ordre des avocats et les partis politiques démontrent une nouvelle fois la volonté du gouvernement mauritanien de museler l’opposition et de réduire à la plus simple expression toutes les velléités de dénonciation des violations des droits de l’Homme en Mauritanie d’autant que les initiatives visant à renouer le dialogue social en vue de parvenir à un meilleur respect des libertés fondamentales et des droits de l’Homme n’ont pas été suivies d’effet.

La FIDH et la LDH rejoignent ainsi la société civile mauritanienne, notamment l’Association Mauritanienne des Droits de l’Homme (AMDH), membre de la FIDH et les associations de victimes engagées dans les procédures judiciaires en France contre plusieurs responsables mauritaniens, dans son appel à la manifestation du jeudi 15 août à Paris1 pour marquer notre ferme opposition aux pratiques autoritaires du pouvoir en place. Si le Président Ould Taya dispose de l’immunité de Chef d’Etat en exercice empêchant toute poursuite à son encontre même sous couvert de la compétence universelle, sa présence en France en visite privée est l’occasion de mettre en garde le gouvernement français dans sa coopération avec le gouvernement mauritanien et d’adresser un signal fort aux autorités de Nouakchott pour le respect de leurs obligations internationales relatives à la protection des droits de l’Homme.

Lire la suite