Ce 28 mars 2017, la Chambre d’accusation a ordonné le renvoi d’Aliou Mahamane Touré devant la Cour d’assises. Ce procès constitue une première victoire pour les victimes et nos organisations qui les accompagnent. Elles pourront ainsi participer au procès d’un présumé responsable de crimes commis par les groupes rebelles et les groupes djihadistes terroristes durant l’occupation du Nord Mali de 2012-2013. La FIDH et l’AMDH appellent les autorités judiciaires à diligenter l’ouverture de ce procès.
« Quasiment 5 ans jour pour jour après la prise de Gao par les groupes rebelles et terroristes, cette décision marque un pas important dans la lutte contre l’impunité des crimes odieux commis contre les civils durant l’occupation de la ville »
Ce procès doit permettre aux victimes et à leurs avocats de participer aux débats et de soulever les préoccupations qui leur paraissent essentielles. Ainsi, dans l’examen de la culpabilité de M. Aliou Mahamane Touré, la Cour d’Assises doit pleinement prendre en compte les crimes subis par ces victimes : actes de torture, mutilations, violences sexuelles et enrôlement d’enfants dans les rangs du MUJAO.
« Le procès de Aliou Mahamane Touré doit permettre aux parties civiles de témoigner de leurs souffrances, et que les crimes qu’elles ont subis soient reconnus et pris en compte par la justice malienne. Après 5 ans d’attente, elles peuvent enfin espérer obtenir justice et réparations. »
A travers leurs avocats, la FIDH et l’AMDH représentent une dizaine de victimes constituées parties civiles dans cette procédure depuis les débuts de l’instruction. Elles accompagnent également devant la justice malienne plus de 100 victimes de crimes commis par les groupes armés au Nord du Mali. (liens)
Cette décision est intervenue au deuxième jour de la Conférence Nationale d’Entente prévue dans l’Accord de paix de juin 2015. Elle rappelle combien la justice et la lutte contre l’impunité sont une condition essentielle d’une paix durable et de la réconciliation nationale.
Contexte Entre janvier 2012 et mars 2013, des groupes rebelles indépendantistes touaregs (MNLA) et des groupes armés djihadistes (dont AQMI et le MUJAO) avaient pris le pouvoir dans le nord du Mali. Pendant cette période, le territoire fut le théâtre des crimes les plus graves : viols massifs, tortures, amputations, flagellations, exécutions sommaires, destruction du patrimoine culturel. La ville de Gao fut prise le 31 mars 2012 par les forces du MNLA, alliées à des combattants du MUJAO. Très vite, le groupe djihadiste évince le MNLA et prend le contrôle effectif de la ville. Entre la fin du mois de juin 2012 jusqu’à la libération de la ville fin janvier 2013, le MUJAO impose sa vision de la charia (loi islamique), à travers un système répressif organisé et impitoyable. Il est mis en œuvre par la police et le tribunal islamique, qui se livrent à de graves exactions contre les civils. Natif de la région, Aliou Mahamane Touré est l’ancien commissaire de la police islamique de Gao. Il a été un acteur clé de ce système de terreur. Il a été arrêté par les autorités maliennes le 23 décembre 2013, et placé en détention. |
(1) Acronymes des groupes cités dans le communiqué :
MUJAO : Mouvement pour l’unité et le jihad en Afrique de l’Ouest MUJAO
MNLA : Mouvement National pour la Libération de l’Azawad
AQMI : Al Qaeda au Maghreb Islamique