Lettre ouverte au Président du Mali et à l’Assemblée nationale : adoption du nouveau Code de la Famille et de la Personne

21/07/2009
Communiqué

Le 8 mars 2009, plus d’une centaine d’organisations africaines ont lancé la campagne « L’Afrique pour les droits des femmes : Ratifier et Respecter » appelant les États africains à ratifier les instruments régionaux et internationaux de protection des droits des femmes que sont le Protocole à la Charte africaine des droits de l’Homme et des peuples relatif aux droits des femmes en Afrique, la Convention des Nations unies pour
l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (Convention CEDAW), dont nous célébrerons cette année le trentième anniversaire, ainsi que son Protocole facultatif.

Soutenue par de nombreuses personnalités aussi remarquables que le Prix Nobel de la paix Mgr Desmond Tutu ou le Prix Nobel de la littérature et défenseur des droits humains M. Wole Soyinka, ainsi que par de hauts fonctionnaires de l’Union africaine, telle Mme Soyata Maiga, Rapporteure spéciale de la Commission africaine des droits de l’Homme et des peuples sur les droits des femmes en Afrique, cette campagne demande aux États africains de prendre toutes les mesures nécessaires pour respecter les dispositions de ces instruments, notamment en abrogeant les lois discriminatoires et en adoptant des lois protectrices des droits
des femmes.

La Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH), qui coordonne cette campagne en coopération avec cinq organisations régionales africaines [1] constate que le Mali a ratifié la Convention CEDAW en 1985 sans pour autant incorporer ses dispositions en loi interne. La FIDH prend acte que le Mali a ratifié le Protocole à la Charte africaine relatif aux droits des femmes en Afrique en 2005 et a soumis, en 2006, son rapport périodique au Comité CEDAW. La FIDH espère que ces initiatives accéléreront le respect des droits des femmes dans votre pays.

Car force est de constater que, faute d’un cadre législatif conforme à ces instruments, les femmes maliennes continuent d’être l’objet de discriminations et de pratiques néfastes : persistance des mutilations génitales féminines, violence à leur égard perpétrée en toute impunité, âge légal du mariage inférieur à celui des
hommes, autorisation de la polygamie ou encore absence d’interdiction de la pratique du lévirat. Préoccupé par la persistance de législations discriminatoires, le Comité CEDAW a ainsi appelé les autorités maliennes à « accorder un rang de priorité élevé à la réforme de la législation et, en particulier, à mener à terme le processus nécessaire pour adopter au premier trimestre 2006 le projet de code de la personne et de la famille », une recommandation qui figurait également dans la note publiée en 2006 par la FIDH sur la situation des femmes au Mali.

Au cours d’une audience accordée le 15 juillet 2009 à la FIDH ainsi qu’aux représentants de son organisation membre au Mali, l’Association malienne des droits de l’Homme (AMDH), le Premier Ministre, Monsieur Modibo Sidibé, a annoncé l’adoption, en Conseil des Ministres, du projet de réforme du Code de la Famille et de la Personne. La FIDH a accueilli avec satisfaction la présentation du projet devant l’Assemblée nationale du Mali. L’adoption du nouveau Code de la famille constituera en effet une avancée importante pour le respect des droits humains des femmes maliennes.

Au nom de toutes les organisations et personnalités signataires de la campagne « L’Afrique pour les droits des femmes : Ratifier et Respecter » la FIDH appelle l’ensemble des parlementaires maliens, en cette trentième année de la Convention CEDAW, à affirmer leur engagement en faveur des droits des femmes au Mali en
adoptant ce projet de réforme.

La FIDH déplore toutefois le fait que, contrairement aux obligations internationales et régionales du Mali, ce projet de réforme reste silencieux sur plusieurs violations graves des droits des femmes, notamment les mutilations génitales féminines et le viol conjugal.

La FIDH et les organisations signataires de la campagne espèrent que l’Assemblée Nationale ne tardera pas à respecter les engagements pris par le Mali et appelle les autorités et les législateurs à assurer la mise en conformité pleine et entière des lois internes avec les instruments internationaux et régionaux de protection
des droits humains de femmes.

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