Guinée : Accélération des enquêtes judiciaires portant sur les répressions de janvier et février 2007

AFP / GEORGES GOBET

(Paris, Conakry) A l’occasion du neuvième anniversaire de la répression sanglante des manifestations organisées par les centrales syndicales guinéennes en janvier et février 2007, la FIDH et l’OGDH, à l’origine de la procédure judiciaire en cours, et constituées parties civiles aux côtés des victimes qu’elles représentent, saluent l’accélération des enquêtes qui pourraient déboucher au cours des prochains mois sur l’inculpation d’individus qui occupaient à l’époque des faits des postes clés au sein du gouvernement, de l’armée ou de la police.

Légende photo : Personnes faisant la queue devant la morgue de Donka le 23 janvier 2007 pour identifier les corps des membres de leur famille tués lors des affrontements avec les forces de sécurité.

Le 10 janvier 2007, les centrales syndicales guinéennes suivies des forces vives regroupées au sein des organisations de la société civile, des organisations professionnelles avaient lancé une grève générale pour protester contre l’interférence de l’Exécutif dans les affaires judiciaires, la cherté de la vie, la mauvaise gouvernance et le manque de démocratie qui caractérisaient le régime du général Lansana Conté, au pouvoir de 1984 jusqu’à sa mort, en 2008.

Le 22 janvier, en plein cœur de Conakry, des bérets rouges de la garde présidentielle, accompagnés par des éléments des forces de l’ordre, ouvraient le feu sur des civils qui manifestaient pacifiquement, faisant des dizaines de morts et des centaines de blessés. La répression allait se poursuivre jusqu’à la mi-février, dans les principales villes du pays, causant la mort de plusieurs centaines de personnes, des milliers de blessés et des dégâts matériels considérables.

Pendant plusieurs années, ces graves violations des droits de l’Homme n’ont fait l’objet d’aucune enquête judiciaire. C’est en mai 2012 que l’OGDH et la FIDH ont décidé de porter plainte et de se constituer parties civiles aux côtés des victimes. Cette plainte a donné lieu à l’ouverture d’une information judiciaire qui a connu au cours des derniers mois des développements considérables puisque plusieurs personnes ont été mises en cause par les victimes représentées par les avocats de l’OGDH et de la FIDH et pourraient être inculpées au cours des prochains mois.

« L’OGDH et la FIDH, qui représentent également les victimes du 28 septembre 2009, se félicitent que des avancées soient également enregistrées dans le dossier des répressions de 2007. Il est désormais permis d’espérer que la Guinée organisera non pas un mais deux procès d’envergure majeure à l’horizon 2017 »

Souhayr Belhassen, présidente d’honneur de la FIDH

Compte tenu de l’ampleur et de la complexité du dossier, un important travail reste encore à mener par la justice guinéenne pour rendre possible l’audition des victimes et témoins sur l’ensemble du territoire.

« Pour accompagner la justice, nos organisations mènent des enquêtes sur l’ensemble du territoire afin de garantir que les victimes de ces événements, partout où elles se trouvent, puissent participer à la procédure et bénéficier de l’assistance d’avocats guinéens et internationaux, afin que leur droit à la justice, à la vérité et à réparation puisse être reconnu par la justice guinéenne »

Me, Hamidou Barry, membre du Bureau exécutif de l’OGDH, chargé de la protection et des questions juridiques

Si, comme en témoignent ces deux procédures judiciaires en cours, les efforts consacrés à l’instauration d’une justice nationale indépendante et impartiale, et à la lutte contre l’impunité en Guinée commencent désormais à porter leurs fruits, il est néanmoins tout aussi important de mettre en place dans les meilleurs délais une commission de réconciliation nationale qui s’intéressera à l’ensemble des victimes de violences politiques commises au cours du demi siècle de régimes autoritaires qu’a connu la Guinée.

« La tenue de ces procès permettraient à la Guinée de tourner une page de son histoire. Cependant, l’instauration d’un Etat de droit pérenne passe également par une recherche de la vérité sur toutes les violations passées des droits de l’Homme et la mise en place de garanties de non répétition de telles violations par l’État, que doit pouvoir apporter le processus de réconciliation en cours »

Abdoul Gadiry Diallo, président de l’OGDH
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