Attaque d’une ONG des droits de l’homme - CIV 001 / 0507 / OBS 050

25/05/2007
Appel urgent

L’Observatoire a été informé par la Ligue ivoirienne des droits de l’Homme (LIDHO) d’une attaque dirigée contre son siège le 21 mai 2007.

L’Observatoire pour la Protection des Défenseurs des Droits de l’Homme, programme conjoint de l’Organisation Mondiale Contre la Torture (OMCT) et de la Fédération Internationale des Ligues des Droits de l’Homme (FIDH), vous prie d’intervenir de toute urgence sur la situation suivante en Côte d’Ivoire.

Description des faits :

Selon les informations reçues, environ 300 éléments de la Fédération estudiantine et scolaire de Côte d’Ivoire (FESCI) ont entièrement saccagé le siège de la LIDHO à Abidjan, dans le quartier de Cocody Mermoz, le 21 mai 2007, entre 11h et 12h30 GMT. Ces individus ont emporté tout le matériel informatique, le matériel et les fournitures de bureau et dérobé tous les biens personnels des huit membres de la LIDHO et stagiaires présents sur place (argent, téléphones portables, sacs, etc.). Ils ont endommagé le bâtiment et détruit le mobilier et les documents d’archives. Les dégâts sont estimés à au moins 46 000 euros.

Par ailleurs, malgré le fait qu’un commissariat de police se trouve à 300 mètres du siège de la LIDHO et que des policiers, alertés, se soient rendus sur les lieux pendant le saccage, aucun des assaillants n’a été arrêté. Au contraire, ces derniers ont poursuivi leur attaque sans être inquiétés et ont ensuite tenu un meeting devant le siège de la Ligue consistant à proférer des propos très hostiles à l’encontre de la LIDHO et des enseignants grévistes considérés comme des « traîtres et des ennemis du pouvoir ».

En effet, le motif invoqué par la FESCI est que la LIDHO a prêté son siège aux enseignants et chercheurs des universités de Côte d’Ivoire en grève depuis le 13 avril 2007 pour faire une conférence de presse le vendredi 18 mai. Cette réunion a été perçue comme un acte de défiance à l’égard de la FESCI, qui a interdit toute réunion de la Coordination nationale des enseignants et chercheurs (CNEC) dans les universités ivoiriennes.

La LIDHO a déposé une plainte contre M. Serge Koffi, secrétaire général de la FESCI qui, au cours d’un meeting qu’il avait tenu à l’université de Cocody deux heures plus tôt, a publiquement demandé à ses militants d’aller attaquer le siège de la LIDHO. Une plainte a également été déposée contre le secrétaire de la section FESCI de la « Cité Rouge », surnommé « Général Blanchard », qui a conduit l’opération de pillage et de destruction.

L’Observatoire souligne que le siège de la LIDHO a toujours été un lieu de rencontres d’organisations de la société civile, d’étudiants ou de personnes qui y viennent pour des réunions, des formations, des recherches, de l’assistance juridique ou judiciaire etc. Durant les années 1990, la LIDHO a par ailleurs souvent prêté ses locaux et son assistance à la FESCI, considérée alors comme un syndicat estudiantin.

Toutefois, depuis le début des années 2000, la FESCI s’est progressivement transformée en milice et s’est rendue coupable de nombreuses exactions sur les campus universitaires, exactions qui sont de surcroît perpétrées dans la plus grande impunité, la FESCI bénéficiant de la complaisance des autorités académiques et du silence des pouvoirs publics ivoiriens : assassinats de M. Habib Dodo, un militant d’une autre organisation estudiantine, et de M. Donatien, un dissident de la FESCI ; viols d’étudiantes ; persécutions et agressions des militants d’autres organisations syndicales sur les campus ; passages à tabac des magistrats qui osent juger ses militants ayant commis des délits ; expulsions des résidences universitaires des étudiants qui ne viennent pas assister à ses meetings ; persécutions des enseignants qui ne respectent pas ses mots d’ordre de grève ; confiscation des bourses de certains étudiants qui lui sont défavorables ; gestion des résidences universitaires et encaissement des loyers des chambres ; racket des commerçants exerçant dans les périmètres des campus universitaires, etc.

La LIDHO, qui prend souvent le risque de dénoncer les actes de la FESCI, est considérée par celle-ci comme une cible à détruire ; il est donc à craindre que l’attaque de son siège ne s’inscrive dans cette logique de représailles, la conférence de presse tenue par la CNEC au siège de la LIDHO n’étant qu’un prétexte fallacieux utilisé par la FESCI pour mener de telles actions. Ainsi, la sécurité des responsables de la LIDHO n’est pas suffisamment garantie en Côte d’Ivoire.

Actions demandées :

L’Observatoire vous prie d’écrire aux autorités ivoiriennes et de leur demander de :

i. garantir en toutes circonstances l’intégrité physique et psychologique de tous les membres de la LIDHO ;

ii. mener une enquête indépendante sur les faits décrits ci-dessus, afin que leurs auteurs soient identifiés et dûment jugés et sanctionnés conformément à la loi en vigueur ;

iii. se conformer aux dispositions de la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’Homme, adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies le 9 décembre 1998, et plus particulièrement à son article 1 qui dispose que "chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres, de promouvoir la protection et la réalisation des droits de l’Homme et des libertés fondamentales aux niveaux national et international", ainsi que son article 12.2, qui dispose que "l’Etat prend toutes les mesures nécessaires pour assurer que les autorités compétentes protègent toute personne, individuellement ou en association avec d’autres, de toute violence, menace, représailles, discrimination de facto ou de jure, pression ou autre action arbitraire dans le cadre de l’exercice légitime des droits visés dans la présente Déclaration" ;

iv. plus généralement, se conformer aux dispositions de la Déclaration universelle des droits de l’Homme et aux instruments régionaux et internationaux relatifs aux droits de l’Homme ratifiés par la Côte d’Ivoire.


Adresses :

· M. Laurent Gbagbo, Président de la République, Présidence de la République, BP 1354, Abidjan 01. Fax : 00 225 21 14 25

· M. Mamadou Koné, Ministre de la Justice et des droits de l’Homme, Plateau 1, Bloc ministériel, Abidjan. Tél : (225) 20 21 17 27 / Fax : (225) 20 21 85 10.

· M. Youssouf Bakayoko, Ministre des affaires étrangères, Plateau, Bloc Ministériel, BP V 163 Abidjan. Tél : (225) 20 22 71 50 / 20 22 71 26 / Fax : (225) 20 33 23 08.

· M. Joseph Dja Ble, Ministre de l’Intérieur, Plateau, Immeuble SETU, Cathédrale St Paul, 01BP 241 Abidjan 01. Tél : (225) 20 21 26 82 / Fax : (225) 20 32 32 27.

· M. Sébastien Dano Djedje, Ministre de la Réconciliation nationale et des Relations avec les institutions. Cocody, près du Lycée Classique, 08 BP 590 Abidjan 08. Tél : (225) 22 48 89 84 /
Fax : (225) 22 48 92 82.

· M. Guy-Alain Emmanuel Gauze, Ambassadeur, Ambassade de la Côte d’Ivoire auprès des Nations unies à Genève, 149h route de Ferney, Case postale 315, 1218 Grand-Saconnex, Suisse. Tel : + 41 22 717 02 50. Fax : + 41 22 717 02 60 / + 41 22 717 02 68. Email : cotedivoire@bluewin.ch

· Ambassade de la Côte d’Ivoire à Bruxelles, 234 avenue F.D. Roosevelt, 1050 Ixelles, Belgique. Tel : + 32 2 661.34.50 / 32.2.672.23.57. Fax : + 32 2.672.04.91. Email : mailbox@ambacibnl.be

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Genève-Paris, le 24 mai 2007

Merci de bien vouloir informer l’Observatoire de toutes actions entreprises en indiquant le code de cet appel.

L’Observatoire, programme de la FIDH et de l’OMCT, a vocation à protéger les défenseurs des droits de l’Homme victimes de violations et à leur apporter une aide aussi concrète que possible.

L’Observatoire a été lauréat 1998 du prix des Droits de l’Homme de la République Française.

Pour contacter l’Observatoire, appeler La Ligne d’Urgence :
E-mail : Appeals@fidh-omct.org
Tel et fax FIDH : 33 1 43 55 20 11 / 33 1 43 55 18 80
Tel et fax OMCT : + 41 22 809 49 39 / 41 22 809 49 29

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