CAMEROUN : Les défenseurs des droits de l’Homme endeuillés

19/07/2013
Appel urgent

Paris-Genève, le 19 juillet 2013. L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme, programme conjoint de la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) et l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT) et la Maison des droits de l’Homme du Cameroun (MDHC) expriment leur plus vive indignation suite à l’assassinat d’Eric Ohena Lembembe, directeur exécutif de la Fondation camerounaise de lutte contre le sida (Cameroonian Foundation for AIDS - CAMFAIDS) et journaliste engagé dans la défense des droits des lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres et intersexuel (LGBTI) au Cameroun et demande aux autorités de mener une enquête exemplaire pour faire la lumière sur les circonstances de cette mort.

Eric Ohena Lembembe a été retrouvé assassiné à son domicile, à Yaoundé, dans la soirée du 15 juillet 2013. Après plusieurs tentatives de le joindre au téléphone, ses amis ont décidé de se rendre chez lui. Ils ont trouvé sa porte cadenassée mais pouvaient distinctement apercevoir le corps du défenseur à travers la fenêtre. Alertée, la police a pu s’introduire dans son domicile. D’après les premières constatations, il semblerait qu’il ait été battu à mort par ses agresseurs, son cou et ses pieds ayant apparemment été brisés, son visage, ses mains et ses pieds brûlés au fer à repasser.

Eric Ohena Lembembe était particulièrement actif dans la défense des droits des LGBTI et travaillait en collaboration avec plusieurs organisations telles qu’Alternatives Cameroun et l’Association pour la défense des homosexuel-les (ADEFHO). Il contribua notamment à la préparation et à la diffusion d’un rapport publié par Human Rights Watch en mars 2013 et avait adressé des recommandations au cours de l’Examen périodique universel (EPU) du Cameroun devant le Conseil des droits de l’Homme de l’ONU en mai 2013. Il contribuait également au blog Erasing 76 Crimes et avait participé à l’écriture du livre From Wrongs to Gay Rights.

Depuis plusieurs mois, les menaces ciblant les militants associatifs, avocats et associations engagés dans la défense des droits des LGBTI se sont multipliées. Alors que les autorités responsables de garantir l’ordre et la sécurité des citoyens ont été alertées et des plaintes dûment déposées, aucune enquête sérieuse n’a été menée et aucune mesure de protection n’a été prise pour garantir la sécurité des personnes et associations visées.

« C’est l’ensemble de la communauté des défenseurs des droits de l’Homme qui se trouve affectée par l’assassinat de ce jeune militant. Le combat pour l’égalité et contre les discriminations est un combat universel pour garantir le respect des droits de chacun quel que soit l’identité de genre et l’orientation sexuelle », a déclaré Karim Lahidji, président de la FIDH.

« Les menaces contre les défenseurs des droits de LGBT n’ont cessé de se multiplier ces derniers mois au Cameroun. Les autorités ne peuvent et ne doivent plus rester silencieuses. Un signal fort doit être lancé ! Les autorités sont responsables des la sécurité des défenseurs. Cette impunité doit cesser immédiatement », a ajouté Gerald Staberock, secrétaire général de l’OMCT.

L’Observatoire et le MDHC condamnent avec la plus grande fermeté l’assassinat d’Eric Ohena Lembembe, qui s’inscrit dans un contexte d’insécurité croissante et de menaces et intimidations répétées à l’encontre des défenseurs des droits de l’Homme camerounais engagés dans la défense des droits des LGBTI, et appellent les autorités camerounaises compétentes à mener une enquête indépendante, effective, rigoureuse, impartiale et transparente afin d’identifier les responsables, de les traduire devant un tribunal indépendant, compétent et impartial conformément aux instruments internationaux et régionaux de protection des droits de l’Homme, et d’appliquer les sanctions pénales, civiles et/ou administratives prévues par la loi.

Enfin, l’Observatoire et le MDHC appellent les autorités camerounaises à garantir en toutes circonstances l’intégrité physique et psychologique de l’ensemble des défenseurs des droits de l’Homme au Cameroun, en particulier ceux engagés dans la défense des droits des LGBTI.

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