Menaces et actes d’intimidation à l’encontre de MM. Gabriel Rufyiri et Pierre Claver Mbonimpa - BDI 001 / 0409 / OBS 061.1

07/04/2010
Appel urgent

L’Observatoire a été informé par des sources fiables de l’existence de menaces et d’actes d’intimidation à l’encontre de M. Gabriel Rufyiri et M. Pierre Claver Mbonimpa, présidents respectifs de l’Observatoire de lutte contre la corruption et les malversations économiques (OLUCOME) et de l’Association pour la protection des droits humains et des personnes détenues (APRODH).

L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme, programme conjoint de la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) et de l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT), a reçu de nouvelles informations et vous prie d’intervenir de toute urgence sur la situation suivante au Burundi.

Selon les informations reçues, le 20 mars 2010, M. Pierre Claver Mbonimpa a reçu un appel anonyme le menaçant de mort s’il continuait à travailler sur le dossier de M.Ernest Manirumva, vice-président de l’OLUCOME assassiné en avril 2009. A ce jour, aucun des commanditaires de cet assassinat n’a été identifié (Cf. rappel des faits).

Les 22 et 23 mars, les voisins de M. Mbonimpa ont également surpris plusieurs individus non-identifiés en train de rôder aux alentours du domicile de celui-ci. Le 1er avril, trois individus à moto se sont présentés au domicile du voisin de M. Mbonimpa, en pensant visiblement qu’il s’agissait du domicile de ce-dernier, et ont demandé si M. Mbonimpa se trouvait présent à ce moment-là. Après que leur interlocuteur eut répondu par la négative, ils se sont retirés.

Par ailleurs, le 1er avril 2010 au soir, un groupe d’individus armés s’est rendu au domicile de M. Gabriel Rufyiri en son absence et, surpris par les voisins, a pris la fuite. La femme de M. Rufyiri avait en outre reçu un appel anonyme quelques jours auparavant visant à avertir son mari de “faire attention aux dossiers qu’il traitait”.

Suite à ces faits, MM. Mbonimpa et Rufyiri n’ont pas porté plainte, les plaintes précédentes déposées par les membres de l’OLUCOME et d’APRODH étant restées sans suite.

En outre, M. Gabriel Rufyiri aurait été informé de source fiable de la planification de son assassinat et de celui de M. Pierre Claver Mbonimpa.

L’Observatoire dénonce fermement les menaces de mort et actes d’intimidation à l’encontre de MM. Gabriel Rufyiri et Pierre Claver Mbonimpa et craint qu’ils n’aient pour seul objectif de mettre un terme à leur lutte contre l’impunité dans le cas de l’assassinat de M. Ernest Manirumva, et plus généralement à la dénonciation de la part de l’OLUCOME et de l’APRODH des actes de corruption et des violations des droits de l’Homme au Burundi. En effet, ces menaces et actes d’intimidation interviennent suite aux déclarations publiques de l’OLUCOME et l’APRODH le 9 mars 2010 concernant l’enquête sur l’assassinat de M. Manirumva[1].

L’Observatoire rappelle que l’OLUCOME travaille depuis 2002 sur des dossiers de corruption extrêmement sensibles mettant en cause les plus hautes autorités de l’Etat, et que plusieurs responsables de cette organisation ont déjà été victimes de menaces et d’emprisonnement depuis 2006[2]. L’Observatoire rappelle également que, le 23 novembre 2009, le Ministre de l’Intérieur burundais a ordonné l’annulation de l’agrément du FORSC, qui par conséquent est désormais considéré comme une organisation illégale[3].

Rappel des faits :

Dans la nuit du 8 au 9 avril 2009, des inconnus se sont introduits par effraction au domicile de M. Ernest Manirumva à Bujumbura. M. Manirumva a succombé à plusieurs coups de couteau infligés par ses assaillants, qui auraient dérobé plusieurs documents relatifs aux activités de l’organisation. La même nuit, la porte de son bureau a également été forcée. Dans les deux cas, aucun objet de valeur n’a été dérobé.

Deux semaines après la mort de M. Manirumva, M. Gabriel Rufyri a reçu des menaces par téléphone suite auxquelles il a porté plainte contre X. auprès du procureur de la République de la mairie de Bujumbura mais aucune suite n’a été donnée à cette plainte. Peu avant son assassinat, M. Manirumva avait lui aussi reçu des appels anonymes le menaçant.

Actions requises :

i. Garantir en toutes circonstances l’intégrité physique et psychologique de M. Gabriel Rufyiri et M.Pierre Claver Mbonimpa ainsi que de l’ensemble des membres de l’OLUCOME et de l’APRODH et de tous les défenseurs des droits de l’Homme au Burundi ;

ii. Mener sans délais une enquête exhaustive, indépendante, effective, rigoureuse et impartiale sur les menaces à l’encontre de M. Gabriel Rufyiri et M. Pierre Claver Mbonimpa ainsi que sur les circonstances de la mort de M. Ernest Manirumva, ce afin d’identifier les responsables, de les traduire devant un tribunal indépendant, compétent et impartial conformément aux instruments internationaux et régionaux de protection des droits de l’Homme, et d’appliquer les sanctions pénales, civiles et/ou administratives prévues par la loi ;

iii. Garantir une réparation adéquate à la famille de M. Ernest Manirumva ;

iv. Veiller à ce qu’un terme soit mis à toute forme de menaces et de harcèlement, y compris judiciaire, à l’encontre des membres de la société civile burundaise, et notamment des membres de l’OLUCOME et de l’APRODH ;

v. Se conformer aux dispositions de la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’Homme, adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies le 9 décembre 1998, et plus particulièrement à son article 1 qui prévoit que « chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres, de promouvoir la protection et la réalisation des droits de l’Homme et des libertés fondamentales aux niveaux national et international », son article 6(b), selon lequel « chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres, conformément aux instruments internationaux relatifs aux droits de l’Homme et autres instruments internationaux applicables, de publier, communiquer à autrui ou diffuser librement des idées, informations et connaissances sur tous les droits de l’Homme et toutes les libertés fondamentales », et son article 12.2 qui dispose que « l’Etat prend toutes les mesures nécessaires pour assurer que les autorités compétentes protègent toute personne, individuellement ou en association avec d’autres, de toute violence, menace, représailles, discrimination de facto ou de jure, pression ou autre action arbitraire dans le cadre de l’exercice légitime des droits visés dans la présente Déclaration » ;

vi. Plus généralement, se conformer aux dispositions de la Déclaration universelle des droits de l’Homme et instruments régionaux et internationaux relatifs aux droits de l’Homme ratifiés par le Burundi.

Adresses :

· S.E. Pierre Nkurunziza, Président de la République, Présidence de la République, Boulevard de l’Uprona, Rohero I, BP 1870, Bujumbura, Burundi. Fax : +257 22 22 74 90

· M. Yves Sahinguvu, Premier Vice-président, BP 1870, Bujumbura, Burundi. Fax : +257 22226424

· Lt Général Germain Niyoyankana, Ministre de la Défense nationale et des anciens combattants, Fax : +257 22253215 / 22253218, Email : mdnac@yahoo.fr

· Christine Ndayishimiye, Ministre des droits de la personne humaine et du genre BP : 6518 Bujumbura, Burundi. Fax : + 257 22 25 82 50

· M. Mupira Pierre, Ministre de l’Intérieur et du développement communal, BP : 1910 Bujumbura, Burundi. Fax : + 257 22 24 53 51, Email : mininter@yahoo.fr

· M. Alain Guillaume Bunyoni, Ministre de la Sécurité publique, BP : 7413 Bujumbura, Burundi. Fax : + 257 22 25 82 62

· M. Pierre Barusasiyeko, Ambassadeur, Mission permanente de la République du Burundi auprès des Nations unies, rue de Lausanne 44, 1201 Genève, Suisse. Fax : +41 22 732 77 34. Email : mission.burundi@bluewin.ch

· M. Laurent Kavakure, Ambassade du Burundi à Bruxelles, Square Marie-Louise 46, 1000 Bruxelles, Belgique. Fax : +32 2 230 78 83, Email : ambassade.burundi@skynet.be

Prière d’écrire également aux représentations diplomatiques du Burundi dans vos pays respectifs.

 [1]

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