Vers la construction d’une démocratie au Burkina Faso ?

04/12/2015
Communiqué
AFP

(Ouagadougou, Paris) Le 1er décembre 2015, la Commission électorale nationale indépendante (Céni) a déclaré M. Roch Marc Christian Kaboré vainqueur de l’élection présidentielle dès le premier tour du scrutin qui s’est tenu le 29 novembre. Cette élection met fin aux 27 années de règne de l’ex-président Blaise Compaoré et à un an de transition politique menacée par une tentative de putsch militaire. Le même jour, les Burkinabè étaient aussi appelés à élire 127 députés. La FIDH, le MBDHP et les organisations membres de la coalition #MonVoteDoitCompter saluent le déroulement pacifique des scrutins ainsi que leur caractère consensuel, libre et pluraliste et appellent les nouvelles autorités élues à s’engager en faveur du respect des droits humains dans le pays, notamment en luttant contre l’impunité des auteurs présumés des crimes commis lors de l’insurrection populaire d’octobre 2014 et de la tentative de putsch du 17 septembre dernier.

« C’est un moment historique pour le Burkina Faso où, depuis l’indépendance de 1960, les chefs d’État sont presque toujours arrivés au pouvoir par des coups d’État militaires. Nous saluons le courage du peuple burkinabè qui a su faire valoir son droit légitime à choisir librement ses représentants et démontrer que le respect des valeurs démocratiques est plébiscité par les peuples africains quand ils peuvent s’exprimer librement. »

Nos organisations

Au lendemain de la tenue des élections présidentielle et législatives, la Céni a rendu publique les résultats provisoires du scrutin présidentiel annonçant que M. Roch Marc Christian Kaboré, candidat du Mouvement du peuple pour le progrès (MPP), a recueilli la majorité des voix des électeurs pour être le nouveau président du Faso. M. Kaboré a été élu à 53,49 % des votes exprimés, contre 29,65 % pour M. Zéphirin Diabré, principal adversaire de M. Kaboré et candidat de l’Union pour le progrès et le changement (UPC). Ce dernier a reconnu sa défaite quelques minutes avant l’annonce officielle de la Céni et s’est immédiatement rendu au siège du MPP pour féliciter le nouveau président. Un an après avoir quitté l’ancien parti présidentiel pour s’opposer au projet de cinquième mandat de Blaise Compaoré, M. Roch Marc Christian Kaboré, plusieurs fois ministre sous l’ancien régime et président de l’Assemblée nationale entre 2002 et 2012, remporte donc l’élection présidentielle à la majorité absolue, alors que la Céni a annoncé un taux de participation de 60 %.

Le mercredi 2 décembre 2015, la Céni a également publié les premiers résultats provisoires des élections législatives. Le MPP du président nouvellement élu est annoncé en tête avec 55 sièges sur les 127 que compte le pays. L’UPC pour sa part totalise 33 sièges et le Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP), ancien parti présidentiel de Blaise Compaoré, 18 sièges. D’après les informations recueillies par nos organisations, qui ont pu observer le processus électoral sur l’ensemble du territoire, le scrutin s’est déroulé dans un climat apaisé et sans incidents majeurs.

« Nous appelons les nouvelles autorités élues à poser des actes concrets en faveur du respect des droits humains dans le pays, notamment en abolissant la peine de mort et en soutenant la justice pour garantir une paix durable. Nous les exhortons notamment à faire la lumière sur les crimes commis lors de la contestation populaire des 30 et 31 octobre et du 2 novembre 2014, et de la tentative de coup d’État du 17 septembre et à poursuivre les présumés responsables devant des juridictions compétentes, indépendantes et impartiales. »

Nos organisations

Nos organisations appellent en effet les autorités du Burkina à prendre dans les plus brefs délais des mesures en faveur du respect des droits humains, notamment en ce qui concerne l’administration de la justice dans le pays, et les exhortent à intégrer en droit interne les dispositions des instruments régionaux et internationaux de protection des droits de l’homme auxquels l’État est partie. Les nouvelles autorités élues devraient également s’engager en faveur de l’amélioration des conditions de détention et de l’abolition de la peine de mort. Nos organisations les appellent aussi à ratifier le Protocole facultatif au Pacte international relatif aux droits économiques et sociaux.

Contexte


Initialement prévues le 11 octobre, les élections avaient été reportées en raison du coup d’État militaire opéré par le Général Gilbert Diendéré, à la tête d’éléments du Régiment de sécurité présidentielle (RSP) le 17 septembre dernier. Cette tentative de putsch avait finalement été mise en échec par la mobilisation populaire, soutenue par l’armée loyaliste.

Outre MM. Kaboré et Diabré, douze autres candidats étaient en lice pour remplacer à la tête de l’État Blaise Compaoré, dont le parti, le CDP, n’a pas pu présenter de candidat à la présidentielle. L’Assemblée intérimaire du Burkina Faso a en effet adopté le 7 avril 2015 un nouveau code électoral interdisant à tous ceux qui ont soutenu le projet de Blaise Compaoré de réviser la constitution pour pouvoir briguer un nouveau mandat en octobre dernier de participer à l’élection présidentielle.

« Mon vote doit compter »


Entre 2014 et 2016, 52 élections dont 25 élections présidentielles doivent se tenir dans 27 pays africains. Pour éviter les manipulations, fraudes et violences dues aux élections tronquées, la société civile africaine et internationale a décidé de se mobiliser au sein de la coalition « Mon vote doit compter ». Les sociétés civiles exigent des gouvernants qu’ils respectent leur droit légitime à choisir librement leurs représentants à l’occasion d’élections régulières, libres, et transparentes, par une mobilisation publique, des actions de terrains et un plaidoyer politique en amont de chaque scrutin jusqu’en 2016.

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