Burkina Faso : la société civile réclame un pouvoir civil et condamne le coup d’État militaire

03/11/2014
Communiqué
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La FIDH et le MBDHP condamnent la prise du pouvoir par l’armée burkinabée et appellent au respect des règles constitutionnelles pour une transition politique civile au Burkina Faso, après la démission du président Blaise Compaoré et son départ pour l’étranger à la suite d’une mobilisation populaire exceptionnelle. Nos organisations appellent le président auto-proclamé et chef en second du Régiment de sécurité présidentielle, le lieutenant-colonel Isaac Zida, à la retenue et à remettre le pouvoir à un gouvernement civil, dans l’esprit de la Constitution, dans les plus brefs délais.

D’après les informations recueillies par la FIDH et le MBDHP, la répression par l’armée des manifestations populaires a fait au moins une dizaine de morts et plusieurs centaines de blessés depuis le 28 octobre. « L’armée a pris le pouvoir, mis en place un couvre-feu et occupe les principaux axes et points stratégiques de Ouagadougou, dont notamment la radio-télévision nationale. En moins de trois jours, plusieurs personnes ont revendiqué la magistrature suprême et la confusion règne. Il est plus qu’urgent qu’un pouvoir civil, constitutionnel et consensuel soit clairement identifié et mis en place en vue de l’organisation rapide d’élections.  », ont déclaré nos organisations.

Le 2 novembre, des discussions entre le lieutenant-colonel Isaac Zida et les principaux leaders de l’opposition n’avaient pas permis de trouver une issue politique à la crise, malgré les appels de la Mission conjointe de l’Union africaine (UA), de la CEDEAO et des Nations unies ainsi que d’autres acteurs de la communauté internationale.

Après 27 ans d’exercice du pouvoir sans partage, une mobilisation populaire exceptionnelle a poussé le président Blaise Compaoré à démissionner et quitter le pays. La Constitution prévoit que le président de l’Assemblée nationale assure l’intérim du pouvoir en cas de vacance, mais cette dernière a été dissoute par l’ancien président avant de démissionner, conformément à l’article 46 de la Constitution. Le 31 octobre, le chef d’État major de l’armée, le général Honoré Traoré a lui aussi, dans un premier temps déclaré dissoudre l’Assemblée nationale et le gouvernement avant de se proclamer président. Le lieutenant-colonel Isaac Zida, s’était lui aussi présenté comme le nouveau président en exercice avant de recevoir le soutien de l’armée le 1er novembre, faisant de lui le nouvel homme fort du Burkina Faso [1].

Le 21 octobre dernier, le gouvernement avait annoncé, à l’issue d’un Conseil des Ministres, un projet de loi portant révision de l’article 37 de la Constitution burkinabè visant à supprimer la limitation des mandats présidentiels et ainsi permettre à Blaise Compaoré, au pouvoir depuis 1987, de briguer un cinquième mandat en 2015. Le jeudi 30 octobre, le projet de loi devait être examiné par l’Assemblée nationale, en contradiction des obligations internationales du Burkina Faso notamment de la Charte africaine de la démocratie, des élections et de la gouvernance, ratifiée par le Burkina en 2010, qui prévoit, en son article 23, des sanctions en cas « [d’]amendement ou [de] révision des Constitutions ou des instruments juridiques qui porte atteinte aux principes de l’alternance démocratique ».

L’annonce du gouvernement a été suivie par de vives protestations, notamment dans les rangs des partis politiques de l’opposition et de la société civile. Mardi 28 octobre, une manifestation rassemblant des centaines de milliers de participants opposés au projet s’est tenue dans la capitale, et s’est soldée par de nombreux affrontements entre forces de l’ordre et manifestants.

« Mon vote doit compter »
Entre 2014 et 2016, 52 élections dont 25 élections présidentielles doivent se tenir dans 27 pays africains. Pour éviter les manipulations, fraudes et violences dues aux élections tronquées, la société civile africaine et internationale a décidé de se mobiliser au sein de la coalition « Mon vote doit compter ». Les sociétés civiles exigent des gouvernants qu’ils respectent leur droit légitime à choisir librement leurs représentants à l’occasion d’élections régulières, libres, et transparentes, par une mobilisation publique, des actions de terrains et un plaidoyer politique en amont de chaque scrutin jusqu’en 2016.

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