Intervention orale de la Ligue des Droits de l’Homme de Guinée-Bissau (LGDH) sur la situation des Défenseurs des Droits de l’Homme en Guinée-Bissau

"A l’heure actuelle, la Ligue des Droits de l’Homme de Guinée-Bissau (LGDH) est la seule ONG, créée en Guinée-Bissau, qui défend et porte les Droits de l’Homme dans ce pays."

Chers participants

A l’heure actuelle, la Ligue des Droits de l’Homme de Guinée-Bissau (LGDH) est la seule ONG, créée en Guinée-Bissau, qui défend et porte les Droits de l’Homme dans ce pays. Dans ce contexte, la LGDH compte 4500 membres du pays tout entier, engagés dans cette lutte.

Depuis sa création le 12 août 1991 jusqu’à aujourd’hui, les membres de la LGDH ont été victimes de nombreuses menaces et agressions.

Notre organisation a été créée dans un conteste extrêmement difficile, à l’époque où un parti unique était au pouvoir.

Une des stratégies adoptée par le pouvoir politique est précisément de faire taire tous les membres des organisations critiques du pouvoir. Concernant le cas concret de la Ligue, le pouvoir politique a eu recours aux menaces et à la manipulation de certains de ses dirigeants, les plus sceptiques et sans convictions, pour les diviser afin de détruire plus aisément notre organisation.

Le propre fondateur de la Ligue, Fernando Gomes, a été plusieurs fois emprisonné et même, en 2002, frappé en pleine rue et devant sa famille quand il a été chassé de sa maison par les militaires.

En 2000, la LGDH a rendu public, en portant plainte, les intimidations, les menaces de passage à tabac dont étaient la cible ses membres jusqu’à la mort de certains militaires lors de la tentative de coup d’Etat du 23 novembre 2000. Tentative qui avait été dirigé notamment par le Brigadier Ansumane Mané, ex-Commandant suprême de la Junte militaire. En représailles de l’action de la LGDH, certains de ses dirigeants ont été la cible de militaires. Ce fut le cas par exemple de Mr Serifero Mutaro Baldé, Président de la LGDH dans la région de Bafatá ; Joao Vaz Mané, 2ème vice-Président de la LGDH et Vicente da Costa Bluté, membre du Conseil national de la Ligue. Ce dernier a vu son bureau être scellé, sa voiture de fonction être saisie, et ce sans aucune autorisation administrative.

Lors d’une émission du programme radio de la Ligue, le 3 janvier 2002, Joao Vaz Mané avait fait une rétrospective des principales violations des droits de l’homme en Guinée-Bissau en 2001 en soulignant que les actes du Président de la République avait été facteurs d’instabilité en la matière. Le Président accusa alors la Ligue de se laisser manipuler par des partis politiques de l’opposition et particulièrement par celui de Fernando Gomes, ex-Président de la Ligue. Suite à ces déclarations, Joao Vaz Mané se retrouvât le même journée dans les locaux de la police judiciaire et y subît un intense interrogatoire de sept heures.

Par la suite, les 17 et 18 janvier 2002, Fernando Gomes et Joao Vaz Mané furent convoqués par le Procureur de la République pour évoquer les donations des NOVIB reçues en 1999 par la Ligue, durant le conflit politico-militaire et qui servirent à payer les salaires des fonctionnaires de la LGDH.
Le 26 janvier 2002, Joao Vaz Mané se retrouvât en prison mais fut libéré le 1er février suite à une forte pression interne et internationale (FIDH et Amnesty notamment).
Le 2 février, ce fut au tour de Fernando Gomes d’être arrêté ; Il fut relâché le 8 grâce encore une fois aux différentes pressions exercées.

Comme dans tout processus, la LGDH a connu aussi des dirigeants qui étaient complices du pouvoir politique en place, ce qui a permis l’intromission de celui-ci au sein de la Ligue, avec pour objectif l’anéantissement de la Ligue. Ces dirigeants ont été exclus lors du IIème Congrès Extraordinaire réalisé à Bissau les 13 et 14 juin 2002, et la nouvelle direction a été élue à cette occasion.

En 2001, nous avons également organisé une marche qui a abouti à un rassemblement symbolique face à la 2ème Escadre de Police de Bissau. Celui-ci était destiné à demander la démission du ministre de l’Intérieur de l’époque, Mr Artur Sanha, pour sa probable participation à l’assassinat de sa supposée maîtresse Florinda Baptista Tavares qui était partie de chez lui avec un cassette video sur la mort de Ansumane Mané. Les autorités ont réprimé violemment la manifestation usant de gaz lacrymogènes. Certains membres de la Ligue ont du, par la suite, être hospitalisés.

En 2002, deux de nos dirigeants du Bureau comptable, Mario Sá Gomes et Formozinho da Costa, ont été emprisonnés, jugés de façon sommaire et condamnés à un an et demi et deux ans de prison, peines convertis en simples amendes finalement. Leur faute ? Avoir exigé de l’ex-Président qu’il leur remette les clefs du siège national de la Ligue, celui-ci étant lié au pouvoir.

En 2003, fin janvier, Joao Vaz Mané a été emprisonné durant trois semaines sans possibilité de visite, pour avoir participer à un débat radiophonique appelé « Djemberem de Paz » (radio Bonbolom FM). Lors de cette émission, il avait critiqué le non-paiement des salaires des agents de l’Etat alors que le Président de la République se donnait le luxe de payer des bourses pour financer l’aller-retour du pèlerinage à la Mecque des musulmans, ceci constituant une violation des Droits de l’Homme.

Serifo Mutaro Baldé est actuellement menacé de mort par la police, dans la région de Bafatá à l’Est du pays, pour avoir dénoncer le comportement de la police locale

au détriment d’un citoyen étranger, celui-ci s’étant fait voler de l’argent en grande quantité par celle-ci.
C’est le cas le plus récent de violation de l’intégrité physique des Défenseurs des Droits de l’Homme en Guinée-Bissau.

Pour conclure notre modeste contribution, nous croyons pertinent de créer un mécanisme légal dont la finalité serait de protéger et de défendre les Défenseurs des Droits de l’Homme dans nos pays, évitant ainsi d’être à la merci du pouvoir politique.

Merci beaucoup.

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