Point 4 : Droits économiques, sociaux et culturels

57ème session de la Sous Commission de protection de promotion des droits de l’Homme

Point 4 de l’ordre du jour : Droits économiques sociaux et culturels

INTERVENTION ORALE

Monsieur le Président

La FIDH encourage la Sous-Commission à poursuivre son travail de réflexion et de sensibilisation sur la question de l’impact de la mondialisation sur la jouissance des droits économiques, sociaux et culturels.

 Normes des Nations unies sur les sociétés transnationales

A cet égard, la Sous-Commission doit continuer son travail de recherche et de sensibilisation sur les responsabilités des entreprises transnationales en matière de droits humains.

La FIDH se félicite de la création par la 61ème Commission des droits de l’Homme du mandat de Représentant Spécial du Secrétaire général des Nations unies chargé de la question des "droits de l’homme, sociétés transnationales et autres entreprises".
La FIDH encourage la Sous-Commission à l’assister dans son travail de clarification de notions telles que "complicité" et "sphère d’influence" présentes dans le projet de "Normes sur la responsabilité des sociétés transnationales et autres entreprises en matière de droits humains" adopté en 2003 par la Sous-Commision. Elle encourage également la Sous-commission à assister le Représentant Spécial dans la mise au point de méthodes d’études visant à déterminer l’impact sur les droits de l’homme de l’activité des sociétés transnationales, ainsi que dans l’établissement d’un recueil de "bonnes pratiques".

 Justiciabilité des droits économiques, sociaux et culturels

La FIDH considère que les droits économiques, sociaux et culturels sont indivisibles et interdépendants des droits civils et poliques . La FIDH considère que tous les droits sont justiciables et que les victimes de violations des droits de l’Homme doivent avoir accès à des recours effectifs. La FIDH se félicite des nombreux travaux entrepris par la sous-commission sur la question des droits économiques, sociaux et culturels

Elle souhaite faire part de quelques-uns de ses commentaires à propos du rapport préparé par Monsieur Marc Bossuyt, et en particulier sur la question des obligations, positives ou négatives, qui s’imposent aux Etats dans le respect des droits économiques, sociaux et culturels.
La FIDH considère que le droit à la santé, le droit au logement tout comme le droit à la justice ou à l’éducation réclament des actions positives et la mobilisation de moyens de la part des pouvoirs publics. D’autres éléments de ces droits imposent également une obligation négative. Ainsi le droit à la liberté syndicale ou l’interdiction d’explusions forcées, requièrent plutôt de l’Etat qu’il s’abstienne.
Par ailleurs, pour la FIDH, le respect effectif des droits économiques et sociaux ne peut être considéré comme dépendant simplement des ressources disponibles dans un Etat : ce respect implique des obligations de moyen tout autant que des obligations de résultats. Des obligations minimales ont d’ailleurs été définies par le Comité sur les droits économiques et sociaux pour chacun de ces droits. De plus, les jurisprudences nationales et régionales concernant les droits économiques et sociaux montrent qu’en pratique de nombreux de ces droits sont justiciables, notamment, mais pas uniquement, sous l’angle de la non-discrimination.

Dans ce contexte, l’adoption d’un protocole facultatif au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels permettrait d’une part de clarifier la responsabilité des Etats, et d’autre part de contribuer à une définition plus précise du contenu de ces droits et ainsi de leur justiciabilité. La reconnaissance du droit au recours individuel, et ce sur l’ensemble des droits contenus dans le pacte, est à cet égard primordiale.

Pour ces raisons, la FIDH demande à la sous-commission de maintenir son soutien et sa compétence à la disposition du groupe de travail chargé de travailler sur l’élaboration d’un protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.

 Commerce et droits de l’Homme

Monsieur le Président,

Alors que la prochaine conférence ministérielle de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) va se dérouler en décembre 2005 à Hong Kong, la FIDH souhaite encourager la Sous-Commission à sensibiliser les Etats sur leurs obligations de respect des droits de l’Homme dans le cadre des négociations commerciales.

Comme l’a rappelé la Sous-Commission dans ses résolutions et rapports successif , les Etats doivent prendre en compte les obligations et principes internationaux relatifs aux droits de l’Homme dans la formulation des politiques économiques internationales

Les Etats parties au Pacte relatif aux droits économiques, sociaux et culturels doivent mettre en oeuvre les droits garantis par le Pacte sur leur territoire national mais ils doivent également veiller, à travers la coopération internationale, à favoriser la réalisation de ces droits dans les pays tiers. A minima ils doivent veiller à ne pas créer d’obstacle à la réalisation des droits économiques, sociaux et culturels dans d’autres Etats.

La FIDH souhaite attirer l’attention de la sous-commission sur les négociations en cours à l’OMC, relatives à l’agriculture, aux services, à l’accès au marché non-agricole et au droits de propriété intellectuelle.

Le respect du droit à l’alimentation - en particulier dans les pays les plus pauvres- dépend étroitement des négociations en cours de l’accord sur l’agriculture. Les politiques commerciales mises en oeuvre par l’OMC ont créé un système agricole intensif favorisant les excédents et les productions orientées vers l’exportation et ont conduit à des pratiques d’exportation en dessous des prix de production, qualifiées de dumping, qui mettent en danger les moyens de subsistence de millions de personnes dépendantes de l’agriculture ainsi que leur accès à une alimentation adéquate.

Les négociations en cours à l’OMC disent prendre en compte la question de la sécurité alimentaire en introduisant des mécanismes de protection pour les agricultures des pays en développement. Cependant le cadre actuel et les flexibilités prévues semblent inadéquates pour permettre aux pays en développement de mettre en oeuvre leurs obligations en matière de droit à l’alimentation.

Les services occupent une place de plus en plus importante dans le commerce international. L’AGCS (Accord général sur le commerce des services) recouvre potentiellement tous les secteurs, y compris les services essentiels relatifs à l’éducation ou à la santé. La FIDH estime que la privatisation et la libéralisation de biens communs est porteuse de risques importants pour la réalisation des droits économiques et sociaux. La FIDH est particulièrement inquiète du paradigme demande-offre selon lequel fonctionne l’AGCS, qui rend les pays en développement vulnérables aux pressions exercées par les pays développés pour ouvrir certains secteurs contre des garanties d’accès aux marchés.

L’expérience montre que l’accord concernant les aspects des droits de la propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC) est un obstacle important pour le respect du droit à la santé, particulièrement en termes d’accès aux médicaments dans les pays les plus pauvres. Si la déclaration de Doha a introduit des flexibilités importantes permettant un meilleur accès aux médicaments, les pressions et les politiques de commerce international, ainsi que les accords de commerce bilatéraux, en limitant ces flexibilités, limitent la capacité des pays les plus pauvres à garantir que les ADPIC respectent les droits de l’Homme.

Par ailleurs, les règles régissant l’accès aux marché non-agricole (NAMA) consistent à réduire les droits de douane des produits industriels, mais également des produits issus de la pêche, ou de certaines matières premières selon une formule standardisée. Ces réductions qui visent à l’élimination des barrières douanières et qui comprennent peu de flexibilités à l’attention des pays en développement, privent ces derniers de la possibilité de se protéger des importations afin de mener des politiques d’industrialisation qui favorisent le développement. Les négociations NAMA vont donc surtout bénéficier aux pays industrialisés en favorisant leurs exportations.

La FIDH demande à la Sous Commission des droits de l’Homme d’envoyer un message clair aux Etats membres de l’OMC afin que les négociations en cours consacrent la primauté des droits de l’Homme sur les droits du commerce. La FIDH demande à la sous-commission des droits de l’Homme de plaider pour la réalisation d’analyse d’impact systématique des accords de commerce sur les droits humains.

Je vous remercie, Monsieur le Président

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