15 octobre 2025. À la suite d’un scrutin sans concurrence, l’Angola, l’Équateur, l’Égypte, l’Estonie, l’Inde, l’Irak, l’Italie, l’Île Maurice, le Pakistan, la Slovénie et le Royaume-Uni ont été élus comme nouveaux membres du Conseil des droits de l’homme des Nations unies, tandis que le Chili, l’Afrique du Sud et le Vietnam ont été réélus dans le cadre d’un second mandat consécutif. En janvier 2026, ces États rejoindront les autres membres actuellement en fonction au sein du Conseil de 47 sièges. L’organe principal de défense des droits humains des Nations unies a pour vocation de débattre des crises des droits humains, d’élaborer des normes par le biais de résolutions et de rapports et de créer des mandats spéciaux pour couvrir des situations et des sujets de préoccupation relatifs aux droits humains.
Alors que la résolution 60/251 de l’Assemblée générale des Nations unies portant création du Conseil des droits de l’homme prévoit que ses membres « observeront les normes les plus strictes en matière de promotion et de défense des droits de l’homme » et « coopéreront pleinement avec le Conseil », l’élection qui s’est tenue cette année a récompensé plusieurs États ayant un lourd passif en matière de répression, d’où la nécessité d’instaurer un suivi rigoureux des nouveaux membres sur la période allant de 2026 à 2028.
Si l’on considère la situation nationale des nouveaux membres en matière de droits humains, plusieurs d’entre eux se distinguent par le rétrécissement de l’espace civique et les attaques à l’encontre des défenseur·es des droits humains et des organisations de la société civile. L’Égypte, l’Inde et l’Équateur ont mis en œuvre une législation et des politiques régressives imposant aux organisations de la société civile des contraintes administratives et financières excessives. Ces mesures ont en réalité entravé l’engagement civique et limité l’activité des défenseur·es. L’utilisation abusive des lois relatives à la lutte contre le terrorisme et à la sécurité nationale contre les défenseur·es et activistes des droits humains, est une autre pratique préoccupante, bien établie en Inde et en Égypte, comme le montre la récente désignation par le Royaume-Uni du groupe de protestation Palestine Action. Si aucun État ne peut se prévaloir d’un bilan irréprochable en matière de droits humains, ceux qui ont été élus au CDH doivent s’efforcer véritablement et concrètement de répondre aux préoccupations de respect des droits humains et renforcer la protection des membres de la société civile dans leur pays. La promesse de respecter leurs engagements dès le début de leur mandat au sein du Conseil devrait constituer une étape concrète pour tous les membres, et la tenue de ces engagements, ainsi que le respect total des critères d’adhésion par les États, devraient faire l’objet d’une évaluation régulière pendant toute la durée de leur mandature.
Les membres du Conseil doivent être rappelés à leur engagement de coopérer avec le CDH et ses mécanismes associés, tels que les organes conventionnels et les procédures spéciales, et de permettre la participation de la société civile dans leur pays. Il existe plusieurs indicateurs simples qui peuvent servir à évaluer leur coopération – ou leur absence de coopération. L’Égypte figure par exemple depuis 2017 dans tous les rapports annuels du Secrétariat général qui répertorient les cas de représailles à l’encontre des acteur·ices de la société civile collaborant avec les Nations unies, et le Vietnam dans 9 rapports sur 11. Si l’on considère la coopération avec les titulaires de mandat au titre des procédures spéciales, la majorité des nouveaux membres – à l’exception de l’Angola, l’Égypte, l’Île Maurice, le Pakistan et le Vietnam – ont adressé des invitations permanentes à ces titulaires afin qu’ils puissent se rendre dans leurs pays. Toutefois, plusieurs États ont en réalité refusé de collaborer de manière constructive – l’Inde, par exemple, n’a pas accepté de visite depuis 2017 et le Pakistan, depuis 2012.
Ces résultats révèlent également des lacunes en matière de procédure dans le système électoral, notamment la tendance des groupes régionaux à se mettre d’accord sur la présentation de « liste unique » lors des élections – en proposant autant de candidat·es qu’il y a de sièges vacants. Cette année, pour la première fois depuis 2021, tous les groupes régionaux ont présenté une liste unique. Il en résulte une élection sans concurrence, ce qui compromet la crédibilité même du processus. Or, il est essentiel que les États participent à un processus véritablement compétitif, afin d’élever les critères de sélection des membres, comme on a pu le constater avec succès lors des élections de 2024, lorsque l’Arabie saoudite, arrivée dernière sur une liste concurrentielle du groupe des États d’Asie et du Pacifique, n’a pas obtenu de siège au Conseil.
Le fait de siéger au CDH ne doit pas être considéré comme un acte symbolique ou politique, mais comme une responsabilité fondamentale pour défendre les normes les plus strictes en matière de droits humains aussi bien à l’échelle nationale qu’internationale. La FIDH exhorte les Nations unies et ses États membres à faire en sorte que les élections soient réellement compétitives et donnent la priorité aux candidat·es ayant fait preuve de coopération et de respect des droits humains. Un contrôle et une transparence durables sont essentiels pour préserver la légitimité du Conseil. La FIDH et ses organisations membres continueront à suivre la situation des membres du CDH et à plaider en faveur du renforcement de l’établissement des responsabilités et de la protection des défenseur·es des droits humains collaborant avec le Conseil.