Convention Internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées

16/06/2006
Communiqué
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Intervention écrite conjointe de Amnesty International, la Commission internationale de juristes, la Fédération Internationale des ligues des Droits de l’Homme et Human Rights Watch

Amnesty International, la Commission internationale de juristes, la Fédération Internationale des Droits de l’Homme et Human Rights Watch lancent un appel à tous les Etats membres pour que, lors de sa première session en juin 2006, le Conseil des droits de l’homme adopte le projet de Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées et le transmette à l’Assemblée générale des Nations Unies pour son adoption finale. Ces organisations leur demandent également d’envisager la ratification de cet instrument dans les plus brefs délais.

Ce projet de Convention a été préparé par le Groupe de travail suite à la résolution 2001/46 de la Commission des droits de l’homme. A sa cinquième session tenue en septembre 2005, le groupe de travail a adopté un projet de texte par consensus. Ce projet est à présent devant le Conseil des droits de l’homme pour examen.

Nos quatre organisations remercient toutes les délégations qui ont contribué à ce succès et souhaitent également féliciter tout particulièrement le Président pour son travail inlassable, sa ténacité et son engagement en faveur des victimes.

Il s’agit d’un pas d’une extrême importance pour la lutte contre les disparitions forcées et la protection des victimes et de leurs familles. Dans son ensemble, le texte adopté répond aux attentes des ONG. Nous voudrions exprimer notre satisfaction à l’égard des points suivants :

Tout d’abord, il s’agit d’une convention autonome dotée d’un organe propre. Ce choix constitue pour nous une juste reconnaissance de l’extrême gravité de cette violation multiple des droits de l’homme et de ce crime international que constitue la disparition forcée. Il s’agit également d’une juste reconnaissance de la souffrance des victimes de disparition forcée et de la lutte inlassable menée par leurs familles et leurs proches pour les retrouver. Ce texte représente aussi, selon nous, une garantie d’efficacité pour l’avenir, y compris dans l’hypothèse d’une réforme du système des comités.

La convention constitue un grand pas dans une histoire déjà longue. Elle constitue en effet un développement considérable du droit international en la matière, tout en s’appuyant sur des normes solidement établies en droit coutumier. La Convention vient combler un vide juridique important : l’absence d’un traité pour faire face à cette violation multiple des droits de l’homme et ce crime international que constitue la disparition forcée. On ne peut que se féliciter, en particulier, qu’elle reconnaisse le droit de ne pas être soumis à une disparition forcée et qu’elle fasse obligation aux Etats d’interdire et d’incriminer cette pratique dans leurs droits internes. La Convention prévoit des dispositions relatives à la responsabilité pénale des subordonnés et des supérieurs, la répression nationale et internationale, l’extradition et la coopération internationale.

La convention reconnaît par ailleurs que ce crime peut, dans certaines circonstances, être qualifié de crime contre l’humanité et être par conséquent l’objet d’une action pénale internationale, voire d’une réaction de la communauté internationale dans son ensemble par l’intermédiaire des organes des Nations Unies.

Cette convention établit un ensemble d’obligations en matière de prévention de grande importance, tels que la prohibition de la détention secrète ; le placement uniquement dans des lieux de privation de liberté officiellement reconnus et contrôlés, dotés d’un registre détaillé sur les détenus ; et des recours indérogeables d’habeas corpus et pour d’obtenir des informations sur les détenus.

La Convention reconnaît le droit à la vérité et à réparation pour les victimes et leur famille, ainsi que le droit de former des organisations et des associations pour lutter contre les disparitions forcées. Elle adresse également la question de la soustraction d’enfants de parents victimes du crime de disparition forcée, la falsification de leur identité et leurs adoption.

En matière de mécanisme et de procédures internationaux de surveillance et protection, la Convention innove. Elle établit un Comité des Disparitions forcées qui - outre les fonctions de surveillance et de communications interétatiques et individuelles - dispose d’une procédure urgente à caractère humanitaire, d’un pouvoir d’enquête sur le terrain et d’une procédure de saisine de l’Assemblée générale des Nations unies pour les situations de pratique généralisée ou systématique de la disparition forcée. La compétence obligatoire du Comité en matière d’appel urgent nous paraît particulièrement fondamentale pour la prévention et la protection.

La convention constitue un outil inestimable pour la lutte contre l’impunité des auteurs de disparitions forcées. Elle constitue, pour nous ONG, une plateforme de travail inestimable.

Nos organisations souhaitent rendre hommage aux familles des disparus qui les ont inspirées par leur courage durant ces années et leur ont permis de garder l’espoir. Car si elles l’ont, cet espoir, il nous est interdit de ne pas l’avoir.

Amnesty International, la Commission internationale de juristes, la Fédération Internationale des Droits de l’Homme et Human Rights Watch considèrent qu’en adoptant le projet de Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, le Conseil des droits de l’homme apportera une contribution essentielle à la lutte contre les disparitions forcées et affirmera également son mandat et sa volonté de protéger et de promouvoir les droits de l’homme.

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