Thaïlande : le projet de constitution crée davantage de problèmes qu’il n’apporte de solutions, indique un nouveau rapport

04/08/2016
Rapport
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(Paris, Bangkok) Le projet de constitution de la Thaïlande et le référendum à venir sont les produits d’un processus répressif qui pourrait conduire à davantage d’instabilité politique, indiquent la FIDH et son organisation membre en Thaïlande, l’Union pour la liberté civile (UCL) dans un nouveau rapport publié ce jour.

Le 7 août 2016, les citoyens thaïs voteront par référendum pour décider si le projet de constitution soutenu par la junte militaire thaïlandaise, le Conseil National pour la Paix et l’Ordre (NCPO), deviendra la 20ème charte du pays depuis 1932.

Le rapport conjoint FIDH/UCL, intitulé « Obstacle à la démocratie - Répression militaire et projet de constitution en Thaïlande », documente l’environnement oppressif dans lequel le NCPO a orchestré le processus de rédaction de la constitution. Il en analyse également les dispositions les plus problématiques et régressives. Ainsi, le rapport conclut que si le projet est approuvé par le référendum, la constitution est susceptible d’alimenter davantage d’instabilité politique en donnant plus de pouvoirs aux institutions politiques et antidémocratiques, tout en affaiblissant considérablement le pouvoir des futurs gouvernements élus.

« La manipulation du processus de rédaction de la constitution par le NCPO se reflète dans un document qui légitime l’influence des élites militaires et non élues sur le système politique thaïlandais. Les actions brutales du NCPO pour passer sous silence les critiques de l’ébauche de la charte auront pour conséquence de décrédibiliser le vote si l’ébauche est approuvée »

Karim Lahidji, président de la FIDH

Dans les mois précédents le référendum, les autorités ont utilisé des décrets publiés par le NCPO et une législation répressive pour harceler, détenir et poursuivre les critiques au projet de constitution. Du 27 avril au 24 juillet 2016, les autorités ont arbitrairement détenu au moins 41 personnes ayant critiqué ou fait campagne contre le projet de constitution. Les autorités ont également détenu au moins 38 membres du groupe contestataire, le Front Uni pour la Démocratie contre la Dictature (UDD), pour avoir tenté d’établir des centres de surveillance du référendum.

De plus, la police et le personnel militaire ont régulièrement assisté aux débats publics sur le projet de constitution et les ont surveillés. Dans de nombreux cas, les autorités ont commandé aux organisateurs d’annuler des conférences et des débats d’expert sur le projet de la charte. Dans d’autres cas, les autorités ont directement intimidé des participants aux réunions.

Tandis que les autorités continuaient à étouffer le débat public sur le projet de constitution, le NCPO a mobilisé des ressources considérables pour promouvoir le projet de charte. En dépit des exigences d’impartialité et d’équité des principales institutions impliquées dans la préparation du référendum, leur campagne d’annonce du projet de constitution a manqué d’équilibre politique et a été troublée par une politique de « deux poids, deux mesures ». En conclusion, le refus du NCPO d’autoriser les observateurs indépendants à surveiller librement les acteurs du référendum accentue le doute sur l’équité du processus.

« Le référendum est forcément gagnant pour la junte militaire. Si le projet de constitution est accepté, le NCPO l’utilisera pour légitimer son influence sur la politique thaïe. S’il est rejeté, la junte aura une excuse pour continuer son contrôle absolu sur la société thaïe et pourra retarder encore le retour au pouvoir d’un gouvernement civil démocratiquement élu, »

Jaturong Boonyarattanasoontorn, président de l'UCL

Télécharger le rapport « Obstacle à la démocratie - Répression militaire et projet de constitution en Thaïlande » (en anglais)

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