GUATEMALA : les actions récentes du gouvernement de Jimmy Morales portent un coup aux institutions démocratiques

09/01/2019
Déclaration
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COMMUNIQUÉ COMMUN - OBSERVATOIRE / UDEFEGUA

Genève-Paris-Guatemala City, le 9 janvier 2019
Ces derniers jours, à plusieurs reprises, le gouvernement de Jimmy Morales a désobéi aux décisions de justice, freinant ainsi la lutte contre l’impunité et la corruption au Guatemala. L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme (OMCT-FIDH) et l’Unité de protection des défenseurs des droits humains au Guatemala (UDEFEGUA) dénoncent cette atteinte au respect de la démocratie.

Le 7 janvier 2019, le président de la République du Guatemala Jimmy Morales a annoncé sa décision – illégale et contraire aux principes du droit international – de rompre unilatéralement l’accord avec les Nations unies qui est à l’origine de la Commission internationale contre l’impunité au Guatemala (CICIG) et dont le mandat se termine en septembre 2019. Antonio Guterres, secrétaire général des Nations unies, a fermement condamné cette décision, alors que la Cour constitutionnelle guatémaltèque a annoncé le 9 janvier 2019 sa décision d’accorder un recours provisionnel pour la protection des droits et libertés (recours d’amparo), qui établit la suspension de cette décision et charge l’État guatémaltèque d’assurer le fonctionnement de la CICIG.

Cette décision du président Morales élargit le droit du coup d’État contre la démocratie et l’État de droit au Guatemala et constitue l’énième acte de désobéissance de son gouvernement face aux résolutions adoptées par la Cour constitutionnelle, la plus haute juridiction du pays. Parmi les événements les plus graves, il convient de souligner la détention illégale de M. Yilen Osorio, enquêteur de la CICIG, survenue entre le 5 et 6 janvier à l’aéroport de Guatemala City, par des agents de l’immigration et de la police nationale, sous les ordres de la ministre des Affaires étrangères, du Ministère de l’Intérieur et du Président de la République. Cette arrestation est un acte de désobéissance flagrante contre la Cour constitutionnelle qui avait donné un délai de 12 heures au gouvernement pour prolonger les visas et permettre l’entrée sur le territoire à 11 enquêteurs de la CICIG, dont M. Osorio.

De même, lors de la conférence de presse du 7 janvier dernier, le président Morales a menacé la société civile et a ordonné à ce que des « plaintes pertinentes soient adressées aux autorités nationales contre les individus et les autorités qui ont participé à des actes violant [nos] lois, comme la prévarication, l’abus d’autorité, les actes contraires à la Constitution, les ordres illégaux et la sédition. »

L’Observatoire et l’UDEFEGUA font part de leur préoccupation face aux déclarations qui conduisent à la criminalisation des défenseur.e.s des droits humains au Guatemala, dont les fonctionnaires de la CICIG et les organes garants des droits humains comme la Cour constitutionnelle et le Procureur des droits humains (PDH). Cela se produit dans un contexte de forte violence contre la défense des droits humains, comme en témoignent les 26 meurtres commis en 2018 ainsi que le climat d’intimidation et de harcèlement à l’encontre des dirigeants des principales organisations de défense des droits humains dans le pays. Plus particulièrement, depuis que le 31 août 2018, le président Morales a intensifié ses efforts pour freiner la lutte contre l’impunité et la corruption avec l’annonce du non-renouvellement du mandat de la CICIG.

Pour toutes ces raisons, l’Observatoire et l’UDEFEGUA appellent les autorités guatémaltèques à mettre un terme à tout acte d’intimidation à l’encontre de la société civile dans le pays, et en particulier contre les organisations de défense des droits humains, et à respecter l’ordre constitutionnel et à garantir les droits fondamentaux de tous les citoyens guatémaltèques.

Ces deux organisations demandent également au Conseil permanent de l’Organisation des États américains (OEA) de convoquer une réunion extraordinaire afin de condamner les mesures récemment prises par le gouvernement de Jimmy Morales et d’exiger que L’État du Guatemala mette fin à ses actions contre les institutions démocratiques et l’État de droit.
Enfin, l’Observatoire exhorte l’ensemble de la communauté internationale à prendre des mesures diplomatiques fermes et justes face à la gravité de la situation : annonces publiques, appels à consultations par les représentations diplomatiques du Guatemala dans leurs pays respectifs et l’examen d’éventuelles sanctions personnelles et commerciales jusqu’à la fin du coup d’État contre la démocratie.

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