Confirmation en appel de la condamnation de M. François-Xavier Byuma à 19 ans de prison - RWA 001 / 0607 / OBS 059.1 (FR)

22/08/2007
Appel urgent

L’Observatoire a été informé de sources fiables de la condamnation en appel de M. François-Xavier Byuma, ancien vice-président de la Ligue rwandaise pour la promotion et la défense des droits de l’Homme (LIPRODHOR), à 19 ans d’emprisonnement. M. Byuma est également coordinateur du Réseau des défenseurs des droits de l’Homme en Afrique centrale (REDHAC) et président de Turenger Abana, l’Association rwandaise pour la protection et la promotion de l’enfant, une ONG basée a Kigali qui lutte notamment contre les violences sexuelles et le travail forcé des enfants.

L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme, programme conjoint de la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) et de l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT), a reçu de nouvelles informations et vous prie d’intervenir de toute urgence sur la situation suivante au Rwanda.

Nouvelles informations :

Selon les informations reçues, le 18 août 2007, la juridiction gacaca1 d’appel de Biryogo a confirmé la condamnation de M. François-Xavier Byuma à 19 ans de prison pour "participation à un entraînement à la manipulation d’arme à feu" et "participation aux attaques alors qu’il était autorité administrative" lors de la guerre du Rwanda. Cette décision avait été prononcée par le tribunal gacaca de première instance le 27 mai 2007.

M. Byuma a annoncé son intention d’effectuer une demande de recours en révision auprès de la Secrétaire Exécutive du Service National des Juridictions Gacaca.

L’Observatoire exprime sa vive préoccupation au regard de cette décision en appel qui semble avoir été rendue en violation des règles garantissant un droit à un procès équitable. En effet, la décision n’est fondée sur aucun élément matériel, n’a pas été motivée, et est intervenue au terme d’un procès au cours duquel les nouveaux arguments avancés par les témoins à décharge n’ont pas été pris en considération.

Au regard de ces irrégularités et de celles ayant entaché les audiences en première instance, l’Observatoire craint que la condamnation de M. Byuma ait été prononcée dans le but de le sanctionner directement pour ses activités en faveur de la défense des droits de l’Homme.

Rappel des faits :

Le 3 mai 2007, M. François-Xavier Byuma avait reçu une convocation le notifiant à comparaître devant le tribunal gaçaça de pemière instance pour "complicité dans le génocide rwandais de 1994". Cette notification était intervenue alors que l’ONG Turenger Abana enquêtait sur des allégations de viol d’une jeune fille de 17 ans dont, selon Turenger Abana, le juge président du tribunal gacaca local de première instance aurait été responsable.

M. Byuma était poursuivi pour "entraînement à la manipulation d’armes à feu pendant le génocide" ; "port illégal d’armes" ; "constitution de barrières" érigées en vue d’empêcher les Tutsis de fuir le génocide et "participation aux attaques des Interahamwe" pendant le génocide.

Lors d’une audience, le 13 mai 2007, M. Byuma avait récusé le siège, puis le président du siège, arguant que ce dernier était mis en cause dans l’enquête effectuée par Turengere Abana sur des allégations de viol et que par conséquent, son droit à un procès juste et équitable n’était pas garanti. Cette requête ayant été rejetée, il avait été placé en détention et transféré le 14 mai 2007 à la prison centrale de Kigali.

Le 27 mai 2007, le tribunal gacaca de Biryogo, à Kigali, avait acquitté M. Byuma des chefs de "port illégal d’armes", de "constitution de barrières" et de "constitution de listes de Tutsis", mais l’avait en revanche reconnu coupable de "participation à un entraînement à la manipulation d’arme à feu" et "participation aux attaques alors qu’il était autorité administrative" et condamné à 19 ans de prison. Par ailleurs, le tribunal l’avait reconnu coupable de plusieurs chefs d’accusation non mentionnés lors de la première lecture de l’acte d’accusation, notamment l’agression et l’enlèvement d’une femme, qui avait fourni, lors de l’audience, un témoignage contradictoire et flou.

En outre, l’Observatoire avait été informé que plusieurs témoins à décharge avaient été l’objet d’actes d’intimidations, et que deux personnes jugées en première instance en même temps que M. Byuma et pour les mêmes faits, dont l’une avait reconnu sa culpabilité, avaient été acquittées.

En raison de ces faits, ainsi que du fait que la présidence du tribunal de première instance était occupée par une personne mise en cause dans les enquêtes pour viol de l’association Turenger Abana, l’Observatoire avait considéré, dans son appel urgent RWA / 0607 / 059, diffusé le 1er juin 2007, que le droit à un procès juste et équitable de M. Byuma n’avait pas été garanti et avait tenu à signaler que les juridictions gacaca de Biryogo étaient souvent mise en cause pour leurs irrégularités.

Actions demandées :

Merci d’écrire aux autorités rwandaises et de leur demander de :

i.Garantir en toutes circonstances l’intégrité physique et psychologique de M. François-Xavier Byuma ;

ii.Garantir en toutes circonstances son droit à la révision du jugement d’appel et clarifier de manière indépendante et impartiale son rôle dans les faits reprochés, de façon à ce qu’en l’absence de charges valables à son encontre il soit acquitté ;

iii.Mettre un terme immédiat à toute menace ou acte de harcèlement à son encontre, ainsi qu’à l’encontre de tous les défenseurs des droits de l’Homme au Rwanda ;

iv.Se conformer aux dispositions de la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’Homme, adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies le 9 décembre 1998, et plus particulièrement à son article 1 qui dispose que "chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres, de promouvoir la protection et la réalisation des droits de l’Homme et des libertés fondamentales aux niveaux national et international", ainsi que son article 12.2, qui dispose que "l’Etat prend toutes les mesures nécessaires pour assurer que les autorités compétentes protègent toute personne, individuellement ou en association avec d’autres, de toute violence, menace, représailles, discrimination de facto ou de jure, pression ou autre action arbitraire dans le cadre de l’exercice légitime des droits visés dans la présente Déclaration" ;

v.Plus généralement, se conformer aux dispositions de la Déclaration universelle des droits de l’Homme et instruments régionaux et internationaux relatifs aux droits de l’Homme ratifiés par le Rwanda.

Adresses :

Président Paul Kagame, Présidence de la République, BP 15, Kigali, Rwanda, central bureau : 250-58 29 61, Bureau du Président : 250-58 6275, Président : 250-58 62 00, 250-51 65 00
Mme Domitile Mukantaganzwa, Secrétaire exécutive du service national des juridictions gacaca, BP 1874 Kigali, Rwanda. Tel : + 250 58 66 48, Fax : +250 58 66 47, Email : gacaca@rwandatel1.rwanda.com
M. Karugarama Tharcisse, Ministre de la Justice, Ministère de la Justice, BP 160, Kigali, Rwanda, Tel : +250 58 70 51, 250-58 63 98, Fax : +250 586 509
M. Martin Ngoga, Procureur général de Kigali, Parquet Général de la République de Rwanda, BP 1328 Kigali, Rwanda, Fax : +250 589 501
Ministre de l’Intérieur, Musa Fazil Harerimana, Ministère de l’Interieur, BP 446, Kigali, Rwanda
Tél/Fax : +250 58 78 81, + 250-58 53 07, + 250- 58 20 71
S.E. Mme Venetia Sebudandi, Ambassadeur, Mission permanente de la République du Rwanda auprès de l’Office des Nations Unies à Genève, rue de la Servette 93, 1202 Genève, Tel. +41 22 919 10 00, Fax : +41 22 919 10 01, email : mission.rwanda@ties.itu.int
Ambassade du Rwanda à Bruxelle, 1 avenue des Fleurs, 1150 Woluwe-Saint-Pierre, Belgique, Tel : + 32 2 763.07.21, Fax : + 32 2 763.07.53

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Genève - Paris, le 22 août 2007

Merci de bien vouloir informer l’Observatoire de toutes actions entreprises en indiquant le code de cet appel.

L’Observatoire, programme de la FIDH et de l’OMCT, a vocation à protéger les défenseurs des droits de l’Homme victimes de violations et à leur apporter une aide aussi concrète que possible.

L’Observatoire a été lauréat 1998 du prix des Droits de l’Homme de la République Française.

Pour contacter l’Observatoire, appeler La Ligne d’Urgence : E-mail : Appeals@fidh-omct.org Tel et fax FIDH : 33 1 43 55 20 11 / 33 1 43 55 18 80 Tel et fax OMCT : + 41 22 809 49 39 / 41 22 809 49 29

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