Billet de blog 7 septembre 2015

Les invités de Mediapart (avatar)

Les invités de Mediapart

Dans cet espace, retrouvez les tribunes collectives sélectionnées par la rédaction du Club de Mediapart.

Abonné·e de Mediapart

Le peuple syrien ne fait qu'un

Karim Lahidji, président de la FIDH, Basma Kodmani, directrice de l'Arab Reform Initiative et les représentants d'autres ONG syriennes profitent de la conférence inter-gouvernementale sur la Syrie, ce mardi 8 septembre, qui traitera de la situation des minorités religieuses dans le pays, pour réagir.

Les invités de Mediapart (avatar)

Les invités de Mediapart

Dans cet espace, retrouvez les tribunes collectives sélectionnées par la rédaction du Club de Mediapart.

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Karim Lahidji, président de la FIDH, Basma Kodmani, directrice de l'Arab Reform Initiative et les représentants d'autres ONG syriennes profitent de la conférence inter-gouvernementale sur la Syrie, ce mardi 8 septembre, qui traitera de la situation des minorités religieuses dans le pays, pour réagir. Pour eux, lutter contre la cristallisation des clivages confessionnels et la violence sectaire « impose de ne pas y répondre par une politique sélective de soutien, qui serait en contradiction avec l'universalisme européen, étant donné le niveau de violence sans précédent qui frappe l'ensemble de la population. »


Les cadavres des enfants syriens qui fuient la guerre atteignent les côtes européennes interdites malgré tout, forçant l'Europe à prendre la mesure du drame humain qui se joue à ses portes et de la lourde responsabilité qu'elle a.

Alors que des processus d'accueil discriminatoires réservés aux seuls « chrétiens d'Orient » se mettent en place dans plusieurs pays européens, comme la Slovaquie,  la Pologne, ou la Belgique, les autorités françaises, qui organisent le 8 septembre une conférence internationale sur la protection des victimes de violences ethniques ou religieuses au Moyen-Orient, ont avec leurs partenaires une responsabilité cruciale à dénoncer ces politiques d'accueil sélectives et la manipulation des clivages religieux par les États.

La cristallisation des clivages confessionnels et la violence sectaire, dont les populations sunnites fournissent aujourd'hui le plus grand nombre de victimes, y compris de DAECH, sont en effet l'une des principales menaces qui planent sur la région. Lutter contre ce phénomène impose de ne pas y répondre par une politique sélective de soutien, qui serait en contradiction avec l'universalisme européen, étant donné le niveau de violence sans précédent qui frappe l'ensemble de la population. 

Outre qu'elle servirait le régime de Bachar Al Assad (qui ose encore se présenter  comme le protecteur des minorités face aux islamistes radicaux) en détournant l'attention des crimes commis par lui contre l'ensemble de la population, une telle approche serait aussi dangereuse pour ces communautés elles-mêmes. En aggravant des lignes de fracture entre les composantes de la société Syrienne, en les stigmatisant en fonction de leur appartenance religieuse et en  assimilant certaines à des intérêts étrangers, elle menacerait leur insertion dans leur milieu géographique et historique, le seul véritable gage de protection durable des ces « minorités ».

Le message envoyé à la « majorité religieuse » victime du conflit et de la folie meurtrière du régime déchaîné de Bachar Al Assad serait en outre catastrophique et reviendrait à la pousser dans les bras de DAECH: vous ne méritez pas notre protection, allez donc pactiser avec les jihadistes. En somme, en adoptant à rebours la  logique sectaire de L'Etat islamique, on risquerait de lui donner ce qu'il n'a pas réussi à acquérir : un ancrage dans le milieu syrien.

« Le peuple syrien ne fait qu'un » : tel est l'un des tout premiers slogans de la révolution syrienne, fondée sur la revendication d'un droit égal à la citoyenneté piétiné depuis des décennies par le régime Assad. Agir contre les crimes à caractère sectaire ou confessionnel perpétrés par le régime syrien, DAECH et les milices chiites qui sévissent en Syrie et en Irak implique d'appréhender la responsabilité des Etats qui les promeuvent, au premier rang desquels l'Iran et l'Arabie Saoudite. Et de défendre la citoyenneté, à rebours des vieilles recettes coloniales fondées sur l'instrumentalisation des particularismes locaux et des minorités religieuses.

S'il y a une distinction à faire, elle est entre les auteurs de crimes internationaux, au premier rang desquels le régime de Bachar Al Assad, mais aussi Daech, et les populations civiles qui en sont les victimes.

Dans ces conditions, l'urgence politique consiste à ouvrir les frontières européennes aux réfugiés, à leur garantir un accueil inconditionnel et digne, sans discrimination d'ethnie ou de religion. A soutenir les syriennes et les syriens qui chaque jour promeuvent avec un extraordinaire courage le pluralisme et la tolérance Et à obtenir de la Russie et de la Chine qu'elles laissent le Conseil de Sécurité de l'ONU saisir la Cour pénale internationale et lui déférer les résultats des commissions d'enquêtes onusiennes.

Les signataires :

Karim Lahidji, président de la FIDH;  Basma Kodmani, directrice de l'Arab Reform Initiative;  Fadi Dayoub, coordinateur International LDSPS (Local development and small-projects support);  Bassam Al Ahmad, porte-parole de VDC (Violation Documentation Center);  Salam Kawakibi, président d'Initiative for a New Syria

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.