Lettre ouverte aux membres du conseil de sécurité des nations unies sur la Syrie

14/03/2012
Communiqué
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Publiée le 13 mars 2012 dans le Figaro

TOUS UNIS POUR LA SYRIE : ARRÊTONS UN AN DE MASSACRE

Un an après le début du soulèvement populaire en Syrie, nous sommes attristés de constater que des divisions au sein du Conseil de Sécurité empêchent l’élaboration d’une réponse internationale unifiée et proactive à la crise. L’ultime responsabilité des violences revient à ceux qui ont, en Syrie, commandité, permis ou directement commis ces crimes horribles. Cependant, les divisions au sein de la Communauté Internationale ont donné au gouvernement d’Assad un permis de tuer. Ce permis doit maintenant lui être retiré.

Le recours continu à la force meurtrière par le gouvernement d’Assad à l’encontre de son propre peuple compte parmi les pires cas de violences délibérées contre une population civile que nous connaissions dans l’histoire récente. Rien ne peut justifier de tels agissements. A la vue des bombardements massifs dans les zones civiles et de l’accroissement du nombre de victimes parmi les femmes et les enfants, nous rappelons les conclusions du Haut Commissaire aux Droits de l’Homme des Nations Unies : des crimes contre l’humanité auraient été commis et les responsables de ces crimes devront répondre de leurs actes.

Nous craignons que l’impasse actuelle paralysant la stratégie internationale n’entraîne une augmentation des initiatives, telles que l’armement du régime et de l’opposition, qui risqueraient de prolonger le conflit et les souffrances.

Pour débloquer la situation, nous devons voir la Russie travailler à nouveau avec les autres partenaires internationaux. Nous appelons le gouvernement russe à se joindre aux efforts collectifs pour mettre un terme rapidement au conflit et restaurer la paix et la stabilité en Syrie et dans la région. Nous saluons sincèrement la nomination de Mr Annan comme émissaire conjoint des Nations unies et de la Ligue arabe en Syrie. La Communauté internationale doit maintenant le soutenir unanimement, avec force pour qu’il puisse développer une étroite relation de travail avec tous les gouvernements, incluant la Russie et la Chine, ainsi que les acteurs non étatiques, afin de dépasser les dissensions paralysantes. Bien que nous comprenions qu’il n’y a pas de sortie facile à cette crise, l’obligation morale de trouver un terrain d’entente pèse sur les membres du Conseil de Sécurité. Ne faisons pas d’erreur. La crédibilité et la position internationale de tout Etat qui resterait inactif face à cette tragédie évitable seraient sévèrement endommagées.

Nous exhortons les membres du Conseil de Sécurité des Nations Unie à s’unifier et à adopter par consensus une résolution qui doit inclure :

1. Un appel adressé aux autorités syriennes pour qu’elles cessent toutes attaques contre la population, retirent les forces armées et de sécurité des villes et zones habitées, garantissent que les manifestations pacifiques ne soient pas ciblées et relâchent tous les prisonniers politiques et détenus emprisonnés depuis le début de la révolte. Tous les acteurs armés doivent également stopper l’utilisation de la violence.

2. Des pressions sur le gouvernement syrien pour qu’il facilite la mise en œuvre d’une aide humanitaire d’urgence indépendante et impartiale, proportionnée aux besoins, qu’il permettre l’évacuation des blessés se trouvant dans les zones de violences et qu’il soutienne un accès effectif pour les organisations humanitaires. Une attention toute particulière doit être portée à l’obtention pour ceux qui en ont besoin d’un accès sûr aux hôpitaux civils et à la livraison de matériel médical adéquate, conformément au droit international.

A l’occasion de l’anniversaire du soulèvement syrien, nous rendons hommage à la mémoire des milliers de civils qui ont perdu la vie au cours de leur quête pacifique pour un avenir plus juste et prometteur. Aujourd’hui nous incombe la responsabilité d’agir sans délai pour éviter la mort prochaine de milliers d’autres hommes, femmes et enfants.

Veuillez agréer l’expression de nos salutations distinguées,

Andreas van Agt, Ancien Premier Ministre des Pays-Bas
Lyudmila Alexeyeva, Chef du Groupe d’Helsinki de Moscou, Russie
Kwame Anthony Appiah, Ecrivain, Ghana
Sadik Jalal Al-Azm, Philosophe, Syrie
Hon Lord Paddy Ashdown, Ancien Haut Représentant des Nations-Unies pour la Bosnie-Herzégovine, Royaume-Uni
Lloyd Axworthy, Ancien Ministre Affaires étrangères du Canada
Bertrand Badie, Professeur Sciences-Po Paris, France
Robert Badinter, Ancien Ministre de la Justice, France
Souhayr Belhassen, Présidente de la FIDH (Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme), Tunisie
Pascal Boniface, Directeur de l’IRIS (Institut des Relations Internationales et Stratégiques), France
Rony Brauman, Ancien Président de Médecins Sans Frontières, France
Sir Tony Brenton, Ancien Ambassadeur britannique en Russie (2004-8)
Hans van den Broek, Ancien Ministre Affaires étrangères des Pays-Bas ; Commissaire Européen aux Relations Extérieures
Gro Brundtland, Ancien Premier Ministre, Norvège
Fernando Henrique Cardoso, Ancien Président de la République Fédérative du Brésil
Lt-Gén l’Honorable Roméo Dallaire, Ancien Commandant de la MINUAR, La Mission des Nations unies pour l’assistance au Rwanda, Canada
Basil Eastwood, Ancien Ambassadeur britannique en Syrie (1996-2000)
Shirin Ebadi, Prix Nobel de la Paix (2003), Iran
Umberto Eco, Ecrivain, Italie
Jan Egeland, Ancien secrétaire général Adjoint des Nations-Unies aux Affaires Humanitaires, Norvège
Ali Fakhro, Président de l’Arab Democracy Foundation, Bahreïn
Leymah Gbowee, Prix Nobel de la Paix (2011), Liberia
Justice Richard Goldstone, Ancien Procureur du Tribunal Pénal International pour l’ex-Yougoslavie et le Rwanda, Canada
David Grossman, Ecrivain, Israël
Jean-Claude Guillebaud, Fondateur de Reporters Sans Frontières, France
Jürgen Habermas, Philosophe, Allemagne
Stéphane Frédéric Hessel, ancien Ambassadeur auprès des Nations-Unies, France
Bianca Jagger, Ambassadrice de bonne volonté du Conseil de l’Europe, Nicaragua
Kamal Jendoubi, Président Réseau Euro-méditerranéen des Droits de l’Homme, Tunisie
Baroness Glenys Kinnock, Ancien Ministre britannique pour l’Afrique et les Nations-Unies
F W de Klerk, Ancien Président d’Afrique du Sud
Zaki Laïdi, Professeur, Sciences-Po Paris, France
Mairead Maguire, Prix Nobel de la Paix (1976), Irlande
Hon Sir John Major, Ancien Premier Ministre, Royaume-Uni
Clovis Maksoud, Ancien Ambassadeur de la Ligue Arabe, Liban
Rigoberta Menchú Tum, Prix Nobel de la Paix (1992), Guatemala
Pierre Micheletti, Ancien Président Médecins du Monde, France
David Miliband, Ancien Secrétaire d’ Etat britannique aux Affaires Etrangères
Marwan Muasher, Ancien Premier Ministre adjoint et Ministre des Affaires étrangères de Jordanie
C.S.R. Murthy, Professeur, School of International Studies, Jawaharlal Nehru University, Inde
Adolf Muschg, Ecrivain et professeur de littérature, Suisse
Ana de Palacio, Ancien Ministre espagnol des Affaires étrangères
Rt Reverend Stephen Platten, Evêque de Wakefield, Royaume-Uni
Hans-Gert Pöttering, Ancien Président du Parlement Européen, Allemagne
Reubens Ricupero, Ancien Secrétaire Général du CNUCED ; Ancien Ministre des Finances du Brésil
Mary Robinson, Ancienne Présidente d’Irlande, Haut-commissaire des Nations Unies aux Droits de l’Homme
Gesine Schwan, Présidente de HUMBOLDT-VIADRINA School of Governance, Allemagne
Peter Singer, Philosophe, Australie
K.C. Singh, Ancien Secrétaire Indien aux Affaires étrangères
Aleksander Smolar, Président de la Fondation Stefan Batory, Pologne
Pär Stenbäck, Ancien Ministre des Affaires étrangères de Finlande
Desmond Tutu, Archevêque anglican émérite du Cap, Afrique du Sud, Prix Nobel de la Paix
Richard von Weizsäcker, Ancien Président de la République Fédérale d’Allemagne
Jody Williams, Prix Nobel de la Paix (1997), Etats-Unis
Mokhtar Yahyaoui, Président du Centre Tunisien pour l’Indépendance de la Justice, Tunisie

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