Egypte : 10 Mesures urgentes pour mettre fin à la violence contre les femmes dans l’espace public.

07/10/2014
Communiqué
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Les femmes égyptiennes sont harcelées et agressées quotidiennement dans les rues, les transports publics et sur les lieux de travail. Les agressions contre les manifestantes de la Place Tahrir représentent la manifestation la plus visibles d’un problème systémique et persistent. Ces crimes restent presque toujours impunis. Les gouvernements égyptiens ne se sont pas préoccupés de la violence contre les femmes, ce qui a eu de graves conséquences sur la participation des femmes au processus de transition politique de leur pays.

Le climat actuel d’impunité engendre de nouveau crimes. Les crimes perpétrés à l’encontre des femmes, qu’ils soient commis par des fonctionnaires ou par des personnes privées, doivent faire l’objet d’enquêtes approfondies et impartiales afin de traduire les coupables en justice. En particulier, des agressions sexuelles contre des prisonnières qui auraient été récemment commises dans des centres de détention officiels ou non officiels doivent faire l’objet d’une enquête.

Les autorités doivent avoir la volonté politique de lutter contre la violence sexuelle ainsi que contre toute autre forme de violence contre les femmes. Il est nécessaire d’adopter une politique systémique pour endiguer l’épidémie de violence sexuelle en Egypte et sécuriser l’espace public pour les femmes afin qu’elles puissent exercer leur droit à participer à la vie publique, en faisant en sorte que leur intégrité physique soit respectée. Il est nécessaire de réformer en profondeur les législations et procédures pénales et de s’attaquer aux sources de discrimination à l’encontre des femmes.

Les organisations signataires exhortent les autorités égyptiennes à adopter rapidement les mesures suivantes afin de prévenir la violence contre les femmes, de sanctionner les coupables et de protéger les victimes survivantes :

1. Faire connaître les stratégies nationales adoptées par le gouvernement afin de combattre la violence contre les femmes, éliminer toute forme de discrimination contre elles et garantir la participation et la consultation active des organisations de défense des droits des femmes lors de ce processus.

2. Enquêter de manière indépendante et efficace sur tous les crimes de violence sexuelle qui ont été commis depuis février 2011, afin de demander des comptes aux responsables et mettre fin à leur sentiment d’impunité et pour que les victimes aient le droit à une réparation conforme aux normes internationales.

3. Réformer la législation afin que toute forme de violence contre les femmes soit considérée comme un crime, y compris la violence familiale, le viol conjugal et le harcèlement sexuel, conformément aux normes internationales. Il est notamment nécessaire d’amender les articles 267, 268 et 269 du Code Pénal Égyptien, pour qu’y soient inclus le viol, y compris le viol anal, oral ou concernant d’autres parties du corps, ainsi qu’une définition de l’agression sexuelle et du harcèlement sexuel.

4. Garantir que les agents du système judiciaire à tous les niveaux (police, travailleurs sociaux, procureurs, juges, médecins légistes) puissent être formés pour être efficaces dans la prévention des crimes de violence sexuelle, pour savoir mener les enquêtes et engager des poursuites. Ils doivent s’abstenir désormais de considérer que les victimes survivantes sont responsables des violences qu’elles subissent.

5. Prendre des mesures pour garantir que les victimes survivantes puissent immédiatement obtenir des réparations et une protection, par exemple en leur fournissant des ordonnances de protection, des refuges, une aide juridique et des traitements médicaux et psychologiques.

6. Garantir une formation aux médecins et aux infirmières pour leur apprendre comment traiter les victimes survivantes avec sensibilité en leur évitant un traumatisme supplémentaire et comment conserver les preuves de l’agression sexuelle et du viol. Les hôpitaux publics et privés doivent disposer de matériel de prise en charge des victimes.

7. Condamner la violence contre les femmes, y compris toute forme de sévices sexuels, et exhorter les responsables politiques et religieux à faire de même.

8. Lancer des campagnes de sensibilisation nationales pour lutter contre la discrimination et la violence contre les femmes dans tous les domaines.

9. Veiller à ce que l’Observatoire de la Violence contre les Femmes, qui relève du Ministère de l’Intérieur, fasse connaître son mandat et coopère avec les Ministères de la Justice, de la Santé et de l’Éducation, afin de mettre en œuvre une stratégie nationale visant à lutter contre la violence sexuelle contre les femmes.

10. Garantir la constitution et l’accessibilité au public de dossiers exacts et tenus à jour sur la violence perpétrée contre les femmes.

Signataires :

  • FIDH
  • New Women Foundation
  • Initiative for Egyptian Female Lawyers – Initiative pour les Femmes Juristes en Egypte
  • Shoft Taharosh (j’ai été témoin de harcèlement)
  • Appropriate Communications Techniques for Development (ACT) – Techniques de Communications adaptées au Développement
  • Al Nadeem Center for Rehabilitation of Victims of Violence - Centre de réadaptation pour les victimes de la violence
  • Anti-Harassment Initiative - Initiative Anti-Harcèlement
  • Banat Masr Khat Ahmar Movement
  • Baheya Ya Masr Institution
  • Tahrir Bodyguard
  • Nazra for Feminist Studies - Nazra pour les Etudes Féministes
  • Uprising of Women in the Arab Worls (Soulèvement des Femmes dans le Monde Arabe)
  • Cairo Institute for Human Rights Studies (CIHRS) – Institut du Caire pour les Etudes des Droits de l’Homme
  • Egyptian Initiative for Personal Rights (EIPR) – Initiative Egyptienne pour les Droits des Personnes
  • Harassmap
  • Egyptian Center for Women’s Rights (ECWR) – Centre Egyptien pour les Droits des Femmes
  • Amnesty International
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