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Nouvelle ère pour la Colombie, qui a signé la paix avec les Farc

Le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, a félicité «tous ceux qui ont rendu possible ce jour mémorable», estimant que l’accord «crée les conditions pour une paix durable».
par LIBERATION, avec AFP
publié le 26 septembre 2016 à 5h50
(mis à jour le 27 septembre 2016 à 6h44)

La Colombie est entrée dans une nouvelle ère en signant un accord de paix historique avec la guérilla des Farc afin de mettre fin à un conflit armé sanglant de plus d’un demi-siècle qui a fait plus de 300 000 morts et disparus.

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L’accord a été signé lundi par d’anciens faucons qui ont fait de la paix leur fer de lance: le président Juan Manuel Santos et le commandant en chef des Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc, marxistes), Rodrigo Londoño, alias Timochenko. Tous deux sont apparus vêtus de blanc, comme les 2 500 invités, dont 250 victimes du conflit (personnes enlevées ou blessées, proches, ...), qui ont pu accéder à l’enceinte tendue de blanc et hautement sécurisée où se tenait cette émouvante cérémonie, à Carthagène des Indes, sur la côte caraïbe (nord).

Convié à parler en premier, Timochenko a salué «une nouvelle ère de réconciliation et de construction de la paix» et a pour la première fois demandé «pardon» à «toutes les victimes du conflit». Carthagène a ensuite été survolée par une escadrille d'avions, le chef des Farc plaisantant sur le fait qu'ils viennent «saluer la paix et pas avec des bombes».

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«Un accord qui sauve des vies»

«Plus de guerre ! Plus de guerre !», a lancé le chef de l'Etat, repris en choeur par l'assistance. «Plus de morts (...) pour une guerre absurde», a-t-il affirmé, saluant la décision des Farc de «changer les balles pour les votes» par cet accord qui leur permet de se convertir en parti politique. «Bienvenue dans la démocratie !», leur a-t-il souhaité, réaffirmant préférer «un accord imparfait, qui sauve des vies, à une guerre parfaite».

Le président Juan Manuel Santos a signé le document de 297 pages avec un «baligrafo», stylo fabriqué avec une balle du conflit. Et il a offert à Timochenko une broche représentant une colombe blanche, avec dans son bec un rameau d’olivier et un ruban aux couleurs jaune, bleu, rouge du drapeau colombien, symbole dont était parée Carthagène. Quinze chefs d’Etat latino-américains ont assisté à cette cérémonie inédite, à commencer par le Cubain Raul Castro, dont le pays a accueilli les négociations ayant abouti le 24 août à cet accord avec les Farc, sous les auspices aussi de la Norvège, du Venezuela et du Chili.

Le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, a félicité «tous ceux qui ont rendu possible ce jour mémorable», estimant que l'accord «crée les conditions pour une paix durable». Le secrétaire d'Etat américain John Kerry a pour sa part estimé que la Colombie a franchi «un pas de géant». Parmi les 27 ministres des Affaires étrangères présents, le Norvégien Borge Brende, dont le pays a été facilitateur de la paix, a salué cet «accord historique», mais averti que sa mise en oeuvre «va demander beaucoup de leadership». La Fédération internationale des droits de l'Homme (FIDH) a pour sa part appelé à l'instauration «de l'équité et de la justice qui restent à bâtir en Colombie».

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Retrait de la liste des organisations terroristes

De son côté, l'Union européenne a suspendu les Farc de sa liste des organisations terroristes après la signature officielle de l'accord de paix. L'ex-otage des Farc, Ingrid Betancourt, a pour sa part exprimé son «très grand soulagement» et salué «la fin d'un cauchemar». «Heureusement c'est fini!», a-t-elle déclaré.

Les Farc, issues en 1964 d'une insurrection paysanne et qui comptent encore quelque 7 000 combattants armés, ont ratifié l'accord vendredi pendant leur conférence au cœur du Caguan (sud-est). Le complexe conflit colombien a fait plus de 260 000 morts et 45 000 disparus tandis que 6,9 millions de personnes ont été déplacées. Il a impliqué plusieurs guérillas d'extrême gauche, dont également l'Armée de libération nationale (ELN, guévariste), encore active avec 1 500 combattants, des paramilitaires d'extrême droite et l'armée. L'ELN et le gouvernement se sont engagés en mars à entamer des pourparlers, mais sans fixer de date. La guérilla a toutefois annoncé une trêve unilatérale du 30 septembre au 5 octobre «pour faciliter la participation des gens» au référendum du 2 octobre, dont dépend l'entrée en vigueur de l'accord.

Ce qui a été négocié avec les Farc est très critiqué par l’opposition, emmenée par l’ex président Alvaro Uribe, qui a participé lundi dans la cité caribéenne à une chaîne humaine contre la signature.

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