L’Espagne doit abandonner son projet de loi contre l’avortement

31/01/2014
Communiqué
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Le 20 décembre dernier, le gouvernement espagnol approuvait un projet de loi imposant des limites drastiques au droit à l’avortement. La FIDH et l’APDHE exhortent le Congrès à rejeter ce texte lorsqu’il lui sera présenté dans quelques mois.

Présenté par le ministre de la Justice Alberto Ruiz Gallardon, et adopté en conseil des ministres en décembre 2013, le projet de loi prévoit de revenir sur la loi adoptée sous le gouvernement de M. Zapatero en 2010. Actuellement, le droit espagnol permet aux femmes de se faire avorter lorsqu’elles le décident jusqu’à 14 semaines de grossesse, et jusqu’à 22 semaines en cas de « risque grave pour la vie ou la santé de la mère ou du fœtus ». Le nouveau projet de loi prévoit de dépénaliser l’avortement seulement dans certains cas limités : lorsque la grossesse est la conséquence d’un viol et à condition que la victime ait déposé plainte (jusqu’à 12 semaines), en cas de grave danger pour la vie ou la santé physique ou psychique de la mère (jusqu’à 22 semaines), ou en cas d’anomalie du fœtus « incompatible avec la vie » si et seulement si cette anomalie cause un grave danger pour la santé psychique de la mère. Dans ce dernier cas, l’avortement est possible durant toute la grossesse lorsque l’anomalie n’avait pas été diagnostiquée pendant les 22 premières semaines de la grossesse. « Dans de nombreux pays, les femmes se sont battues pour obtenir le droit à disposer de leurs corps, et à avoir accès à des avortements médicalisés. Ce projet de loi est un grave recul pour les droits des femmes espagnoles qui perdent la capacité de décider d’avoir un enfant si elles veulent, quand elles veulent », a déclaré Karim Lahidji, Président de la FIDH.

Ce projet de loi constitue une menace pour la santé des femmes qui, lorsqu’elles ne peuvent pas avorter légalement dans leur pays, et n’ont pas les moyens de se rendre à l’étranger, recourent très souvent à des avortements pratiqués dans la clandestinité au péril de leur vie.

En portant atteinte au droit des femmes à décider du nombre et de l’espacement des naissances de leurs enfants, ce type de décision a aussi inévitablement un impact sur la vie des femmes et leur place au sein de la société, car ce sont elles qui assument encore très souvent la charge quotidienne des enfants dans les sociétés occidentales. « La loi de 2010 accordait aux femmes la possibilité de choisir quelle vie elles désiraient avoir. L’Etat ne doit pas s’immiscer dans ce choix  » a considéré Noeline Blackwell, Vice-présidente de la FIDH.

Le texte devrait être présenté au Congrès dans deux mois et risque fortement d’être adopté par les députés du parti au pouvoir qui détient la majorité des sièges.

[(Addendum
Le 12 février, le Congrès des députés a rejeté à 183 voix contre 151 (et 6 abstentions) une proposition du Parti socialiste de retirer immédiatement le texte. Cependant, cela ne signifie pas que le projet a été adopté par le Congrès. La procédure suit son cours. Des consultations sont actuellement menées avant que le texte définitif soit déposé au Congrès - probablement au début de l’été - pour être discuté et voté.
Par ailleurs, le Parti populaire, auquel appartient Alberto Ruiz-Gallardón à l’origine du projet de loi, a présenté plusieurs recours constitutionnels contre la loi de 2010 actuellement en vigueur qui reconnaît l’avortement comme un droit. Ces recours ont été déclarés recevables par le Tribunal constitutionnel qui devrait se prononcer prochainement.)]

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