Lettre ouverte à George W. Bush, Président des Etats-Unis d’Amériques

Monsieur le Président,

La FIDH est extrêmement préoccupée par les conditions de détention des " terroristes présumés " ou " prisonniers du champ de bataille " détenus à l’heure actuelle par les Etats-Unis et transférés vers la base militaire américaine de Guantanamo bay à Cuba, ainsi que par l’impartialité de leurs procès à venir.

Conformément à l’article 5 de la troisième Convention de Genève relative au traitement des prisonniers de guerre et contrairement aux déclarations du Secrétaire américain à la défense Donald Rumsfeld le 11 janvier, la FIDH tient à rappeler que tous les détenus doivent être traités en conformité avec le droit humanitaire et doivent au minimum bénéficier des protections accordées par l’article 3 commun aux Conventions de Genève de 1949, telles que le droit à un procès équitable (et en particulier le droit à la présomption d’innocence) et le droit à ne pas être soumis à la torture et à des traitements inhumains, dégradants ou cruels " en tout temps et en tout lieu ".

Le 28 décembre, vous avez déclaré "quelles que soient les procédures liées au fonctionnement des tribunaux militaires, notre système est plus loyal que celui de Ben Laden et des taliban (...) les prisonniers que nous avons capturés et qui seront jugés auront un procès loyal et plus de chances de se défendre que nos citoyens qui se trouvaient dans le World Trade Center et au Pentagone" (source Reuters). La FIDH trouve pour le moins surprenant de vous voir adopter comme référence le système de justice des taliban concernant l’administration de la justice par les cours américaines.

Alors que la FIDH a condamné avec la plus grande force les attentats du 11 septembre, elle tient à rappeler que face à de telles attaques, l’exigence de justice doit l’emporter sur la tentation de la vengeance. Il est essentiel que justice soit rendue conformément aux dispositions du droit international humanitaire et des droits de l’Homme, sans quoi il ne pourrait s’agir que d’une simple parodie de justice. Dans un communiqué du 15 novembre, la FIDH a vivement critiqué l’instauration de commissions militaires par un décret du 13 novembre pour juger les individus présumés " de participation à des actes terroristes ou de soutien au terrorisme ". En effet, conformément à l’article 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, " toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement et publiquement par un tribunal compétent, indépendant et impartial, établi par la loi ". On peut légitimement douter du respect de cet article et de l’exemplarité d’un procès devant des tribunaux militaires. Les auteurs présumés, directement impliqués dans les attaques du 11 septembre et récemment arrêtés, doivent être jugés par des tribunaux de droit commun.

Finalement, la FIDH rappelle sa position quant à la peine de mort (voir le rapport n°316 sur la peine de mort aux Etats-Unis, http://www.fidh.org) et appelle le gouvernement des Etats-Unis à s’opposer à l’application de celle-ci en toutes circonstances.

Sidiki Kaba
Président

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