Canada : résolution sur les engagements du Québec en matière de droits humains

Résolution adoptée par le 38e Congrès de la FIDH

Présentée par la Ligue des droits et libertés du Québec


Sur la demande d’une enquête publique sur les plans stratégiques et les interventions des forces policières lors de la grève étudiante et la contestation sociale du printemps 2012

La Fédération internationale des ligues des droits de l’homme, réunie en son 38e Congrès,

RAPPELANT QUE la FIDH est une fédération regroupant 164 organisations membres dont un des principaux objectifs est la lutte contre les violations des droits humains et en faveur du droit des victimes à un recours et à une réparation ;

CONSIDÉRANT QUE les nombreuses interventions policières effectuées lors de la grève étudiante et la contestation sociale du printemps 2012 ont été marquées au Québec (Canada) par des violations des droits et libertés des manifestant-e-s, notamment par des arrestations massives et préventives, par l’emploi régulier de poivre de cayenne, de gaz irritants, par l’usage d’armes telles que les balles de plastique ayant causé des blessures, par des conditions de détention inacceptables et des conditions de libération abusives ;

CONSIDÉRANT QUE des témoignages ont révélé qu’il y avait eu entrave par les forces policières aux soins d’urgence à prodiguer aux personnes blessées lors de certaines de ces manifestations ;

RAPPELANT QUE le Comité contre la torture avait interpellé le Canada en 2005 à propos de l’emploi abusif et dangereux, par les forces de l’ordre, d’armes chimiques, irritantes, incapacitantes ou mécaniques et avait demandé qu’une étude publique et indépendante soit menée concernant le recours à ces armes comme technique de contrôle de foule ;

RAPPELANT QUE le Comité des droits de l’Homme de l’ONU avait interpellé le Canada en 2006 à propos des arrestations massives faites par les corps policiers lui rappelant que seules les personnes ayant commis des infractions pénales au cours des manifestations pouvaient être arrêtées et avait demandé au Canada d’enquêter sur les pratiques des forces policières lors de manifestations ;

CONSIDÉRANT QUE sans cette enquête publique, les violations de droits humains constatées lors du printemps de 2012 risquent de se répéter dans le contexte d’autres manifestations de contestation sociale ;

CONSIDÉRANT QUE la Charte québécoise des droits et libertés reconnaît le droit constitutionnel de manifester ainsi que la liberté d’expression et la liberté d’association ;

DEMANDE au Gouvernement du Québec d’instituer une enquête indépendante qui devra permettre notamment :

 d’identifier les plans stratégiques adoptés lors des manifestations qui ont eues cours tout au long de la grève étudiante et de la contestation sociale du printemps 2012 ;

 d’identifier les responsables, politiques et policiers, de la planification et de la coordination des différentes stratégies d’intervention des forces policières

 d’examiner le recours à des armes telles que les balles de plastique comme technique de contrôle des foules ;

 d’identifier les violations de droits commises ;

 d’assurer aux victimes de violations de droits une réparation adéquate.


Sur les engagements en matière de droits humains dans le cadre de son plan de développement du Nord du Québec

RAPPELANT QUE la FIDH est une fédération regroupant 164 organisations membres qui agit notamment pour promouvoir la démocratie et l’État de droit et en faveur d’un ordre économique et social international juste et, en particulier, en faveur du droit à un développement durable respectueux de l’environnement ;

PRENANT ACTE QUE le plan de développement du Nord du Québec soulève d’importantes questions quant à l’exploitation des ressources naturelles, la protection de l’environnement de même qu’en ce qui concerne le type de développement économique et social que ce plan soutient ;

CONSIDÉRANT QUE le plan de développement du Nord du Québec porte d’emblée atteinte à certains droits humains, en particulier le droit à l’autodétermination, le droit d’accès à l’information, le droit à la participation de la population autochtone et non-autochtone au processus décisionnel ;

CONSIDÉRANT QUE les activités extractives promues par le plan de développement du Nord du Québec risquent d’entrainer des atteintes à plusieurs droits économiques, sociaux et culturels, notamment, le droit à l’eau et à la santé, le droit au logement, le droit à un environnement sain ;

PRENANT ACTE de l’avis du Conseil du statut de la femme du Québec et des organisations de défense des droits des femmes, signalant la présence d’indices à l’effet que le boom économique actuel, au nord du 49e parallèle, a des effets nuisibles sur le droit des femmes à l’égalité, notamment : emplois précaires et sous-payés, accroissement de la prostitution, fragilisation du tissu social favorisant une augmentation de la violence faites aux femmes ;

DEMANDE au Gouvernement du Québec :

 conformément au Pacte international relatif aux droits civils et politiques et à la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, de mettre en prononcer sur le plan de développement du Nord du Québec leur permettant de choisir leurs modes de développement et de disposer, compte tenu des droits qui leur sont dévolus, des richesses et ressources naturelles visées par ce plan de développement ;

 de procéder non seulement à des études d’impacts environnementaux pour chacun des projets visés par le plan de développement du Nord du Québec mais aussi à une étude environnementale stratégique globale permettant d’étudier l’impact des contaminants générés par l’ensemble des activités extractives, des modes de transports et des projets énergétiques sur les cours d’eau, la santé publique, les changements climatiques ;

 de procéder à l’analyse différenciée selon les sexes des investissements publics prévus, en tenant compte des réalités et des besoins distincts des femmes et des hommes et d’adopter dans le cadre du plan de développement du Nord du Québec un plan structurant de développement de la main-d’œuvre visant l’égalité pour les femmes au niveau de la formation et de l’emploi.

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