Uhuru Kenyatta devant les juges de la CPI : les victimes demandent la vérité et la justice

La présence d’Uhuru Kenyatta à la Cour pénale internationale (CPI) le 8 octobre 2014 — ordonnée par les juges de la Chambre de première instance — doit être considérée comme l’opportunité de placer le droit des victimes à la vérité et à la justice au centre des débats en cours sur l’avenir de cette affaire, ont déclaré aujourd’hui nos organisations. Les autorités kenyanes doivent pleinement coopérer avec la -CPI- et mener de véritables enquêtes et poursuites au niveau national afin que les victimes des violences post-électorales de 2007/2008 obtiennent justice et réparation.

Le 7 et 8 octobre 2014, la CPI tient deux conférences de mise en état concernant l’affaire à l’encontre du Président du Kenya en exercice, Uhuru Kenyatta. Ces audiences portent sur l’état de la coopération entre le Bureau de la Procureure et le gouvernement kenyan et devront permettre à la Chambre de première instance de la CPI de décider de l’avenir de l’affaire.

Selon le Bureau du Procureur de la CPI, les autorités kenyanes ne respectent pas entièrement leurs obligations en termes de coopération, en refusant de remettre des documents requis, qui permettraient d’établir la culpabilité de Kenyatta pour des crimes commis pendant les violences post-électorales, comme il a été allégué dans les procédures intentées contre lui.

« L’objectif de ces conférences n’est pas de décider de la culpabilité ou de l’innocence de Uhuru Kenyatta, mais d’entendre toutes les parties sur des questions spécifiques relatives à la coopération du Kenya avec le Bureau de la Procureure de la CPI. Cette question a un impact considérable et direct sur les procédures de la CPI dans cette affaire » , ont déclaré nos organisations. Et d’ajouter : « Tandis que le Président Uhuru Kenyatta semble, jusqu’à présent, être loin de respecter ses obligations envers la Cour, il s’est engagé, parallèlement, dans une stratégie diplomatique et judiciaire visant à remettre en cause la légitimité et la crédibilité de la CPI. Cette attitude a eu pour effet de saper l’objectif final qui est de rendre justice aux victimes » .

La FIDH et KHRC rappellent en outre que « l’intervention de la CPI est d’autant plus fondamentale que les victimes des crimes qui ont été commis au cours des violences post-électorales au Kenya n’ont pas eu de recours adapté afin d’obtenir justice et réparation au niveau national. Les développements actuels dans les procédures devant la CPI démontrent que personne, pas même un chef d’État en fonction, n’est au-dessus de la loi » .

Malgré le début de procédures judiciaires nationales, les crimes commis à la suite des élections de 2007/2008 sont restés, dans une large mesure, impunis. Il y a bien eu quelques poursuites qui ont été engagées contre certains auteurs d’actes de violence de niveau intermédiaire, mais la plupart d’entre eux se sont vus acquittés en raison des lacunes des enquêtes, qui n’ont pas permis de produire de preuves crédibles et suffisantes pour mener à des condamnations.

Contexte

À la suite de résultats électoraux controversés, le Kenya a été plongé dans des épisodes de violence dès décembre 2007. Dans la période qui suivit les élections, le Kenya a été en proie à des actes de violence sans précédent qui se sont soldés par au moins 1133 morts, 900 cas de violence sexuelle et basée sur le genre, plus de 350 000 individus déplacés, de nombreuses victimes ayant subi de graves préjudices et la destruction de leurs biens.

Cette dernière année, il n’y a eu pratiquement aucun effort de la part du gouvernement pour mener des enquêtes ou des poursuites crédibles ou efficaces ni pour garantir qu’une justice équitable et significative soit rendue aux victimes. En raison du manque de procédures nationales crédibles, les Kenyans n’ont cessé de soutenir la CPI, vue comme seul moyen d’établir les responsabilités et de rendre une justice effective aux victimes.

Pour en savoir plus, reportez-vous notamment au rapport de la FIDH et KHRC publié en avril 2014 (en anglais) « Kenya : One Year in Office for Uhuru Kenyatta and William Ruto ; Human Rights Record Marred by Abuses Kenya ».

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