Djibouti : Libération de Me Zakaria Abdillahi et arrestation de M. Maydaneh Abdallah Okieh

28/01/2014
Appel urgent

L’Observatoire a été informé de sources fiables de la libération de Me Zakaria Abdillahi, président de la Ligue djiboutienne des droits humains (LDDH) et député de la principale coalition de l’opposition, l’Union pour le salut national (USN), et de l’arrestation violente de M. Maydaneh Abdallah Okieh, journaliste à La Voix de Djibouti et membre dirigeant de l’USN.

L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme, programme conjoint de la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) et de l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT), a reçu de nouvelles informations et vous prie d’intervenir de toute urgence sur la situation suivante à Djibouti.

Nouvelles informations :

Selon les informations reçues, le 26 janvier 2014 vers midi, Me Zakaria Abdillahi a été libéré de la Section de recherches et de documentation (SRD) de la gendarmerie de la capitale Djibouti-ville, suite à une décision du procureur de la République, ainsi que les trois personnes qui l’accompagnaient (cf. rappel des faits). Son téléphone portable et son ordinateur lui ont cependant été confisqués en violation de la loi protégeant les avocats et le secret professionnel.

Au cours de sa détention, Me Abdillahi aurait été accusé de « tentative d’intelligence avec une puissance étrangère », des charges qui, selon certaines informations, n’auraient finalement pas été retenues contre lui.

L’Observatoire a par ailleurs été informé de l’arrestation le 26 janvier 2014 de M. Maydaneh Abdallah Okieh, interpellé et battu par des gendarmes alors qu’il couvrait la libération de Me Zakaria Abdillahi et de ses trois co-détenus à la sortie de la SRD de la gendarmerie. M. Maydaneh Abdallah Okieh s’est vu confisquer son matériel de reportage dont un smartphone, puis a été conduit dans une cellule de la SRD, où il reste détenu à ce jour sans informations quant à l’existence éventuelle de charges à son encontre. M. Maydaneh Abdallah Okieh a été détenu à deux reprises par le passé à la prison centrale de Gabode, dont une fois du 19 mai au 19 octobre 2013 pour avoir posté sur son compte Facebook des images d’exactions commises par la police et une photo du commandant de police Elmi Daher Miguil.

L’Observatoire se félicite de la libération de Me Zakaria Abdillahi, mais appelle désormais les autorités djiboutiennes à mettre un terme à toute forme de harcèlement, y compris judiciaire, à son encontre. L’Observatoire appelle par ailleurs les autorités djiboutiennes à libérer M. Maydaneh Abdallah Okieh de manière immédiate et inconditionnelle en ce que sa détention ne vise qu’à sanctionner ses activités de défense des droits de l’Homme. Ces faits se déroulent dans un climat de répression à Djibouti où une vingtaine d’opposants auraient été arrêtés depuis le 24 janvier 2014.

Rappel des faits :

Le 24 janvier 2013, Me Zakaria Abdillahi a été arrêté par des gendarmes à Ali-Sabieh, au sud-est de Djibouti. Trois de ses amis, deux militaires français en vacances et un ami djiboutien, ainsi que deux élus de l’Union pour le salut national (USN) de la région d’Ali-Sabieh ont également été interpellés à cette occasion.

Si les deux élus ont été libérés le jour même, Me Abdillahi et ses trois amis ont été transférés à la capitale Djibouti-ville où ils ont été détenus incommunicado jusqu’au 26 janvier dans une cellule de la SRD de la gendarmerie, sans accès à leur famille, ni à un médecin ou leur avocat. Selon les informations reçues, Me Abdillahi avait entamé une grève de la faim le 24 janvier 2014 pour protester contre sa détention arbitraire. Ses trois amis ont été libérés en même temps que lui, le 26 janvier.

Depuis plusieurs semaines et en lien avec ses activités de défense des droits humains, Me Abdillahi recevait des menaces de mort et des pressions. Ce dernier est en effet l’avocat de plusieurs membres de l’opposition djiboutienne victimes d’actes de harcèlement et de répression de la part des autorités.

L’Observatoire appelle plus généralement les autorités djiboutiennes à mettre un terme aux détentions et autres actes de répression, dans un contexte caractérisé par une recrudescence des arrestations et du harcèlement contre les opposants politiques, les journalistes et les militants des droits de l’Homme, contexte également condamné le 22 janvier 2014 par Mme Reine Alapini Gansou, Rapporteure spéciale pour les défenseurs des droits de l’Homme de la Commission africaine des droits de l’Homme et des peuples (CADHP) de l’Union africaine.

Actions requises :

L’Observatoire vous prie d’intervenir auprès des autorités de Djibouti et de leur demander de :

i. Garantir en toutes circonstances l’intégrité physique et psychologique de Me Zakaria Abdillahi et de M. Maydaneh Abdallah Okieh, ainsi que de tous les défenseurs des droits de l’Homme djiboutiens ;

ii. Libérer de manière immédiate et inconditionnelle M. Maydaneh Abdallah Okieh ;

iii. Garantir, dans l’intervalle, l’accès immédiat et inconditionnel de M. Maydaneh Abdallah Okieh à ses proches, à un médecin et à un avocat ;

iv. Mettre un terme à toute forme de harcèlement à l’encontre de Me Zakaria Abdillahi, de M. Maydaneh Abdallah Okieh, ainsi qu’à celle de tous les défenseurs des droits de l’Homme à Djibouti, afin qu’ils puissent mener leurs activités de défense des droits de l’Homme librement et sans entrave ;

v. Se conformer aux dispositions de la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’Homme, adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies le 9 décembre 1998, et plus particulièrement à son article 1 qui dispose que “chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres, de promouvoir la protection et la réalisation des droits de l’Homme et des libertés fondamentales aux niveaux national et international” ; son article 6(b), qui dispose que “chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres de publier, communiquer à autrui ou diffuser librement des idées, informations et connaissances su tous les droits de l’Homme et toutes les libertés fondamentales” ; et son article 12.2, qui dispose que “l’État prend toutes les mesures nécessaires pour assurer que les autorités compétentes protègent toute personne, individuellement ou en association avec d’autres, de toute violence, menace, représailles, discrimination de facto ou de jure, pression ou autre action arbitraire dans le cadre de l’exercice légitime des droits visés dans la [...] Déclaration” ;

vi. Plus généralement, se conformer aux dispositions de la Déclaration universelle des droits de l’Homme et instruments régionaux et internationaux relatifs aux droits de l’Homme ratifiés par Djibouti.

Adresses :

· Son Excellence Ismail Omar Guelleh, Président de la République, Palais Présidentiel, BP 6, Djibouti Ville, République de Djibouti. Tel / Fax : 00 253 35 50 49 / 00 253 35 02 01.
· Monsieur Ali Farah Assoweh, Ministre de la Justice, des affaires pénitentiaires et musulmanes, chargé des droits de l’Homme, BP 12, Djibouti Ville, République de Djibouti. Tel / Fax : 00 253 35 54 20
· Monsieur Maki Omar Abdoulkader, Procureur de la République, Tel / Fax : 00 253 35 69 90.
· S.E. Mohamed Siad Doualeh, Ambassadeur, Mission permanente de Djibouti auprès de l’Office des Nations unies à Genève, 19 chemin Louis Dunant, 1202 Genève, Suisse, Fax : + 41 22 749 10 91. Email : mission.djibouti@djibouti.ch
· Ambassade de Djibouti à Bruxelles, 204 avenue F.D. Roosevelt, 1050 Bruxelles, Belgique, Fax : + 32 2 347 69 63 ; Email : amb_djib@yahoo.fr

Prière d’écrire également aux représentations diplomatiques de Djibouti dans vos pays respectifs.

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Genève-Paris, le 28 janvier 2014

Merci de bien vouloir informer l’Observatoire de toutes actions entreprises en indiquant le code de cet appel.

L’Observatoire, programme de la FIDH et de l’OMCT, a vocation à protéger les défenseurs des droits de l’Homme victimes de violations et à leur apporter une aide aussi concrète que possible.

Pour contacter l’Observatoire, appeler La Ligne d’Urgence :
· E-mail : Appeals@fidh-omct.org
· Tel et fax OMCT : + 41 22 809 49 39 / 41 22 809 49 29
· Tel et fax FIDH : 33 1 43 55 25 18 / 33 1 43 55 18 80

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