Côte d’Ivoire : Face à l’intensification des combats, le Conseil de sécurité et la CPI doivent agir maintenant

La Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) et ses organisations membres en Côte d’Ivoire, la Ligue ivoirienne des droits de l’Homme (LIDHO) et le Mouvement ivoirien des droits humains (MIDH), sont profondément préoccupés par l’intensification des combats et l’aggravation des violences en Côte d’Ivoire et appellent le Conseil de sécurité des Nations unies à renforcer le mandat d’action de l’ONUCI pour protéger les populations civiles ; et la CPI a ouvrir une enquête.

Depuis le 28 mars 2011, les Forces Républicaines de Côte d’Ivoire (FRCI), pro-Ouattara, ont conquis plusieurs villes à l’Ouest, au Centre et à l’Est du pays [1] et se rapprochent maintenant d’Abidjan, provoquant de nombreux affrontements avec les Forces de Défense et de Sécurité (FDS), proches du camp Gbagbo. La généralisation des combats à l’ensemble du pays et l’intensification des violations des droits de l’Homme ont causé de nouvelles victimes civiles portant le bilan humain de la crise post-électorale en Côte d’Ivoire à près de 500 victimes et des milliers de blessés.

Dans ce contexte d’escalade, les violences envers la population continuent et s’intensifient. Ainsi, des tirs d’obus des FDS (pro-Gbagbo) se sont abattus à Abidjan le 29 mars sur la population civile causant la mort de 22 personnes dans les quartiers d’Abobo-PK 18 (12 morts) et de Willimansville-Adjame (10 morts). De nouveaux procédés d’exécution ce sont généralisés comme le « supplice du collier » consistant à bruler vifs des individus en enflammant un pneu placé autour de leur cou. Ce supplice, pratique quasi quotidienne à Abidjan, est utilisé par les milices supplétives de Laurent Gbagbo et principalement les Jeunes patriotes. À cela s’ajoute les pillages de biens constatés dans plusieurs villes aussi bien par les FRCI que les populations locales ou des miliciens pro-Gbago : ainsi à Daloa et Gagnoa, respectivement, les FRCI et la population locale semblent avoir pillés des maisons ; à Guiglo et Douékoué ce seraient les miliciens pro-Gbagbo qui se seraient rendus responsables de tels pillages.

Ces actes de violence s’ajoutent à une situation humanitaire qui se détériore elle aussi de jour en jour. Fuyant ces violences, le nombre de personnes déplacées ne cesse d’augmenter et l’on compte désormais plus d’1 million de personnes déplacées et réfugiés dont près de 116 000 dans les pays limitrophes, en particulier au Liberia, au Ghana, au Togo et au Mali [2]. À Abidjan, la population continue de quitter massivement la ville. Non seulement les déplacés et réfugiés mais l’ensemble de la population civile a maintenant urgemment besoin d’une aide alimentaire et médicale.

La FIDH, la LIDHO et le MIDH s’inquiètent vivement du rappel, par le chef d’État-major des armés, le Général Philippe Mangou, des Jeunes Patriotes qui ont été enregistrés depuis le 21 mars 2011, pour être enrôlés de façon effective dans les rangs des FDS. Nos organisations craignent que cet appel, s’il est suivi d’effet, ne constitue le dernier pas vers la guerre civile et l’utilisation de civils dans les combats.

« La communauté internationale doit intervenir plus fermement pour protéger les populations civiles et éviter que la Côte d’Ivoire ne bascule définitivement dans la guerre civile. La résolution qui est sur la table du Conseil de sécurité des Nations unies doit interdire les tirs à l’arme lourde dans Abidjan mais aussi renforcer le mandat d’action de l’ONUCI pour l’obliger à faire stopper les violences contre les populations lorsque celles-ci sont en danger » a déclaré Souhayr Belhassen, présidente de la FIDH.

La FIDH exhorte l’ensemble des forces combattantes à respecter le droit international humanitaire et des droits de l’Homme, faire cesser les pillages et garantir la liberté d’expression et de presse. La FIDH rappelle que chacun sera juridiquement tenu responsable des actes qu’il a commis. « La situation est maintenant de la compétence de la Cour pénale internationale (CPI) » a déclaré Me Sidkii Kaba, « les crimes commis sont trop graves et la CPI n’a pas d’autres choix maintenant que d’ouvrir une enquête sur les crimes contre l’humanité perpétrés en Côte d’Ivoire. Ce serait de surcroît une garantie que les auteurs de ces crimes, quels qu’ils soient, seront poursuivis », a-t-il ajouté.

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