Burundi : Tentative d’assassinat perpétrée à l’encontre de M. Pierre Claver Mbonimpa

04/08/2015
Appel urgent

L’Observatoire a été informé de la tentative d’assassinat perpétrée à l’encontre de M. Pierre Claver Mbonimpa, président de l’Association pour la protection des droits humains et des personnes détenues (APRODH) et lauréat en 2007 du Prix Martin Ennals pour les défenseurs des droits de l’Homme.

L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme, programme conjoint de la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) et de l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT), vous prie d’intervenir de toute urgence sur la situation suivante au Burundi.

Nouvelles informations :

Selon les informations reçues, le 3 août 2015 vers 17h30, un motard s’est approché de la voiture de M. Mbonimpa alors que ce dernier se trouvait dans le quartier de Kinama, et a tiré au moins quatre coups de feu dans sa direction. L’une des balles a frappé M. Mbonimpa au cou, avant de se loger au niveau de la joue. À l’heure où nous publions cet appel urgent, cette balle a été retirée, et l’état de santé de M. Mbonimpa serait stabilisé. Ce dernier se trouve actuellement à l’hôpital de Bujumbura, mais nécessite cependant des soins supplémentaires.

L’Observatoire dénonce avec la plus grande fermeté la tentative d’assassinat perpétrée à l’encontre de M. Mbonimpa, et appelle les autorités burundaises à mener sans délai une enquête exhaustive, indépendante, effective, rigoureuse, impartiale et transparente, afin d’identifier les responsables, de les traduire devant un tribunal indépendant, compétent et impartial conformément aux instruments internationaux et régionaux de protection des droits de l’Homme, et d’appliquer les sanctions pénales, civiles et/ou administratives prévues par la loi.

L’Observatoire exprime plus généralement sa vive préoccupation face au harcèlement continu de la société civile et à la répression accrue de l’opposition politique ainsi que des médias indépendants dans le pays.

Rappel des faits :

M. Mbonimpa a lancé en janvier 2015 - avec M. Pacifique Ninihazwe[1], Président du Forum pour la Conscience et le Développement (FO.CO.DE) et M. Vital Nshimirimana, Président du Forum pour le renforcement de la société civile au Burundi - la campagne de la société civile contre une nouvelle candidature du président sortant. Cette campagne, intitulée « Halte au troisième mandat », a fait suite à l’annonce du président Pierre Nkurunziza de son intention de se présenter à sa propre succession lors des élections présidentielles de juin 2015, et ce en dépit des dispositions de l’Accord d’Arusha et de la Constitution de 2005 ne lui permettant pas de briguer un troisième mandat.

Le 27 avril 2015 au matin, M. Mbonimpa avait été arrêté alors qu’il se trouvait à la maison de la presse de Bujumbura, par les forces de police burundaises, qui ne disposaient pas de mandat d’arrêt à son encontre. Il a été a été libéré le lendemain par les services de renseignements burundais[2].

L’Observatoire rappelle enfin que M. Mbonimpa est la cible d’un harcèlement judiciaire constant depuis son arrestation en mai 2014[3], pour avoir publiquement dénoncé l’existence de camps d’entraînement de jeunes burundais à l’est de la RDC. Arbitrairement détenu pendant plus de cinq mois, il a été libéré provisoirement et en raison de son état de santé le 29 septembre 2014[4].

Actions requises :

L’Observatoire vous prie de bien vouloir écrire aux autorités burundaises en leur demandant de :

i. Garantir en toutes circonstances l’intégrité physique et psychologique de M. Pierre Claver Mbonimpa et de tous les défenseurs des droits de l’Homme au Burundi ;

ii. Mener sans délai une enquête exhaustive, indépendante, effective, rigoureuse, impartiale et transparente, afin d’identifier les responsables, de les traduire devant un tribunal indépendant, compétent et impartial conformément aux instruments internationaux et régionaux de protection des droits de l’Homme, et d’appliquer les sanctions pénales, civiles et/ou administratives prévues par la loi ;

iii. Mettre un terme à toute forme de harcèlement à l’encontre de MM. Pierre Claver Mbonimpa ainsi que de tous les défenseurs des droits de l’Homme au Burundi ;

iv. Se conformer aux dispositions de la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’Homme, adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies le 9 décembre 1998, et plus particulièrement :

 à son article 1 qui prévoit que « chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres, de promouvoir la protection et la réalisation des droits de l’Homme et des libertés fondamentales aux niveaux national et international »,
 à son article 6(b), selon lequel « chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres, conformément aux instruments internationaux relatifs aux droits de l’Homme et autres instruments internationaux applicables, de publier, communiquer à autrui ou diffuser librement des idées, informations et connaissances sur tous les droits de l’Homme et toutes les libertés fondamentales »,
 à son article 12.2 qui dispose que « l’Etat prend toutes les mesures nécessaires pour assurer que les autorités compétentes protègent toute personne, individuellement ou en association avec d’autres, de toute violence, menace, représailles, discrimination de facto ou de jure, pression ou autre action arbitraire dans le cadre de l’exercice légitime des droits visés dans la présente Déclaration » ;

iv. Plus généralement, se conformer aux dispositions de la Déclaration universelle des droits de l’Homme et instruments régionaux et internationaux relatifs aux droits de l’Homme ratifiés par le Burundi.

Adresses :

· S.E. Pierre Nkurunziza, Président de la République, Présidence de la République, Boulevard de l’Uprona, Rohero I, BP 1870, Bujumbura, Burundi. Fax : +257 22 22 74 90
· M. Prosper Bazombanza, Premier Vice-président, BP 1870, Bujumbura, Burundi. Fax : +257 22226424
· M. Emmanuel NTAHONVUKIYE, Ministre de la Défense nationale et des anciens combattants, Fax : +257 22253215 / 22253218, Email : mdnac@yahoo.fr
· Mme Clotilde NIRAGIRA , Ministre de la solidarité nationale, des droits de la personne humaine et du genre BP : 6518 Bujumbura, Burundi. Fax : + 257 22 25 82 50
· Commissaire Gabriel Nizigama, Ministre de la sécurité publique, BP : 1910 Bujumbura, Burundi. Fax : + 257 22 24 53 51, Email : mininter@yahoo.fr
· Mission permanente de la République du Burundi auprès des Nations unies, rue de Lausanne 44, 1201 Genève, Suisse. Fax : +41 22 732 77 34. Email : mission.burundi@bluewin.ch
· Ambassade du Burundi à Bruxelles, Square Marie-Louise 46, 1000 Bruxelles, Belgique. Fax : +32 2 230 78 83, Email : ambassade.burundi@skynet.be

Prière d’écrire également aux représentations diplomatiques du Burundi dans vos pays respectifs.

***

Paris-Genève, le 4 août 2015

Merci de bien vouloir informer l’Observatoire de toute action entreprise en indiquant le code de cet appel.

L’Observatoire, programme de la FIDH et de l’OMCT, a vocation à protéger les défenseurs des droits de l’Homme victimes de violations et à leur apporter une aide aussi concrète que possible.


[1] M. Ninihazwe a précédemment fait l’objet de menaces en raison de ses activités de défense des droits humains et plus particulièrement de son activisme en amont des élections présidentielles (à ce propos voir le Communiqué de presse de l’Observatoire du 28 novembre 2014).
[2] Voir les Appels urgents de l’Observatoire BUR 001 / 0415 / OBS 036 et BUR 001 / 0415 / OBS 036.1, du 28 avril 2015.
[3] Voir les Appels urgents de l’Observatoire BDI 001 / 0514 / OBS 044 du 22 mai 2014, BDI 001 / 0514 / OBS 044.1du 16 juin 2014 et BDI 001 / 0514 / OBS 044.2 du 10 juillet 2014.
[4] Voir l’Appel urgent de l’Observatoire BDI 001 / 0514 / OBS 044.3, du 1 octobre 2014.

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