Libération de M. Dhafer Otay et poursuite de l’encerclement du local de Kalima - TUN 001 / 0109 / OBS 001.2

28/01/2009
Appel urgent

L’Observatoire a été informé par le Conseil national pour les libertés en Tunisie (CNLT) de la libération de M. Dhafer Otay, coordinateur de Radio Kalima, et des actes d’intimidation exercés contre lui et l’ensemble des collaborateurs de Kalima.

L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme, programme conjoint de la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) et de l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT), a reçu de nouvelles informations et vous prie d’intervenir de toute urgence sur la situation suivante en Tunisie.

Nouvelles informations :

Selon les informations reçues, le 27 janvier 2009, vers 20h, M. Dhafer Otay a été libéré. Enlevé par les forces de police vers 14h (Cf. rappel des faits), il a été conduit au commissariat de la rue de Cologne, à Tunis, sans explication. A sa libération, des officiers de police l’ont menacé de l’arrêter à nouveau s’il retournait dans l’immeuble hébergeant le local de Kalima et du CNLT. Dans la mesure où le logement de M. Dhafer Otay se situe également dans cet immeuble, ce dernier a dû se réfugier chez un ami.

Le 28 janvier 2009 au matin, les effectifs de police qui encerclaient l’immeuble hébergeant Kalima et le CNLT depuis la veille ont été doublés et, à l’heure de publication de cet appel, une soixantaine de policiers répartis sur la rue Abou Dhabi, la rue Mandéla et l’avenue de la Liberté, bloquaient l’accès à l’immeuble. Par ailleurs, la secrétaire du CNLT a été empêchée d’accéder à l’immeuble. Une militant des droits de l’Homme venu exprimer sa solidarité, M. Zouhayr Makhlouf, a été frappé violemment par les policiers. Seul M. Omar Mestiri, le directeur de la rédaction de Kalima, titulaire du bail du local, est autorisé à entrer et sortir de l’immeuble. Le reste de l’équipe de Kalima reste enfermé à l’intérieur depuis le 27 janvier, de crainte de ne pouvoir rentrer à nouveau, les policiers ayant en effet clairement menacé de ne plus laisser aucun journaliste entrer dans le local.

Ce nouvel acte de harcèlement et d’intimidation intervient alors que Radio Kalima a commencé à diffuser par voie satellitaire depuis le 26 janvier 2009. L’Observatoire rappelle en outre que le journal en ligne Kalima et ses collaborateurs font régulièrement l’objet d’actes de harcèlement (cf. rappel des faits).

L’Observatoire réaffirme sa préoccupation quant à la poursuite de la répression par les autorités tunisiennes de toute personne qui promeut et défend les droits de l’Homme, et rappelle que conformément à l’article 1 de la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’Homme, adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies le 9 décembre 1998, "chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres, de promouvoir la protection et la réalisation des droits de l’Homme et des libertés fondamentales aux niveaux national et international".

Rappel des faits :

Le 27 janvier 2009, vers 14h, M. Dhafer Otay et Mme Marwa Rekik, journaliste de Radio Kalima, ont quitté l’immeuble hébergeant le local de Radio Kalima. A leur retour, quelques minutes après, un important dispositif policier composé d’une trentaine de personnes encerclait l’immeuble et empêchait toute entrée. Mme Marwa Rekik a néanmoins réussi à entrer seule afin d’aller récupérer le téléphone portable de M. Dhafer Otay. Lorsque cette dernière est redescendue, M. Dhafer Otay avait disparu et les policiers ont empêché Mme Rekik de retourner à l’intérieur de l’immeuble.

Par ailleurs, depuis octobre 2008, les actes de harcèlement à l’encontre de Kalima et ses collaborateurs se sont intensifiés. Ainsi, en décembre 2008, une campagne de diffamation a également été menée contre Mme Sihem Bensedrine, porte-parole du CNLT et rédactrice en chef de Kalima. Le 8 octobre 2008, le site de Kalima hébergé en Europe a été piraté et vidé de son contenu. Le 27 octobre, Mme Néziha Rjiba, également rédactrice en chef de Kalima, a été convoquée devant le Procureur de la République après avoir mis en cause les services tunisiens suite à la destruction du site web de Kalima. M. Dhafer Otay et Mme Faten Hamdi, journaliste à Radio Kalima, ont également été interpellés et violentés par des policiers au cours de novembre 2008. M. Omar Mestiri a quant à lui reçu en novembre une injonction d’exécuter une décision de redressement fiscal de 33 000 dinars tunisiens. Ce redressement porte sur une période pendant laquelle M. Mestiri n’avait aucun revenu, ayant été soumis à une assignation à résidence dans le district de Tunis sur une période de deux ans suite à une décision du juge d’instruction émise en mai 1999, en relation avec ses activités en tant que secrétaire général du CNLT. Enfin, le 10 décembre 2008, M. Lotfi Hidouri, secrétaire de rédaction de l’édition écrite du journal, a été interpellé à l’aéroport de Tunis alors qu’il se rendait au Forum de la presse arabe à Beyrouth.

Actions demandées :

L’Observatoire vous prie d’écrire aux autorités tunisiennes et de leur demander de :

i. Garantir en toutes circonstances l’intégrité physique et psychologique de l’ensemble des collaborateurs de Kalima ;

ii. Mener une enquête exhaustive, indépendante et impartiale sur les faits décrits ci-dessus, ce afin d’identifier les responsables, de les traduire devant un tribunal civil indépendant, compétent et impartial et d’appliquer les sanctions pénales, civiles et/ou administratives prévues par la loi ;

iii. Mettre un terme immédiat à toute forme de harcèlement à l’encontre de l’ensemble des collaborateurs de Kalima ainsi qu’à l’encontre de tous les défenseurs des droits de l’Homme tunisiens ;

iv. Se conformer aux dispositions de la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’Homme, et plus particulièrement à son article 1 susmentionné, ainsi que son article 12.2, qui dispose que "l’Etat prend toutes les mesures nécessaires pour assurer que les autorités compétentes protègent toute personne, individuellement ou en association avec d’autres, de toute violence, menace, représailles, discrimination de facto ou de jure, pression ou autre action arbitraire dans le cadre de l’exercice légitime des droits visés dans la présente Déclaration" ;

v. Plus généralement, se conformer aux dispositions de la Déclaration universelle des droits de l’Homme et instruments régionaux et internationaux relatifs aux droits de l’Homme ratifiés par la Tunisie.

Adresses :

M. Zine el-Abidine Ben Ali, Président de la République, Palais de Carthage, 2016 Carthage, Tunisie, Fax : +216 71 744 721 ou +216 71 731 009
M. Mohamed Ghannouchi, Premier Ministre, Secrétariat Général du Gouvernement, Rue de la Kasbah, 1008 Tunis, Tunisie, Fax : +216 71 562 378
M. Rafik Belhaj Kacem, Ministère de l’Intérieur et du Développement local, Avenue Habib Bourguiba, 1001 Tunis, Tunisie, Fax : ++ 216 71 340 888 ; Email : mint@ministeres.tn
M. Kamel Morjane, Ministère de la Défense Nationale, Avenue Bab Mnara, La Kasbah, 1008 Tunis, Tunisie, Fax : +216 71 561 804
M. Bechir Tekkari, Ministère de la Justice et des Droits de l’Homme, 57, Boulevard Bab Benat, 1006 Tunis, Tunisie, Fax : +216 71 568 106 ; Email : mju@ministeres.tn
Ambassadeur de la Tunisie devant les Nations Unies à Genève, Mission permanente de la Tunisie auprès de l’Office des Nations Unies à Genève, 58 Rue Moillebeau, Case postale 272, 1211 Genève 19, Suisse, Fax : +41 22 734 06 63 ; Email : mission.tunisia@ties.itu.int
Ambassade de la Tunisie à Bruxelles, 278 avenue de Tervueren, 1150 Woluwe-Saint-Pierre, Belgique, Fax : + 32 2 771 94 33 ; Email : piers@low-land.be

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Paris - Genève, le 28 janvier 2009
 
Merci de bien vouloir informer l’Observatoire de toutes actions entreprises en indiquant le code de cet appel.

L’Observatoire, programme de la FIDH et de l’OMCT, a vocation à protéger les défenseurs des droits de l’Homme victimes de violations et à leur apporter une aide aussi concrète que possible.
 
L’Observatoire a été lauréat 1998 du prix des Droits de l’Homme de la République française.
 
Pour contacter l’Observatoire, appeler La Ligne d’Urgence :
E-mail : Appeals@fidh-omct.org
Tel et fax FIDH : 33 1 43 55 20 11 / 33 1 43 55 18 80
Tel et fax OMCT : + 41 22 809 49 39 / 41 22 809 49 29

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