La CIJ prend acte de l’engagement du Sénégal de maintenir Hissène Habré sur son sol

Comité International pour le Jugement Equitable de Hissène Habré

Aujourd’hui, la Cour internationale de Justice (CIJ) a pris acte de l’engagement solennel du Sénégal de maintenir l’ancien dictateur du Tchad, Hissène Habré, accusé de crimes contre l’humanité et de torture, sur son territoire durant toute la procédure judiciaire devant la plus haute Cour des Nations unies.

La CIJ, qui devait se prononcer sur les mesures conservatoires demandées par la Belgique, a considéré qu’il n’y avait plus d’urgence à indiquer de telles mesures du fait que le Sénégal "a formellement et à plusieures reprises, au cours des audiences, donné l’assurance qu’il ne permettra pas à M. Habré de quitter son territoire avant que la Cour ait rendu sa décision définitive.

La promesse du Sénégal et son acceptation par la Cour internationale de Justice ont été saluées par les victimes et les organisations non gouvernementales qui travaillent à leurs côtés.

"Le Sénégal est maintenant sous le regard de la Cour internationale de Justice. Nous espérons que les autorités sénégalaises vont enfin permettre à la justice de faire son travail. Cela fait plus de dix-huit ans que nous luttons contre l’impunité de notre ancien bourreau. Trop de victimes sont déjà décédées", a declaré Souleymane Guengueng, Président fondateur de l’Association des Victimes des Crimes et Répressions Politiques au Tchad (AVCRP).

« Avec cette promesse du Sénégal dont la Cour a pris acte aujourd’hui, le risque qu’Hissène Habré se réfugie dans un Etat de non droit semble être écarté », a déclaré Reed Brody, porte-parole et conseiller juridique de Human Rights Watch. « Le Sénégal a une occasion historique d’organiser un procès équitable pour Hissène Habré et de démontrer qu’un Etat africain est capable de juger des crimes commis en Afrique contre des victimes africaines ».

"La CIJ a acté l’engagement solennel du Sénégal de maintenir Habré à la disposition de la justice. C,est une bonne nouvelle. Le Sénégal a pris un engagement politique, conforté désormais par une décision judiciaire, d’honorer ses obligations internationales. Il lui faut désormais aller de l’avant dans cette affaire avec tout le soutien requis de la communauté internationale", a déclaré Souhayr Belhassen, Présidente de la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH).

Rappel des faits :

Le 19 février dernier, la Belgique a porté plainte contre le Sénégal devant la CIJ, plainte qui vise à mettre un terme au feuilleton politico-judiciaire qui dure depuis près de 10 ans au Sénégal où l’ancien dictateur tchadien s’est réfugié depuis sa chute en 1990. La Belgique a demandé à la Cour d’ordonner au Sénégal de juger ou d’extrader Hissène Habré, tel que le lui a enjoint le Comité des Nations Unies contre la torture dans une décision de mai 2006.

En outre, la Belgique a demandé à la Cour d’ordonner des mesures conservatoires suite aux déclarations du Président du Sénégal, Abdoulaye Wade, menaçant de faire en sorte qu’Hissène Habré « abandonne le Sénégal » s’il n’obtenait pas rapidement de la communauté internationale l’intégralité du financement pour l’organisation du procès. A la fin du premier jour d’audience, le juge Christopher Greenwood, a demandé au Sénégal s’il acceptait de s’engager solennellement à maintenir Hissène Habré sur son territoire pendant toute la durée de la procédure devant la Cour et si la Belgique accepterait une telle declaration comme garantie suffisante à la sauvegarde deses droits, ce que la Belgique a accepté.

Dans l’ordonnance qu’elle a rendu aujourd’hui, la Cour a par ailleurs precisé que "la présente décision laisse également intact le droit de la Belgique de présenter à l’avenir une nouvelle demande en indication de mesures conservatoires fondée sur des faits nouveaux.

Rappelons que les fonds nécessaires au procès ont été estimés à plus de 27 millions d’euros par les autorités sénégalaises alors que le plan de travail sur lequel doit nécessairement reposer le budget n’a toujours pas été présenté.

La Communauté internationale a répondu à l’appel de soutien du Sénégal : l’Union européenne a déjà promis 2 millions d’euros, et d’autres pays se sont engagés, à titre individuel, à soutenir financièrement le Sénégal tels que la France, les Pays-Bas, la Suisse et la Belgique. Le Tchad a également promis 3 millions d’euros. Le Sénégal n’a toujours pas donné suite à ces offres.

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