Blogueurs et cyberdissidents derrière les barreaux : mainmise de l’État sur Internet au Vietnam

15/05/2013
Rapport
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Dans un rapport conjoint mis à jour ce mois-ci suite à une résolution du Parlement Européen dénonçant les violations des droits humains au Vietnam, la FIDH et son organisation membre, le Comité Vietnam pour la défense des droits de l’Homme, appellent à nouveau le gouvernement vietnamien à libérer les blogueurs et cyberdissidents emprisonnés et à respecter les principes de la liberté d’expression.

Le rapport de 64 pages, intitulé « Blogueurs et cyberdissidents derrière les barreaux : mainmise de l’État sur Internet au Vietnam », (pour lire le rapport en vietnamien, cliquer : ici) révèle que depuis 2010 les autorités vietnamiennes ont intensifié la répression contre les blogueurs et les cyberdissidents.

La FIDH et le Comité Vietnam pour la défense des droits de l’Homme ont identifié 32 blogueurs et cyberdissidents actuellement en détention, accusés ou condamnés à des peines de prison pour avoir mis en ligne des propos jugés "subversifs" par le gouvernement, mais qui ne sont que l’expression pacifique de leurs opinions.. Leurs peines de prison s’échelonnent de 2 à 16 ans d’incarcération.

Au cours des 12 derniers mois, 22 blogueurs et cyberdissidents ont été condamnés à un total de 133 ans de prison et 65 ans de détention préventive pour leur lutte non-violente sur le net. Le 9 janvier 2013, lors d’un même procès, 14 personnes ont été condamnées à un total de 100 ans d’emprisonnement pour avoir simplement exercé leur droit à la liberté d’expression.

Dix-sept des activistes actuellement emprisonnés, y compris 3 femmes, ont été condamnés en vertu de l’article 88 du Code pénal. Cet article, extrêmement répressif, prévoit une peine d’emprisonnement de 20 ans pour le crime, défini dans des termes vagues, de « propagande contre l’Etat ».

Selon Souhayr Belhassen, Présidente de la FIDH « Le Vietnam est connu pour son économie florissante et ses plages paradisiaques. La liberté d’expression y est bafouée dans l’indifférence de l’opinion internationale. Il s’agit pourtant de l’un des régimes les plus répressifs au monde en la matière. »

En septembre 2012, la politique de répression contre la liberté d’expression sur Internet a franchi une nouvelle étape : le Premier ministre a ordonné de punir toute personne critiquant le Parti Communiste et le gouvernement. Il a mentionné nommément trois blogs dissidents, dont le célèbre blog Danlambao (Journalisme des citoyens), qui publie des articles traitant notamment de politique et des droits de l’Homme.

Un nouveau décret sur Internet est en cours de préparation. En l’état, il n’est pas conforme aux normes internationales de protection des droits de l’Homme. Il dispose que les sociétés Internet et autres fournisseurs d’informations en ligne seront obligés par la loi de coopérer avec le gouvernement pour réprimer tout un éventail de « comportements interdits ». L’article 5 du décret rendra illégaux « tout accès et utilisation abusive d’Internet et de son contenu » qui « s’opposerait à la République Socialiste du Vietnam », et qui constituerait une « menace pour la grande unité du peuple » et « pour les belles coutumes et traditions de la nation ». L’article 25 exigera que toute information diffusée sur Internet soit censurée en vertu de l’article précité.

« Alors que le Vietnam aggrave la censure avec de nouvelles lois et réglementations, la répression policière, les emprisonnements, les intimidations, et même les agressions sexuelles, se multiplient contre les jeunes blogueurs pour les effrayer, et les réduire au silence et à l’auto-censure », a déclaré Vo Van Ai, Président du Comité Vietnam pour la Défense des Droits de l’Homme. « Une culture de la contestation a d’ores et déjà émergé au Vietnam grâce à Internet. Ces blogueurs et cyberdissidents ne sont pas, comme le prétend Hanoi, des « forces hostiles » cherchant à renverser le régime. Ce sont des patriotes vietnamiens qui mettent les nouvelles technologies au service des libertés et des droits du peuple. Le gouvernement ne pourra pas éradiquer ce mouvement simplement en mettant les blogueurs et les cyberdissidents derrière les barreaux ».

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