Lettre ouverte aux autorités françaises à la veille de la visite en France du président chinois

14/03/2014
Communiqué

Placer les droits humains au cœur des discussions

Cher Monsieur le Président,
Cher Monsieur le Premier Ministre,
Cher Monsieur le Ministre des Affaires Etrangères,

Le 14 mars 2014,

A quelques jours de la venue du Président chinois Xi Jinping pour sa première visite officielle en Europe, la Ligue des Droits de l’Homme (LDH), la Campagne Internationale pour le Tibet (ICT), et la FIDH vous exhortent à placer les droits humains au cœur de vos discussions, qui doivent être axées sur des résultats.

Nous déplorons en effet que la forte croissance économique qui a eu lieu en Chine au cours des dernières années n’a pas été accompagnée par des progrès significatifs dans les domaines de l’État de droit, de la lutte contre la corruption, du respect des droits l’homme et la démocratie ainsi que de l’environnement.

L’arrivée au pouvoir de M. Xi Jinping ne s’est pas traduite pour l’instant par de réels changements répondant aux espoirs des chinois. Au cours des dernières années, la situation des droits de l’homme s’est détériorée au lieu de s’améliorer, notamment pour ce qui concerne les libertés d’expression, de réunion et d’association. En outre, les défenseurs des droits de l’homme et les militants sont régulièrement victimes d’arrestations arbitraires et de disparitions forcées. Le contrôle d’internet et des médias reste omniprésent. Les droits des tibétains et ouïgours ont encore été réduits à la suite des manifestations dans les régions et le gouvernement continue à contrôler strictement leur pratique religieuse et plus généralement la jouissance de leur culture.

Des mesures prises récemment telles que l’abolition de la rééducation par le travail semblent être avant tout cosmétiques étant donné que les autorités ont recours à d’autres moyens de répression. La rhétorique du parti reste très négative quant aux droits humains et à la démocratie.

Tandis que cette année marque le 25ième anniversaire du massacre de la place Tiananmen et de l’imposition de la loi martiale à Lhassa, la violente répression et la militarisation du Tibet et du Xinjiang suggèrent qu’il n’y a pas de changement fondamental dans la manière avec laquelle les autorités réagissent aux manifestations pacifiques et aux demandes de réforme.

Votre prochaine rencontre avec le Président Xi Jinping représente une excellente occasion d’exprimer publiquement et en privé la profonde préoccupation de la France à propos de la détérioration de la situation des droits de l’homme en Chine et au Tibet. Nous vous demandons de transmettre le message au Président Xi que la politique actuelle du gouvernement chinois sur les droits de l’homme est inacceptable et constitue une menace pour les relations bilatérales.

En particulier, et conformément à l’engagement pris par l’Union européenne de promouvoir les valeurs des droits de l’homme et la démocratie dans son action extérieure, nous vous invitons à appeler le Président Xi à :

  • Supprimer les restrictions sur la liberté d’information et d’expression, y compris concernant internet, et mettre fin au harcèlement des journalistes et des blogueurs ;
  • Ratifier le Pacte international relatif aux droits civils et politiques ;
  • Amender les lois sécuritaires concernant la définition des « crimes » de « mise en danger de la sécurité de l’État » visant à éviter « le complot, l’organisation, la réalisation d’activités ayant pour but de diviser la nation et de saboter l’unité nationale », lois qui sont arbitrairement appliquées à des exercices pacifiques de la liberté de expression et de réunion ;
  • Libérer toutes les personnes détenues pour le simple exercice de leurs droits fondamentaux ou pour avoir protesté pacifiquement contre les mesures répressives chinoises, notamment Xu Zhiyong, Liu Xiaobo, Ilham Tohti, Dhondup Wangchen, et d’autres défenseurs des droits humains et des militants ;
  • S’attaquer aux causes profondes du mécontentement populaire dans le Xinjiang et au Tibet, qui ont abouti à l’actuelle vague d’auto-immolations de tibétains ;
  • Reprendre le dialogue sino-tibétain qui est au point mort depuis 2010, afin de contribuer à une solution durable de la crise au Tibet et à l’amélioration de la situation des droits des Tibétains.

Nous vous remercions pour votre attention et espérons que vous pourrez nous maintenir informés de la teneur de vos discussions avec le Président Xi Jinping concernant les droits de l’homme.

Sincèrement,

Karim Lahidji, Président FIDH
Matteo Mecacci, Président ICT
Pierre Tartakowsky, Président LDH

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