Colombie : des victimes laissées sans réponses par la Cour pénale internationale (CPI)

21/07/2023
Déclaration
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Raul ARBOLEDA / AFP

Le 22 juillet 2023 marque l’anniversaire de la décision de la CPI exhortant son Procureur à expliquer, sans délai, les motifs de sa décision de clore l’examen préliminaire de la situation en Colombie. Ces explications étaient dues aux personnes ayant fourni des informations à la Cour, tandis qu’aucune enquête n’a été ouverte.

Bogota, Paris, La Haye, 21 juillet 2023. La Fédération internationale pour les droits humains (FIDH) et le Colectivo de Abogados y Abogadas José Alvear Restrepo (CAJAR) rappellent l’importance de la transparence dans le processus de prise de décision du Procureur et d’une démarche de communication et d’information envers les victimes et la société civile. Pendant plus de 15 ans, ces victimes ont transmis des informations de première main au Bureau du Procureur sur les crimes internationaux commis en Colombie et les faiblesses des réponses apportées par le système judiciaire national.

La FIDH et le CAJAR, représentant des victimes colombiennes de crimes contre l’humanité, avaient demandé en avril 2022 à la Chambre préliminaire de la CPI de révoquer la décision du Procureur et de rouvrir l’examen préliminaire de la situation en Colombie dans l’intérêt des victimes et de la justice. À titre subsidiaire, les organisations avaient également requis qu’il soit ordonné au Procureur d’informer les victimes et la communauté internationale des motifs de cette fermeture, les raisons de sa décision n’étant pas mentionnées dans les informations disponibles.

FIDH and CAJAR, representing Colombian victims of crimes against humanity, had requested the Pre-Trial Chamber of the ICC to revoke the Prosecutor’s decision and reopen the preliminary examination for the situation in Colombia in the interests of victims and justice. In the alternative, they also requested that the Prosecutor be ordered to communicate to the victims and the international community the reasons for the closure, since the information available did not provide the reasons for his decision.

Le 22 juillet 2022, la Chambre préliminaire I de la CPI a reconnu que le Bureau du Procureur n’avait pas suffisamment informé les victimes et leurs représentant·es quant aux motifs de la clôture. Étant donné que l’examen préliminaire de la situation en Colombie a duré plus de 15 ans, la Chambre a estimé que cela suscitait des attentes chez les personnes qui ont fourni des informations au Bureau du Procureur. Sur la base de ces considérations, la Chambre a ordonné au Procureur de la CPI de donner rapidement aux victimes et aux organisations les représentant des informations complémentaires sur les raisons de la fermeture, conformément à l’article 15.6 du Statut de Rome.

Un an plus tard, le Bureau du Procureur ne s’est toujours pas conformé à cette ordonnance.

Malgré de brèves déclarations à l’occasion des quelques visites du Procureur de la CPI en Colombie consacrées à la question de la coopération avec les autorités nationales, les raisons pour lesquelles le Procureur a clos l’examen préliminaire de la situation en Colombie restent floues. Ce silence conforte la position de la FIDH et du CAJAR quant à la nécessité de maintenir l’examen préliminaire ou de le rouvrir. En Colombie, bien que la Juridiction Spéciale pour la Paix (JEP) a fait quelques progrès dans la lutte contre l’impunité des responsables de crimes internationaux, les résultats sont insuffisants pour justifier la clôture de l’examen préliminaire et ne permettent pas de procéder à la poursuite des principaux responsables d’exactions sur le sol colombien, qui n’entrent pas dans le champs de compétence de la JEP à ce jour. La FIDH et le CAJAR estiment que le travail de la JEP pourra être apprécié à sa juste mesure lorsqu’il y aura suffisamment d’informations témoignant du respect des droits des victimes au sein de cette jurisdiction.

En outre, la clôture de l’examen préliminaire est problématique, tandis que le conflit armé et la violence socio-politique persistent en Colombie. Par conséquent, des crimes internationaux continuent d’être commis - notamment l’assassinat systématique de défenseurs des droits humais et de signataires de l’Accord de Paix, le recrutement d’enfants, les déplacements forcés et la séquestration - et ne font pas l’objet d’enquêtes et de poursuites adéquates au niveau national.

Enfin, la FIDH et le CAJAR considèrent qu’une année entière sans réponse du Procureur de la CPI constitue un délai plus que raisonnable pour que le Procureur se conforme à l’ordonnance de la Chambre préliminaire I de la CPI. Une réponse effective est toujours attendue.

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