Discours de Souhayr Belhassen

à l’occasion de la publication du rapport "Démobilisation des paramilitaire en Colombie : sur le chemin de la Cour pénale internationale (en espagnol)"

Cheres amies, Chers amis,

Je veux, au nom de la FIDH, vous remercier d’etre ici aujourd’hui avec nous. C’est la prémière visite officielle que j’entreprends aux Ameriques comme présidente de la FIDH. Je voulais venir en Colombie pour répondre à l’invitation de la Corporación Colectivo de abogados José Alvear Restrepo (CCAJAR) et du Comité permanent pour la défense des droits de l’Homme et vous témoigner ainsi l’attention constante de la FIDH pour la situation en Colombie : l’une des plus graves au monde de notre point de vue.

Cela fait plus de 40 ans que la Colombie est plongée dans une situation de conflit armé interne et que le peuple colombien en souffre. Les parties au conflit ne respectent pas le droit international humanitaire, les droits de l’homme sont quotidiennement bafoués - les syndicalistes et défenseurs des droits de l’homme étant une cible privilégiée - et les crimes, y compris contre l’humanité, restent le plus souvent impunis.
Au vu de cette situation, la FIDH concentre son travail autour de deux axes : la lutte contre l’impunité et la protection des défenseurs des droits de l’homme.

La mission internationale que nous réalisons ces jours-ci, Antoine Bernard, Directeur Exécutif de la FIDH, Luis Guillermo Pérez Casas, Secrétaire Général, Mariana Pena, qui nous représente auprès de la Cour pénale internationale et moi-même, a un double objet : la présentation d’un rapport d’étape de la FIDH sur la Loi Justice et Paix ; et l’actualisation des données en notre possession.

La FIDH a commencé à manifester sa préoccupation au sujet de cette loi en août 2005, alors qu’elle n’en était qu’au stade du projet et depuis, la FIDH et ses ligues n’ont cessé de dénoncer la loi qu’elles considèrent comme une sorte de contrat d’impunité au regard des obligations internationales de la Colombie en matière de répression des crimes contre l’humanité. Plusieurs missions ont été organisées sur ce thème. La FIDH a pu suivre les audiences de « version libre », de mai à juillet 2007, depuis les salles réservées aux victimes ; plusieurs avocats de la CCAJAR assistent également celles-ci.

Au stade de cette évaluation préliminaire, le constat que nous faisons est sévère. Nous avons pu constater combien la quête de vérité, de justice et de réparation aboutit à nombre de frustrations et, in fine, à une sorte de double victimisation. Nous avons pu encore le vérifier avant-hier à Barranquilla, à l’occasion d’une audience de version libre. C’est également ce que j’ai retiré des témoignages poignants de près d’une quarantaine d’ONG de tous les secteurs de la société, que nous avons entendus à l’occasion de notre mission.

La Colombie est partie au Statut de Rome de 1998, sur la Cour pénale internationale (CPI). Les régles posées par celui-ci imposent une conclusion : la Loi Justice et Paix et ses modalités de mise en oeuvre, s’agissant de crimes contre l’humanité, relève bien de la compétence de CPI. Nous considérons qu’il est de l’intérêt de la Colombie de développer une étroite coopération avec la CPI.

Notre mission a aussi permis d’affiner et d’actualiser notre vision et notre analyse de la situation. Nous voulons remercier chaleureusement toutes les ONG qui ont échangé avec nous, les organisations intergouvernementales, mais aussi les institutions publiques qui pour la plupart nous ont réservé un accueil constructif et approfondi.

Un fait majeur est intervenu ces derniers mois : environ 80 000 victimes ont en effet manifesté leur volonté de participer au processus. C’est dire l’espoir immense qu’il suscite ; c’est surtout dire l’aspiration profonde des victimes aux droits à la vérité, à la justice et à réparation. C’est dire aussi l’immense responsabilité qui pèse sur les pouvoirs publics colombiens, qui ont l’obligation d’y répondre.

Autre fait majeur que nous avons constaté : la mobilisation de la magistrature, et en particulier des institutions comme la Cour constitutionnelle, mais aussi la Cour suprême et la Fiscalía Générale de la Nation. Certains magistrats s’engagent ainsi, parfois au péril de leur vie, à lutter contre l’impunité conformément aux normes internationales. Nous voulons ici leur rendre hommage, autant qu’à ces familles de victimes, aux avocats et aux autres défenseurs des droits de l’Homme, qui prennent des risques considérables au quotidien.

Nous considérons la protection des victimes, aujourd’hui inexistante, comme une condition de leur participation effective ; et un enjeu majeur de l’approfondissement de ce processus.

Je passe à présent la parole à notre Secrétaire Général, Luis Guillermo Perez, pour la présentation rapide de notre rapport.

Seguimos en la lucha, seguiremos adelante !

Souhayr Belhassen, présidente de la FIDH

Lire la suite