République démocratique du Congo : Menaces et accusations proférées à l’encontre de M. Dismas Kitenge

08/07/2013
Appel urgent
RDC

L’Observatoire a été informé de menaces et accusations proférées à l’encontre de M. Dismas Kitenge, président du Groupe Lotus et vice président de la FIDH.

L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme, programme conjoint de la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) et de l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT), vous prie d’intervenir de toute urgence sur la situation suivante en République démocratique du Congo (RDC).

Description de la situation :

Selon les informations reçues, le 13 juin 2013, le conseiller juridique du Gouverneur de la Province orientale a lancé sur sa page Facebook une campagne de dénigrement contre M. Dismas Kitenge, l’accusant d’être « une marionnette des occidentaux » et d’être « manipulé par les politiciens », et l’avertissant notamment du fait que le Gouverneur allait le « corriger ».

La veille, un autre conseiller du Gouverneur avait envoyé un message téléphonique à M. Faustin Edjabo, journaliste à Canal Congo Télévision - Radio Liberté, dans lequel il menaçait M. Dismas Kitenge de poursuites judiciaires, le qualifiant de « "détourneur" des fonds des occidentaux ».

Ces menaces et accusations font suite à la participation de M. Kitenge, le 11 juin 2013, à l’émission « Polele Polele » (« Parlons en toute vérité ») diffusée sur Canal Congo Télévision - Radio Liberté, dans laquelle ce dernier avait fait part de son analyse quant au bilan « mitigé » des réalisations des 100 jours du Gouverneur de la province sur le plan des droits de l’Homme et de la gouvernance démocratique au niveau local.

Postérieurement, les 2 et 4 juillet 2013, dans l’émission « Face au peuple » diffusée deux fois par semaine sur la chaîne de la Radiotélévision Nationale/Kisangani (RTNC), certains membres du gouvernement provincial ainsi que des conseillers du Gouverneur ont par ailleurs demandé à la population de ne pas suivre les « soit disant acteurs de la société civile et défenseurs des droits humains dans leurs messages de distraction, de division et de nostalgie », alors que ces derniers étaient « tout le temps à l’étranger » et que « leur train de vie contrast[ait] avec le discours qu’ils tiennent régulièrement à la presse ».

L’Observatoire a en outre été informé du fait que dans la nuit du 24 au 25 juin 2013, vers deux heures du matin, un groupe d’individus non identifiés a jeté des pierres sur le domicile de M. Kitenge, en promettant de s’attaquer à quiconque tenterait de saboter les actions de développement du Gouverneur, et de revenir pour une « action musclée ». Le 26 juin, une plainte contre X a été déposée pour violation de domicile, menaces, attaque a main armée, violences et voies de fait, mais aucune avancée n’a pour l’heure été réalisée. Cependant, le 27 juin, le Parquet général a invité M. Kitenge dans le cadre d’une information judiciaire sur l’incendie de son domicile, intervenue le 7 janvier 2012[1], bien que tous les témoins aient déjà été entendus et que cette affaire n’ait jamais connu d’évolution depuis.

L’Observatoire s’inquiète des menaces et accusations proférées à l’encontre de M. Kitenge, en ce qu’elles ne semblent viser qu’à sanctionner ses activités de défense des droits de l’Homme.

Actions requises :

L’Observatoire vous prie de bien vouloir écrire aux autorités congolaises en leur demandant de :

i. Garantir en toutes circonstances l’intégrité physique et psychologique de M. Dismas Kitenge et de l’ensemble des défenseurs des droits de l’Homme en République démocratique du Congo ;

ii. Mener sans délais une enquête exhaustive, indépendante, effective, rigoureuse, impartiale et transparente quant aux menaces et accusations décrites ci-dessus, afin d’identifier les responsables, de les traduire devant un tribunal indépendant, compétent et impartial conformément aux instruments internationaux et régionaux de protection des droits de l’Homme, et d’appliquer les sanctions pénales, civiles et/ou administratives prévues par la loi ;

iii. Mettre un terme à toute forme de harcèlement à l’encontre de M. Dismas Kitenge ainsi que de l’ensemble des défenseurs des droits de l’Homme en RDC ;

iv. Se conformer aux dispositions de la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’Homme, adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies le 9 décembre 1998, et plus particulièrement :
 son article 1 qui stipule que “chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres, de promouvoir la protection et la réalisation de tous les droits de l’Homme et de toutes les libertés fondamentales aux niveaux national et international” ;
 son article 6 qui stipule que “chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres : a) De détenir, rechercher, obtenir, recevoir et conserver des informations sur tous les droits de l’homme et toutes les libertés fondamentales en ayant notamment accès à l’information quant à la manière dont il est donné effet à ces droits et libertés dans le système législatif, judiciaire ou administratif national ; b) Conformément aux instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme et autres instruments internationaux applicables, de publier, communiquer à autrui ou diffuser librement des idées, informations et connaissances sur tous les droits de l’homme et toutes les libertés fondamentales ; c) D’étudier, discuter, apprécier et évaluer le respect, tant en droit qu’en pratique, de tous les droits de l’homme et de toutes les libertés fondamentales et, par ces moyens et autres moyens appropriés, d’appeler l’attention du public sur la question” ;
 et son article 12.2 qui prévoit que “l’Etat prend toutes les mesures nécessaires pour assurer que les autorités compétentes protègent toute personne, individuellement ou en association avec d’autres, de toute violence, menace, représailles, discrimination de facto ou de jure, pression ou autre action arbitraire dans le cadre de l’exercice légitime des droits visés dans la présente Déclaration” ;

v. Plus généralement, se conformer aux dispositions de la Déclaration universelle des droits de l’Homme et instruments régionaux et internationaux relatifs aux droits de l’Homme ratifiés par la RDC.

Adresses :

· S.E M. Joseph Kabila, Président de la République, Cabinet du Président de la République, Palais de la Nation, Kinshasa/Gombe, République Démocratique du Congo, Fax +243 88 02 120

· M. Richard MUYEJ MANGEZ, Ministre de l’Intérieur et Sécurité, Email : adolumanu@yahoo.fr

· Madame Wivine MUMBA MATIPA, Ministre de la Justice et des Droits Humains, BP 3137, Kinshasa Gombé, République Démocratique du Congo, Email : minjustdh@gmail.com

· Mission permanente de la République démocratique du Congo auprès des Nations unies, Avenue de Budé 18, 1202 Genève, Suisse, Email : missionrdc@bluewin.ch, Fax : +41 22 740.16.82

· S.E. M. Henri Mova Sakanyi, Ambassadeur, Ambassade de la République démocratique du Congo à Bruxelles, 30 Marie de Bourgogne, 1000 Bruxelles, Belgique. Email : secretariat@ambardc.eu. Fax : + 32.2.213.49.95

Prière d’écrire également aux représentations diplomatiques de la RDC dans vos pays respectifs.

***
Paris-Genève, le 8 juillet 2013

Merci de bien vouloir informer l’Observatoire de toutes actions entreprises en indiquant le code de cet appel.

L’Observatoire, programme de la FIDH et de l’OMCT, a vocation à protéger les défenseurs des droits de l’Homme victimes de violations et à leur apporter une aide aussi concrète que possible.

Pour contacter l’Observatoire, appeler La Ligne d’Urgence :
· E-mail : Appeals@fidh-omct.org
· Tel et fax FIDH : 33 1 43 55 25 18 / 33 1 43 55 18 80
· Tel et fax OMCT : + 41 22 809 49 39 / 41 22 809 49 29

[1] Cf. appel urgent de l’Observatoire COD 001 / 0112 / OBS 002.

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