Déclaration commune sur les massacres de Gatumba

18/08/2004
Communiqué

La lutte contre l’impunité est une exigence pour le Burundi

1. Les organisations signataires ont été profondément choquées par le massacre perpétré contre les réfugiés congolais de la tribu des Banyamulenge à Gatumba, en commune de Mutimbuzi, province de Bujumbura rural dans la nuit du 13 au 14 août 2004.

2. Le massacre a débuté aux environs de 22h par des personnes armées de grenades, d’armes à feu, d’armes blanches et d’essence. Selon des témoignages recueillis, les assaillants parlaient plusieurs langues dont le Kiswahili, le Kinyarwanda, le Kirundi et le Lingala. Ces actes criminels ont été revendiqués depuis par le mouvement rebelle burundais FNL-PALIPEHUTU de Rwasa Agathon.

3. Plus de 160 Banyamulenge dont des femmes et des enfants ont été sauvagement tués à l’arme à feu et à l’arme blanche, certains ont même été brûlés vifs dans leurs abris de fortune. L’attaque a également fait plus de 130 blessés dont certains sont dans un état grave.

4. Nos organisations condamnent avec la plus grande fermeté ces massacres, exigent que leurs auteurs soient jugés et expriment leur sympathie et solidarité avec les victimes rescapées.

5. Nos organisations déplorent qu’en dépit des menaces qui pesaient sur eux, les victimes n’aient pas pu être secourues à temps malgré la présence d’un camp des forces de l’ordre situé à quelques mètres du lieu du crime.

6. Les mêmes organisations regrettent que le camp de ces réfugiés congolais ait été installé à quelques kilomètres de la frontière congolaise, et cela pendant plus de deux mois, alors que le Gouvernement et le HCR devaient leur choisir un site plus éloigné et mieux protégé.

7. Nos organisations rappellent que le massacre de Gatumba s’ajoute à une longue liste d’autres crimes impunis hypothéquant un peu plus l’Etat de droit au Burundi.

8. De surcroît, cet acte rappelle combien il est urgent pour le Burundi et la communauté internationale de respecter dans les délais impartis les engagements pris dans les accords d’Arusha, qui prévoient notamment la mise en place d’une la commission internationale d’enquête chargée de qualifier les crimes commis depuis 1962. Cette commission demandée par les autorités nationales est déterminante dans la lutte contre l’impunité des crimes commis au Burundi puisqu’en cas de qualification de crime de génocide et de crime contre l’humanité, elle doit demander l’établissement d’un tribunal pénal international à l’image de ceux pour le Rwanda ou l’ex-Yougoslavie.

9. Les organisations rappellent que sans la lutte contre l’impunité, le processus de paix au Burundi devient une coquille vide et l’édification de l’Etat de droit est une utopie.

10. En conséquence, les organisations signataires de cette déclaration recommandent :

Au Gouvernement de transition du Burundi

· De mettre sur pied une commission nationale d’enquête indépendante sur le massacre de Gatumba et de rendre son rapport public dans un délai ne dépassant pas un mois ;

· De tout mettre en œuvre pour assurer la protection des citoyens et des étrangers se trouvant dans le pays, conformément aux dispositions des instruments régionaux et internationaux relatifs aux droits humains qui lient le Burundi ;

· D’honorer les engagements pris en matière de lutte contre l’impunité, en ratifiant notamment, et sans délais le Statut de la Cour Pénale Internationale en vue de dissuader la réédition des massacres comme celui de Gatumba.

Au Gouvernement congolais

· D’assurer la sécurité des citoyens, en particulier celle des minorités notamment les Banyamulenge régulièrement victimes d’actes de violence et de discrimination en RDC ;

· De mettre sur pied une commission nationale d’enquête indépendante sur le massacre de Gatumba et de rendre public son rapport dans un délai ne dépassant pas un mois ;

· D’informer le procureur de la Cour pénale internationale des conclusions du rapport de la commission, afin que ce dernier, enquête sur le massacre des Congolais Banyamulenge, à Gatumba.

Au Conseil de sécurité des Nations-unies

· De traduire dans les actes sa décision d’envoyer une mission des Nations unies chargée de faire la lumière sur ces événements et d’identifier les auteurs de ces crimes afin qu’ils soient jugés conformément au droit à un procès équitable comme l’a exprimé le Secrétaire Général des Nations-unies, Koffi Annan ;

· D’arrêter des stratégies de protection des civils contre les exactions des forces combattantes (gouvernementales ou rebelles) en RDC et au Burundi en s’appuyant sur les structures de la MONUC et de l’ONUB ;

· De mettre rapidement en place la Commission internationale d’enquête prévue par les Accords d’Arusha.

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