La révolte d’une population étouffée

09/01/2011
Communiqué

La Fédération internationale des droits de l’Homme (FIDH) et ses organisations membres en Algérie, la Ligue algérienne pour la défense des droits de l’Homme (LADDH) et le Collectif des familles de disparus en Algérie (CFDA) expriment leurs vives préoccupations face à la monté de la violence des protestations sociales qui secouent le pays depuis mercredi 5 janvier 2011. Ce soulèvement populaire, mené essentiellement par des jeunes, et qui s’est étendu à toutes les régions d’Algérie, a fait trois victimes par balle, des centaines de blessés parmi les jeunes contestataires et les forces de sécurité. Plus de 1000 manifestants auraient en outre été arrêtées selon le Ministère de l’Intérieur.

L’annonce, début janvier, de l’augmentation drastique, allant jusqu’à 30%, des prix de denrées de première nécessité telles la farine, l’huile et sucre, a été le déclencheur d’une colère accumulée depuis une dizaine d’année.
La population algérienne vie depuis déjà plusieurs années au rythme des émeutes locales contre la mal vie, le chômage et l’exclusion.

La FIDH et ses organisations membres rappellent que la situation économique et sociale de l’Algérie était gravement préoccupante depuis plusieurs mois. Nos organisations avaient publié, en avril 2010, un rapport intitulé « La mal vie : situation des droits économiques, sociaux et culturels en Algérie » ( http://www.fidh.org/La-mal-vie-rapport-sur-les-droits-economiques ) dans lequel elles mettaient en avant les risques d’un soulèvement d’une population en manque de perspective.

L’ire de la population est en outre attisée par les scandales de corruption en série qui touchent les institutions de l’État, et par l’incapacité du gouvernement à répondre aux besoins de la population en matière d’accès au logement, à l’éducation et à la santé, alors que le pays enregistre, grâce à l’exportation des hydrocarbures, des réserves de change de l’ordre de 155 milliards de dollars.

Nos organisations notent que ces évènements se produisent au moment même où la Tunisie voisine est elle aussi en proie à une révolte sociale violemment réprimée. Ces révoltes expriment avant tout l’exaspération de la population muselée par les restrictions des libertés fondamentales ; elles sont également symptomatiques de la situation exsangue des populations dans un certain nombre de pays de la région du Maghreb, et du sort qui est fait aux droits politiques, économiques, sociaux et culturels par les régimes en place.

La FIDH, la LADDH et le CFDA appellent le gouvernement algérien :

 à apporter une réponse mesurée aux manifestations,

 à remettre en liberté les personnes arrêtées durant les manifestations et contre lesquelles aucune charge n’est retenue,

 à mettre effectivement en place de mesures de nature à calmer la révolte actuelle,

 à permettre l’expression pacifique des revendications de la population par la levée des lois restrictives, notamment l’état d’urgence.

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