LETTRE OUVERTE AUX ACTIONNAIRES - AG 17 mai 2005

17/05/2005
Communiqué

Pourquoi le Collectif « Total pollue la démocratie » demande-t-il le retrait de Total de Birmanie ?

Pourquoi la Birmanie ?

En Birmanie, les violations des droits de l’Homme perpétrées par la dictature birmane sont quotidiennes. Privés du droit de choisir leur propre gouvernement, les Birmans voient leurs libertés les plus fondamentales bafouées - recours au travail forcé, violations des libertés d’expression, de réunion, d’association, ou encore des droits à la santé et à l’éducation. Prix Nobel de la Paix 1991, Aung San Suu Kyi, chef de file des démocrates birmans, a au total été privée de liberté pendant plus de neuf ans, après que, sa formation politique (LND) a été privée des fruits de la victoire électorale obtenue dans les urnes lors les élections de 1990. La Birmanie compte actuellement 1 300 prisonniers politiques. La junte, au pouvoir depuis le coup d’état militaire de 1988, soumet la population birmane à une répression sévère afin de se maintenir au pouvoir coûte que coûte.

Pourquoi Total en particulier ?
L’investissement de Total en Birmanie contribue à maintenir le régime militaire en lui fournissant une source importante de devises, outre une caution morale et politique.

Les contrats passés par Total avec la junte militaire comptent parmi les plus importants pour la Birmanie. Comme Madame Aung San Suu Kyi l’indiquait en 1996 « Total est devenu le premier soutien du régime militaire birman ». Les revenus annuels de ce projet sont, depuis 1998, estimés entre 200 à 450 millions de dollars, soit environ 7% du budget estimé de l’Etat birman. Ces revenus constituent pour la junte un soutien direct qui lui permet d’accroître son arsenal militaire, dont elle se sert notamment pour opprimer le peuple birman. Les arguments selon lesquels les investissements étrangers contribueraient au développement sont inopérants en l’espèce dans la mesure où la junte utilise les fonds publics de manière non-transparente, en privilégiant ses objectifs militaires au détriment des dépenses en matière de santé et d’éducation.

La poursuite des activités de Total en Birmanie a contribué à protéger la junte birmane d’une politique plus ferme de l’Union européenne : jusqu’à présent, les sanctions européennes ne s’étendent pas aux secteurs de l’économie qui rapportent le plus à la junte, telles les exploitations de gaz et de pétrole. Le refus de la part de la France de renforcer ces sanctions de manière significative s’explique en effet par le souci de protéger les investissements français en Birmanie - c’est-à-dire la présence de Total dans ce pays.

Par ailleurs, il convient de rappeler que le chantier du gazoduc de Yadana, fruit d’une joint venture entre Total, Unocal, la MOGE (entreprise d’Etat birmane) et la PTT-EP (Compagnie d’état thaïlandaise), a occasionné entre 1995 et 1998 du travail forcé pratiqué par l’armée birmane, laquelle a fortement militarisé la zone où la présence de ses bataillons a été multipliée par dix. Total a toléré cette situation et en a tiré bénéfice même après avoir pris connaissance des exactions commises par l’armée. Le chantier a par ailleurs occasionné des déplacements de populations et forcé à l’exil des centaines de villageois. A cette époque, les militaires (à travers l’entreprise gazière et pétrolière « Myanmar Oil and Gas Enterprise (MOGE) ») avaient été engagés par Total pour sécuriser le tronçon intermédiaire du gazoduc. Ces violations sont largement documentées.

Actuellement, deux procès sont en cours à cet égard, l’un en France et l’autre en Belgique. Un troisième procès, entamé aux Etats-Unis contre Unocal, le partenaire californien de Total sur le gazoduc de Yadana, a débouché sur un règlement amiable, Unocal ayant été forcée d’accepter de verser une compensation aux victimes à la suite des révélations faites au cours de cette procédure. Total met en avant les programmes qu’elle a mis en œuvre aux alentours du pipeline de Yadana dans le domaine l’éducation, de la santé, etc. en Birmanie. Néanmoins, ces programmes ne peuvent compenser les dommages engendrés par le projet « Yadana » dans son ensemble.

Que devrait faire Total ? Que se passera-t-il si Total se retire de Birmanie ?
Pour éviter de soutenir et de légitimer (à la fois financièrement, politiquement et moralement) l’une des pires dictatures du monde, Total devrait se retirer de Birmanie. En mars 2005, l’OIT a « réactivé » les mesures exceptionnelles adoptées par elle en 2000 recommandant "aux organismes des Nations unies, aux Etats et aux sociétés privées de revoir leurs relations avec la Birmanie afin de ne pas encourager le recours au travail forcé". Total doit tenir compte de ces recommandations.

A cela, il est parfois rétorqué que des entreprises asiatiques pourraient prendre la place de Total avec des effets encore plus graves pour le peuple birman. Or ces entreprises ne seraient pas moins complices des crimes contre l’humanité commis en Birmanie - c’est ainsi que l’OIT qualifie le travail forcé opéré à grande échelle - que ne l’est aujourd’hui Total, la compagnie dont vous êtes actionnaire. Tolérerions-nous d’ailleurs que des entreprises françaises acceptant le travail des enfants sous prétexte que des concurrents, soumis à des normes juridiques moins contraignantes ou à une éthique moins exigeante, y recourraient ?

Quand Total se sera retirée de Birmanie, elle pourra tirer les conséquences de cet épisode ; fonder une nouvelle image sur le respect des droits de l’homme et leur promotion ; devenir ce qu’elle ne sera pas tant que sa complicité demeure avec l’un des régimes les plus criminels du monde : une entreprise citoyenne et digne de votre confiance. Cet investissement est, sur le moyen terme, de très loin le plus rentable.

Que pourraient faire les actionnaires de Total ?

Les actionnaires peuvent exiger que Total fournisse des informations complètes sur ses activités en Birmanie, y compris les montants des contrats passés avec la junte. A cet effet, les actionnaires peuvent utiliser leur droit de poser des questions aujourd’hui. Les actionnaires peuvent écrire à la direction pour exiger le retrait de Total de Birmanie.

La campagne

La campagne « Total pollue démocratie » a été mise en place par un collectif d’ organisations non-gouvernmentales, des syndicats et d’autres organisations concernées par les questions relatives aux droits de l’Homme, la démocratie et la responsabilité des entreprises. Le collectif fait partie d’un collectif international qui exige le retrait de Total de Birmanie. Le collectif a commencé ses actions en décembre 2004 et la campagne est d’une durée indéterminée, jusqu’au retrait effectif de Total de Birmanie.


Coordonnées de la campagne

Info Birmanie
9, passage Dagorno
75020 Paris - France
tel : +33 1 44 93 93 57
http://www.info-birmanie.org

Ligue des droits de l’Homme
138, rue de Marcadet
75018 Paris - France
tel : +33 1 56 55 51 00 / fax : +33 1 42 55 51 21
http://www.ldh-france.org

Fédération Internationale des Ligues des Droits de l’Homme
International Federation for Human Rights - FIDH
17, passage de la Main d’Or
75011 Paris - France
tel : +33 1 43 55 25 18 / fax : +33 1 43 55 18 80
http://www.fidh.org

La site de la campagne : http://www.fidh.org/_template/2005/Total%20Burma/


Si vous souhaitez plus d’informations, veuillez remplir le formulaire suivant et l’envoyer à l’une des adresses ci-dessus :


Je souhaite plus d’informations sur la campagne « Total pollue la démocratie »

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