Commission d’enquête sur les événements de février 2008 et ses conséquences

10/09/2008
Rapport

Le rapport de la Commission nationale d’enquête épingle l’Etat tchadien pour sa responsabilité dans la disparition de l’opposant politique Ibni Oumar Mahamat Saleh et autre violations perpétrés en février 2008

La Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) et ses organisations membres au Tchad, la Ligue tchadienne des droits de l’Homme (LTDH) et l’Association tchadienne pour la promotion et la défense des droits de l’Homme (ATPDH) se félicitent de la publication du rapport de la Commission d’enquête chargée de faire la lumière sur les événements survenus au Tchad du 28 janvier au 8 février 2008. [1]

Aux fins d’enquêter sur les graves violations des droits de l’Homme perpétrées à la suite de la tentative de coup d’État au Tchad le 2 février 2008 [2] , une Commission d’enquête, composée entre autres d’observateurs internationaux et d’organisations indépendantes de la société civile, avait été mise en place par les autorités tchadiennes. La FIDH, la LTDH et l’ATPDH saluent le travail de cette Commission et se réjouissent que les autorités tchadiennes aient publié son rapport.

Dans le cadre de ses travaux, la Commission d’enquête avait souhaité auditionner la FIDH aux fins de recueillir les informations dont elle disposait sur les cas de violations des droits de l’Homme. [3] Les conclusions et recommandations issues du rapport de la Commission d’enquête reflètent largement les préoccupations soulevées lors de cette audition par la FIDH et ses organisations membres.

Selon le rapport « l’armée tchadienne s’est rendue responsable [...] - de l’utilisation disproportionnée et indiscriminée de la force [...] en violation du droit international humanitaire, dans des sites non militaires et parmi les populations civiles », « des enlèvements et des arrestations, des actes d’intimidation à l’encontre des opposants politiques ont eu lieu après le retrait des rebelles de N’Djaména ; [ce qui] met clairement en cause la responsabilité des Forces de défense et de sécurité ». À ce propos, selon ce rapport, « on peut également en inférer à la responsabilité de l’État tchadien ». La responsabilité de l’Etat tchadien est retenue aussi par la Commission dans la disparition forcée de l’opposant politique M. Ibni Oumar Mahamat Saleh, confirmant ainsi les informations selon lesquelles il avait été arrêté par des militaires loyalistes. La FIDH, la LTDH et l’ATPDH déplorent cependant que la Commission n’ait pu apporter aucun élément nouveau sur le sort de l’opposant politique après son arrestation. Nos organisations appellent par conséquent les autorités tchadiennes à faire toute la lumière sur les circonstances exactes de cette disparition forcée et sur les responsabilités spécifiques des plus hautes autorités militaires. En outre, la Commission a conclu à la responsabilité des forces gouvernementales mais aussi des rebelles dans les nombreux cas de viols commis à l’encontre des femmes et des jeunes filles et dans les actes de torture et de détentions arbitraires.

La FIDH, la LTDH et l’ATPDH regrettent cependant que les commanditaires et auteurs des exécutions sommaires n’aient pu être identifiés et appellent les autorités tchadiennes à mettre pleinement en oeuvre les recommandations de la Commission, en particulier :

 engager des poursuites contre les responsables de ces exactions ;

 mettre en place un mécanisme d’indemnisation et de réparation des dommages subis par les victimes ;

 créer un Comité de suivi chargé de veiller à la mise en oeuvre effective des recommandations de la Commission composé notamment des organisations de la société civile nationales et indépendantes et de membres de la Commission d’enquête ;

Il est également important que les autorités tchadiennes diffusent le plus largement possible les recommandations de la Commission d’enquête qu’elles ont elles-mêmes mis en place. « Nous espérons vivement que la publication de ce rapport pourra constituer un premier pas vers le rétablissement de l’État de droit au Tchad. Ceci passe nécessairement pas la mise en oeuvre effective des recommandations de la Commission et plus généralement par le respect des droits fondamentaux garantis par les instruments régionaux et internationaux de protection des droits de l’Homme » a déclaré Souhayr Belhassen, Présidente de la FIDH.

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