Actes d’effraction au domicile de M. Khemais Ksila - TUN 002 / 0511 / OBS 076

16/05/2011
Appel urgent

L’Observatoire a été informé par des sources fiables d’actes d’effraction au domicile de M. Khemais Ksila, secrétaire général de la Ligue tunisienne des droits de l’Homme (LTDH).

L’Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l’Homme, programme conjoint de la Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) et de l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT), vous prie d’intervenir sur la situation suivante en Tunisie.


Description de la situation :

Selon les informations reçues, le 11 mai 2011, au lendemain d’une amnistie prononcée en sa faveur par le procureur de la République de Tunisie visant à annuler toutes les condamnations prononcées ces dernières années à son encontre[1], le domicile de M. Khemais Ksila, situé dans le quartier Al Manara, à Tunis, a été « visité », après que la serrure de la porte d’entrée eut été forcée. A l’intérieur de l’appartement, les lumières qu’il avait éteintes le matin en sortant étaient allumées, et toutes les portes qu’il avait fermée étaient ouvertes, y compris les portes de ses armoires. Cependant, aucun de ses objets de valeur - y compris son portefeuille, ses cartes de crédit, son passeport et son portable - n’a été déplacé ou dérobé.

M. Khemais Ksila a immédiatement alerté le ministre de l’Intérieur et le Directeur général de la sûreté nationale afin de leur expliquer les faits. Il a ensuite décidé de passer la nuit dans un hôtel, afin de ne pas risquer d’effacer les empreintes laissées par ses ravisseurs, et de peur que son appartement ait pu avoir été infiltré par des micros ou des caméras.

Il s’est par la suite rendu au poste de police pour établir un procès verbal de cette effraction, et a immédiatement porté plainte. Le lendemain, une équipe de la police technique dépêchée par le ministère de l’Intérieur s’est rendue à son appartement, afin de relever les empreintes digitales éventuellement laissées par ses ravisseurs. A ce jour, aucun des responsables n’a encore été identifié.

L’Observatoire dénonce fermement ces actes d’intimidation, craignant qu’ils n’interviennent en réaction à l’amnistie prononcée en sa faveur, et appelle le nouveau Gouvernement tunisien à protéger les défenseurs des droits de l’Homme en Tunisie et à veiller à ce que soit garanti en toutes circonstances les droits d’expression et le droit à la vie privée, garantis par les normes internationales de protection des droits de l’Homme, et éléments essentiels d’un environnement sain pour les défenseurs des droits de l’Homme prévu par la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’Homme, adoptée par l’Assemblée générale des Nations Unies le 9 décembre 1998.

Actions requises :

L’Observatoire vous prie de bien vouloir écrire aux autorités tunisiennes en leur demandant de :

i. Garantir en toutes circonstances l’intégrité physique et psychologique de M. Khemais Ksila, ainsi que de l’ensemble des défenseurs des droits de l’Homme tunisiens ;

ii. Mener sans délais une enquête exhaustive, indépendante, effective, rigoureuse, impartiale et transparente quant aux faits décrits ci-dessus, afin d’identifier les responsables, de les traduire devant un tribunal indépendant, compétent et impartial conformément aux instruments internationaux et régionaux de protection des droits de l’Homme, et d’appliquer les sanctions pénales, civiles et/ou administratives prévues par la loi ;

iii. Mettre un terme à toute forme de harcèlement à l’encontre de M. Khemais Ksila et de l’ensemble des défenseurs des droits de l’Homme tunisiens, afin qu’ils puissent exercer leur profession et mener leur activité de défense des droits de l’Homme librement et sans entrave ;

iv. Se conformer aux dispositions de la Déclaration sur les défenseurs des droits de l’Homme, adoptée par l’Assemblée générale des Nations unies le 9 décembre 1998, et plus particulièrement :

* à son article 1 qui prévoit que « chacun a le droit, individuellement ou en association avec d’autres, de promouvoir la protection et la réalisation des droits de l’Homme et des libertés fondamentales aux niveaux national et international » ;

* à son article 12.2 qui prévoit que « l’État prend toutes les mesures nécessaires pour assurer que les autorités compétentes protègent toute personne, individuellement ou en association avec d’autres, de toute violence, menace, représailles, discrimination de facto ou de jure, pression ou autre action arbitraire dans le cadre de l’exercice légitime des droits visés dans la présente Déclaration » ;

v. Plus généralement, se conformer aux dispositions de la Déclaration universelle des droits de l’Homme et instruments régionaux et internationaux relatifs aux droits de l’Homme ratifiés par la Tunisie.

Adresses :

· M. Caïd Beji Essebsi, Premier Ministre, Secrétariat Général du Gouvernement, Rue de la Kasbah, 1008 Tunis, Tunisie, Fax : +216 71 565 400

· M. Habib Essid, Ministère de l’Intérieur et du Développement local, Avenue Habib Bourguiba, 1001 Tunis, Tunisie, Fax : + 216 71 340 888 ; Email : mint@ministeres.tn

· M. Mouldi Kéfi, Ministère des Affaires Etrangères, Avenue de la Ligue des Etats arabes, 1008 Tunis, Tunisie, Fax : +216 71 783 858 , mae@ministeres.tn

· M. Lazhar Karoui Chebbi, Ministère de la Justice et des Droits de l’Homme, 57, Boulevard Bab Benat, 1006 Tunis, Tunisie, Fax : +216 71 568 106 ; Email : mju@ministeres.tn

· Ambassadeur de la Tunisie devant les Nations Unies à Genève, Mission permanente de la Tunisie auprès de l’Office des Nations Unies à Genève, 58 Rue Moillebeau, Case postale 272, 1211 Genève 19, Suisse, Fax : +41 22 734 06 63 ; Email : mission.tunisia@ties.itu.int

· Ambassade de la Tunisie à Bruxelles, 278 avenue de Tervueren, 1150 Woluwe-Saint-Pierre, Belgique, Fax : + 32 2 771 94 33 ; Email : amb.detenusie@brutele.be

***

Paris-Genève, le 16 mai 2011

Merci de bien vouloir informer l’Observatoire de toutes actions entreprises en indiquant le code de cet appel.

L’Observatoire, programme de la FIDH et de l’OMCT, a vocation à protéger les défenseurs des droits de l’homme victimes de violations et à leur apporter une aide aussi concrète que possible.

Pour contacter l’Observatoire, appeler La Ligne d’Urgence :

· E-mail : Appeals@fidh-omct.org

· Tel et fax FIDH : 33 1 43 55 20 11 / 33 1 43 55 18 80

· Tel et fax OMCT : + 41 22 809 49 39 / 41 22 809 49 29

[1] Le 25 avril 1998, M. Ksila avait été condamné à quatre années de prison ferme pour “propagation de fausses nouvelles”, puis libéré de façon anticipée deux ans plus tard. Le 12 février 2002, il avait par ailleurs été condamné par contumace à 10 années de prison pour “tentative de viol” dans une affaire montée de toutes pièces, alors qu’il était en exil.

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